BILAN DE LA GUERILLA KURDE EN TURQUIE
A l'occasion du 7ème anniversaire du
début de la guérilla, le parti ouvrier du Kurdistan (PKK) a tenu une
conférence de presse le 21 août à Bruxelles. Le porte-parole du PKK a
présenté le bilan des sept années de lutte comme suit:
"Notre guérilla s'étend depuis les
régions rurales jusqu'aux grandes villes. De août 1990 à août 1991, 570
échauffourées armées se sont produites entre les combattants de l'ARGK
et les forces colonialistes; nos équipes de guérilla ont effectué 75
embuscades, 24 actes de sabotage, 53 minages, des dizaines d'actions
pour le contrôle des grandes routes et des centaines de meetings dans
les villages.
"Au cours de l'année écoulée, 187
policiers et membres d'équipes spéciales, 148 officiers et
sous-officiers,1558 sergents et soldats, 162 protecteurs de village et
82 agents collaborateurs ont été tués. Par ailleurs , un maire, deux
gardiens de prison et huit autres fonctionnaires ont péri au cours de
nos opérations urbaines.
"Quant à nos forces de guérilla, 158
combattants sont morts en martyrs et neuf ont été blessés.
"Des dizaines de manifestations de
protestation ont été menées contre le colonialisme. Les paysans ont
marché vers les villes à Idil, Kerboran, Kurtalan et Silopi.
"A Diyarbakir, les ouvriers ont arrêté
le travail. Des dizaines de milliers de commerçants et d'artisans ont
fermé leurs magasins dans les villes de Diyarbakir, Batman, Cizre,
Nusaybin, Kulp, Lice, Silopi, Kerboran, Silvan, Dersim, Idil et Bilsim.
Les chauffeurs de taxi ont paralysé les transports. Les étudiants ont
boycotté leur école pour plusieurs jours.
"Des cérémonies de funérailles ont été
organisées pour nos martyrs à Dogubeyazit, Diyarbakir, Lice, Batman,
Silvan, Nusaybin, Silopi, Kerboran et Idil; Un demi million de
personnes au total ont participé à ces cérémonies.
"Des millions de gens dans tout le
Kurdistan ont célébré Newroz (nouvel-an kurde) en 1991.
"Les méthodes spéciales de guerre mises
en œuvre depuis 1984, par l'état turc ont conduit à un fiasco.
"A l'heure actuelle, il y a deux
pouvoirs au Kurdistan: le pouvoir d'Etat turc d'une part, et celui de
l'ARGK de l'autre.
"Des villes comme Kerboran, Sirnak,
Idil, Silopi, Nusaybin, Cizre, Batman, Lice et Diyarbakir soutiennent
le PKK.
"Durant les deux événement récents,
l'Etat turc s'est révélé impuissant.
"Lorsque 10 touristes allemands ont été
pris en otages par le PKK, l'état turc n'a pu les délivrer et l'ARGK a
relâché les otages sous les conditions déterminées par lui-même.
"Par ailleurs, l'Etat turc a
envahi le Kurdistan du sud avec des forces en nombre supérieur à celui
des forces d'occupation utilisées lors de l'invasion de Chypre. Le
résultat est un échec complet.
"Nos forces combattantes se trouvent
dans le nord-est du Kurdistan. Pour nous, le Kurdistan du sud-est est
un front arrière. Nos forces dans cette région s'y trouvent dans un but
d'entraînement et d'éducation. Nous avons une force de 350 combattants
à Hakurk. Elles ont porté des coups sévères à l'Etat turc. Des soldats
turcs ont été capturés à l'entrée de la ville. Les soldats turcs n'ont
pas été capables de passer du nord vers le sud. L'ARGK a stoppé les
troupes turques.
"L'Etat turc a perdu 200 soldats et
beaucoup ont été blessés. Deux avions et 3 hélicoptères ont été
détruits.
"Quant au PKK, 9 combattants sont
tombés en martyr et 5 ont été blessés. En plus de ceux-ci, 25 paysans
ont péri au cours de l'attaque des forces turques.
"Un certain nombre de soldats turcs ont
été capturés au cours de l'opération et ils sont toujours nos
prisonniers. L'armée turque ne peut les délivrer. A-t-elle pu délivrer
les touristes allemands à Tatvan? Nous les traitons comme des
prisonniers de guerre. Il sont en bonne santé et sous la protection du
PKK. Nous pouvons les relâcher seulement en conformité avec les règles
en application dans les cas similaires.
"Au Kurdistan du sud, les forces qui
collaborent avec le gouvernement turc n'ont pas de caractère national.
Ces forces sont motivées par des intérêts de famille ou de clan. Notre
peuple tant dans le nord que dans le sud ne les reconnait pas. Les
accords conclus entre Talabani et l'Etat turc sont sans valeur. Nous ne
reconnaissons pas leur légitimité".
Au cours de la conférence de
presse, le porte-parole du PKK a annoncé que quatre jeunes gens, fils
de 2 membres du parlement turc, qui ont récemment disparus, ont rejoint
les rangs des forces de l'ARGK.
L'ARMÉE TURQUE ET LES ESCADRONS DE LA MORT RÉPANDENT LA TERREUR
A la veille de la visite du président Bush en
Turquie, la violence à l'encontre des activistes et défenseurs des
droits de l'Homme s'est intensifiée jusqu'à un point effrayant à
travers la Turquie. Tandis que les sinistres escadrons de la mort
assassinaient un certain nombre d'hommes politiques et d'activistes des
droits de l'Homme, l'Armée turque étendait ses opérations au delà des
frontières turques et bombardait des paysans kurdes sous le prétexte
d'écraser les bases du PKK dans le nord de l'Irak.
Selon un communiqué de presse d'Amnesty
International du 9 août, l'assassinat d'une série de personnalités
publiques donne lieu à des allégations d'exécutions extra-judiciaires.
Le plus spectaculaire des ces événements dramatiques
fut l'assassinat de Vedat Aydin, un activiste des droits de l'Homme
célèbre d'origine kurde, le 5 juillet et le feu ouvert par les forces
de sécurité sur la foule assistant à l'enterrement d'Aydin à Diyarbakir
le 10 juillet.
Vedat Aydin, ancien enseignant, âgé de 37 ans
et marié, était un membre de l'Association des droits de l'homme de
Turquie (IHD) et président du Parti Populiste du Travail (HEP), à
Diyarbakir. Il était en procès devant la cour de sûreté de l'Etat à
Ankara pour avoir fait un discours en kurde au congrès annuel de la IHD
en octobre 1990. Peu de temps avant sa mort, Aydin avait fait un
discours en kurde à l'extérieur d'un hôpital de Diyarbakir après avoir
visité Siddik Tan qui était en traitement pour une blessure aux yeux
due à une explosion à Batman.
Le IHD, fondé en 1986, a subi une pression
considérable de la part des autorités. Plusieurs de ses dirigeants ont
été détenus et emprisonnés et des membres des sections régionales de
l'association ont été poursuivis pour avoir produit du matériel de
propagande sans l'autorisation du gouvernement. Les membres dirigeants
ont été poursuivis sur base d'accusations variées, la plupart de procès
se soldent en fin de compte par des acquittements. Plusieurs sections
ont été fermées, les sections de Batman, Gaziantep et Urfa
définitivement. Des membres du IHD ont reçu des menaces de mort par
lettre et par téléphone dans le passé. La Helsinki Watch a
recensé 39 cas de harcèlement des activistes du IHD en 1989, parmi
lesquels des détentions et des allégations de torture, et 24 cas de ce
genre en 1990.
Pour les faits concernant ce meurtre, nous nous
basons sur les révélations d'Amnesty International:
Vedat Aydin a été enlevé de sa maison de Diyarbakir
à environ minuit, le 5 juillet, par plusieurs hommes armés, apparemment
des officiers de police en civil, et son corps a été retrouvé criblé de
balles le matin du lundi 9 juillet, près d'Ergani, à quelques 60 km de
Diyarbakir.
Le corps a été enterré par la police sans une
autopsie complète après qu'il ait été retrouvé, en dépit du fait qu'il
s'agissait clairement d'un cas de meurtre. Le corps portait huit
blessures par balle, la jambe droite était brisée et il y avait des
traces de torture. Un hôpital d'Elazig a proposé de déposer le corps
dans sa morgue réfrigérée, mais ceci a été refusé par la police. Un
jour après, le corps a été enterré comme "non identifiable", le
gouverneur de la région de l'Etat d'urgence Hayri Kozakcioglu a affirmé
que Vedat Aydin a été trouvé assassiné. Cette affirmation a été faite
alors que la famille n'avait pas encore identifié le corps. Il y a eu
également des doutes sur la complétude des enquêtes de police
subséquentes sur les circonstances de la mort de Vedat Aydin.
D'après sa femme Sukran Aydin, il lui a dit le 5
juillet qu'il avait reconnu les hommes armés comme des policiers, et
qu'il allait se rendre avec eux aux quartiers généraux de la police
afin d'être interrogé.
Des milliers de personnes étaient présentes à
l'enterrement d'Aydin à Diyarbakir le 10 juillet. La foule chantait des
slogans en faveur du PKK, et des jeunes gens ont lancé des pierres sur
un poste de police lorsque les membres masqués des équipes spéciales
des forces de sécurité tiraient en l'air et sur la foule. La tuerie a
provoqué la mort de 7 manifestants: Behzat Özkan, 14 ans; Bahattin
Turan, 19 ans; Sehmuz Demir, Nevzat Kelekci, Zülfikar Yagan, 44 ans; et
Hafzi Ekinci, 55 ans et Mustafa Atan, 27 ans, qui sont décédés tous
deux plus tard suite à leurs blessures. Bien que les rapports de presse
aient suggéré à l'époque que certains membres de la foule avaient fait
usage d'armes à feu, il n'y a pas de preuves relatives à ces
allégations, et aucun policier n'a été blessé par des tirs venus des
manifestants.
Peu après ces tueries, des membres de la police et
des équipes spéciales ont pénétré dans un bus transportant des
journalistes, des photographes et des députés de la HEP et ont lancé
des bombes lacrymogènes. On rapporte que les députés et journalistes
ont été sévèrement battus avec des crosses de fusils et des matraques.
Plusieurs des journalistes et des députés ont été transférés par la
suite à l'hôpital. Le député de HEP, Adnan Ekmen, a rapporté qu'il
avait été battu presque jusqu'à l'inconscience et que les forces de la
sûreté l'avaient laissé pour mort. Quant il bougea et qu'il était
visible qu'il était vivant, un policier l'avait traîné par la cravate
et avait lancé à ses collègue: "Il y a un député ici, venez le frapper"
suite à quoi il fut battu à nouveau. Il est actuellement en traitement
à l'hôpital d'Ankara.
Des rapports officieux indiquent que neuf autres
personnes auraient également été tuées. Cinq personnes n'ont plus été
entendues depuis le jour de l'enterrement, et il n'y a aucune nouvelle
d'une 6ème personne, Muharrem Bazan, un membre de HEP depuis qu'il a
quitté le siège du parti à Diyarbakir à 5 heures de l'après-midi le 25
juillet.
Le gouverneur régional Hayri Kozakcioglu a confirmé
les décès et rapporte que 187 autres personnes avaient été blessées (38
par balles) et que 353 personnes avaient été mises en détention.
Deux des quatre députés de l'ANAP au pouvoir qui ont
été délégués par le premier ministre pour enquêter sur les événements,
ont rapporté à leur retour à Ankara le 23 juillet que leur enquête
indiquait que la foule n'avait pas fait usage d'armes à feu et qu'elle
s'était dispersée en réponse aux avertissements de la police. Les
députés de l'ANAP pour Siirt et Diyarbakir ont déclaré qu'ils pensaient
que les événements de la journée avaient résulté d'actions délibérées
des forces de sécurité: "la principale cause de l'incident est que les
administrateurs de la région considèrent tous les citoyens de l'endroit
comme coupables."
Une déclaration de l'ex-ministre de l'intérieur
Abdulkadir Aksu du 18 juillet révèle toute l'étendue du terrorisme au
Kurdistan turc. Il affirme qu'au cours de son mandant ministériel, 59
villages et 304 hameaux avaient été evacué et 34.477 kurdes déportés.
En fait, la mort d'Aydin était le 6ème incident
violent dirigé contre des personnalités marquantes kurdes en juin 1991.
Le 18 juin, un engin explosif avait explosé dans la
voiture de l'avocat Mustafa Özer qui était parquée à l'extérieur de sa
maison à Diyarbakir. L'explosion a complètement détruit la voiture.
Le 25 juin, à minuit, une explosion détruisait le
bureau de la IHD à Diyarbakir, blessant un voisin.
Le 28 juin, Yakup Kara, maire de la petite ville de
Hilal, près d'Uludere dans la province d'Hakkari, son chauffeur, Mehmet
Ürün, les techniciens Ali Benek et Hamit Kara et l'entrepreneur Hüseyin
Bulut ont été assassinés et leurs corps brûlés par trois personnes en
uniforme de commando et cagoule, selon Mehmet Kara, âgé de 80 ans, le
seul survivant. Le frère de Yakup Kara a affirmé que la famille s'était
toujours opposée au système de surveillance des villages, que Yakup
Kara a reçu des menaces à cause de son opposition au système, et qu'il
avait été détenu et torturé quatre fois, très récemment au cours de
1990, pour cette même raison.
Le matin du 2 juillet, une bombe explosait à Batman
dans la voiture de Hüseyin Siddik Tan par après qu'il ait pris le
volant depuis sa maison et garé sa voiture devant son magasin.
Tan, un membre dirigeant de la section de Batman de l'IHD,
de même que son fils de 10 ans et un ami ont été blessés dans la
déflagration, qui a complètement détruit la voiture.
Le 5 juillet, le commissaire de police Ilyas Kaya a
tué deux personnes, Kemal Karatay et Ali Haydar Aydogan, dans un
restaurant du district d'Avcilar à Istanbul pour avoir parlé et chanté
en kurde.
Le 11 juillet, Remzi Il, délégué de Diyarbakir du
HEP, a été abordé par deux personnes qui se sont présentées comme des
policiers et emmené en voiture avec un sac sur la tête vers un bâtiment
où il fut battu pendant qu'on l'interrogeait sur ses relations
politiques. Il est décédé d'une hémorragie cérébrale à l'hôpital le 27
juillet.
Le 12 juillet, des officiers de police et des
membres du Service national de renseignement (MIT) ont organisé huit
raids sur des maisons dans différents quartiers d'Istanbul, et tué dix
personnes: Ibrahim Erdogan, Hasan Eliuygun, Niyazi Aydin, Nazmi
Türkcan, Cahit Ozkaya, Zeynep Eda Berk, Mustafa Üstündag, Yücel Simsek,
Ömer Coskun et Hakki Dogan. L'hebdomadaire Tempo rapporte que ces
raids ont été effectués sur base d'informations données par la CIA
américaine.
Le 14 juillet, la police politique a effectué un
raid contre une maison du district Telsizler d'Ankara et a tué deux
autres personnes, un homme et une femme, Buluthan Kangalgil et Fintöz
Dikme.
D'autre part, le ministère de l'Intérieur a déclaré
le 19 août que 327 suspects avaient été arrêtés, étant accusés
d'organiser des actions à l'échelle nationale pour marquer
l'anniversaire de la fondation de l'ARGK, branche militaire du PKK.
Selon le ministère, 183 personnes avaient été prises lorsqu'elles
conduisaient des manifestations illégales à Istanbul, Izmir,
Adana et Diyarbakir. Au cours des échauffourées du 15 août, les
forces de sécurité ont tué 24 militants, 15 soldats, 2 policiers,
et quatre gardiens de villages furent également tués au cours de
celles-ci.
Selon Amnesty International, de
nombreuses personnes engagées dans des groupes d'opposition légale dans
le sud-est de la Turquie se sentent sans protection contre l'usage de
la force mortelle sans mandat par les forces de sécurité. Ces craintes
ont été augmentées par les commentaires faits par le président Özal
dans un discours à Diyarbakir le 24 juillet 1991 dans lequel il apparut
qu'il prônait une politique d'extermination à l'encontre de ceux
supposés être impliqués dans la violence politique: "Nous
frapperont ceux qui mènent la terreur jusque dans leur tanière... nous
n'avons aucune pitié pour ceux qui soutiennent ou sont impliqués dans
le terrorisme. Je voudrais dire ceci très clairement, et surtout ici
même à cet endroit... Nous les tuerons un par un. Personne ne peut dire
à la Turquie de faire ceci ou cela alors que le pays est engagé dans
une bataille contre le terrorisme".
"Amnesty International croit que
l'attitude des autorités concernant l'usage de la force, tel qu'il est
reflété dans les commentaires du Président, risque d'être perçue comme
avalisant l'usage illégal de la force ou même l'exécution sommaire des
supposés terroristes."
Helsinki Watch, dans une lettre au
président Bush du 11 juillet, lui demandait de soulever des
questions, au cours de sa rencontre avec le président turc Turgut Özal,
concernant la violence récente et au sujet des graves et récurrentes
infractions aux droits de l'homme, en particulier la torture, la
nouvelle loi anti-terreur, et des restrictions graves de la liberté de
la presse.
OPERATION CONTRE LES KURDES EN IRAK
La visite du président Bush en Turquie
du 20 au 22 juillet n'a pas seulement marqué le début d'une coopération
étroite militaire et politique entre la Turquie et les Etats-Unis au
Moyen-orient, mais fut aussi un signe d'encouragement pour les
pratiques répressives du pouvoir d'Özal. Durant sa visite de deux
jours, le président Bush a manifesté à toutes les occasions son soutien
personnel à Özal.
Prétendant que le PKK a des camps
d'entraînement dans différents pays voisins, dont l'Iran et l'Irak, le
président Özal avait déjà affirmé que la Turquie ne tolérerait pas plus
longtemps les activités terroristes et menacé de frapper les
terroristes où ils étaient basés.
Le quotidien Sabah du 9 août affirmait
que l'aviation américaine de reconnaissance avait déjà repéré les camps
du PKK au nord de l'Irak par transmissions satellites. Au cours de la
récente visite du Bush en Turquie, Özal lui aurait demandé de fournir
de photos des camps du PKK au nord de l'Irak. Selon Sabah, Bush
répondit positivement à la demande d'Özal avant que l'opération hot
pursuit ne commence. Ainsi, les militaires trouvèrent et frappèrent les
camps du PKK à l'aide des photos satellites.
C'est juste après le départ de Bush, le 5 août
1991, que l'Etat turc, au mépris de tous les accords internationaux,
lançait une opération militaire au delà des frontières turques sous le
prétexte d'anéantir les dernières forces des terroristes
séparatistes au nord de l'Irak.
Un des faits les plus déplorables,
concernant cette opération militaire, a été le silence total des
Etats-Unis et de ses alliés européens. En fait, une semaine auparavant,
une force de réaction alliée de 5000 hommes incluant des troupes
turques, appelée Poised Hammer, était stationnée en Turquie dans le but
de dissuader toute attaque de l'armée irakienne contre des Kurdes.
Mais cette fois, ce n'est pas l'Irak
mais la Turquie elle-même qui a attaqué les Kurdes en Irak et le Poised
Hammer, chargé de défendre les Kurdes, reste les bras croisés,
observant probablement avec étonnement l'opération.
D'après l'hebdomadaire 2000e Dogru du 4
août, des opérations militaires avaient déjà eu lieu sur le territoire
irakien le jour même du départ de Bush. Des raids ont été effectués sur
les villages de Sineht et Sule en Irak le 22 juillet par une unité
armée turque, mais aucune force de guérilla kurde n'a été trouvée à cet
endroit.
Selon les affirmations du gouvernement,
au cours de l'opération d'une semaine commencée le 5 août, un soldat
turc et un gardien de village ont été tués, tandis que les
"séparatistes" ont laissé derrière eux 35 morts. Cette assertion
a été par la suite contredite par le PKK (voir: Bilan de la guérilla
kurde en Turquie). Un communiqué de presse du Chef d'Etat-major du 19
août résumait l'opération comme ceci: "L'opération a commencé le 5 août
lorsque des avions ont bombardé les cachettes des terroristes et
fortement renforcé les positions de l'armée. Deux bataillons de
commando soutenus par des hélicoptères armés ont lancé l'attaque
terrestre le 7 août. A cause de la configuration des lieux, les
attaques ont été menées sur deux directions couvrant une région large
de 5 km. Après avoir pris le contrôle de la région, les troupes ont
préparé une nouvelle opération. Le 12 août, l'armée prit le contrôle
d'une région de 10 km de large, incluant le camp d'entraînement de
Hakurk localisé dans la vallée du Durjan".
Les leaders kurdes irakiens ont dénoncé
l'incursion dans le nord de l'Irak; Ils ont annoncé qu'au moins 15
Kurdes irakiens avaient été tués et au moins 30 blessés dans des raids
aériens sur les villages de Begova dans l'ancienne "zone de sécurité"
alliée et dans la zone de Khayre Zonk dans la province de Shewran près
de la frontière iranienne.
Massoud Barzani, le chef du Parti
démocratique kurde, a envoyé un de ses proches en Turquie pour obtenir
un arrêt des opérations afin de permettre aux Kurdes irakiens de se
retirer de la région des combats. L'autre dirigeant kurde, Jalal
Talabani, de l'Union patriotique du Kurdistan, était aussi à Ankara
pour s'entretenir avec les autorités turques. Il était prévu au départ
que Talabani rencontre le premier ministre Yilmaz. Toutefois, après
qu'il ait condamné l'opération turque lors d'une conférence de presse à
Rome comme acte violant les lois internationales, il fut accueilli
froidement à Ankara et reçu seulement par un haut fonctionnaire.
VERS UN EXPANSIONNISME TURC?
Les récentes opérations militaires ont
soulevé des inquiétudes concernant de nouvelles agressions turques.
L'hebdomadaire 2000e Dogru du 4 août affirme qu'il existait aussi un
plan secret pour frapper les militants PKK dans la vallée de la Bekaa,
mais une telle opération dépendrait dans une large mesure du soutien
israélien.
Le quotidien Sabah soulignait le 8 août
l'inquiétude concernant Mossul-Kirkuk. Le commentateur Güneri Civaoglu
disait: "Bien que l'argument initial turc semble être 'il y a eu un
raid dans le no man's land du nord de l'Irak et nous devons créer une
bande de sécurité', les autorités turques peuvent réaliser par la
suite, comme à Chypre, qu'une mise sur pied militaire d'une bande
étroite de territoire peut être dangereuse et pourraient
envisager une action de plus grande ampleur, peut-être vers la région
de Mossul-Kirkuk. Après tout, cette région était aussi considérée à une
certaine époque comme faisant partie de la Turquie par ceux qui ont
tracé les 'Misak-i Milli' (frontières nationales) au commencement de la
guerre d'indépendance turque. Depuis la signature du traité de
Lausanne, la question de Mossul-Kirkuk a toujours été une des
préoccupations majeures de la Turquie. Pour la première fois, la
Turquie est en train de créer une situation de fait près de cette
région. On est tenté de penser que la domination turque sur une partie
du nord de l'Irak puisse augmenter les chances de la Turquie par
rapport à Mossul et Kirkuk, riches en pétrole, lors d'un possible
remodelage du nord de l'Irak dans le futur".
LA FORCE "POISED HAMMER" EN TURQUIE
L'opération militaire turque contre les
camps du PKK en Irak a été lancée juste après la constitution d'une
force de réaction alliée de 5.000 hommes, appelée Poised Hammer,
en Turquie pour dissuader toute attaque de l'armée irakienne contre la
minorité kurde d'Irak.
Un porte-parole militaire américain
déclarait le 1er août à Ankara que la force constituée d'aviation et de
troupes terrestres provenant de 6 pays avait été déployée sur deux
bases principales à l'intérieur du rayon d'action du nord de l'Irak.
Les avions et 2.292 hommes venus des
Etats-unis , de Turquie, d'Angleterre, de France, des Pays-Bas et
d'Italie sont stationnés à la base aérienne d'Incirlik, près de la
ville industrielle d'Adana. La force aérienne comptait 132 avions à
ailes fixes américains, comprenant des chasseurs, des avions de
transport et des avions de surveillance, ainsi que 9 mirages et 4
avions de surveillance de la force aérienne française. Des avions se
trouvant à bord du porte-avion américain Forrester dans l'est de la
Méditerranée participent également à la force.
Une force terrestre de 2.709
hommes sous commandement unifié, équipée de 75 hélicoptères, a été
installée à Silopi près du point de rencontre des frontières syrienne,
irakienne et turque.
Le premier ministre turc Yilmaz a
déclaré aux journalistes au cours d'une visite dans l'est de la
Turquie: "Il ne sera fait usage de cette force internationale pour
aucun but agressif ou offensif. Dans un tel cas, il faut une
permission additionnnelle du gouvernement turc."
La Turquie a donné la permission pour
l'établissement de cette force multinationale sur son territoire le 18
juillet, juste avant la visite de Bush en Turquie. Néanmoins, le
ministre turc des affaires étrangères a souligné le 23
juillet que la force n'était qu'une continuation de l'opération
Provide Comfort, et insisté pour qu'on l'appelle Provide Comfort II
plutôt que le terme controversé Poised Hammer utilisé par les
Etats-Unis pour la force de dissuasion multinationale. La force est
autorisée à résider en Turquie jusqu'au 30 septembre 1991.
TENSION TURCO-ALLEMANDE
Les relations turco-allemandes se
sont tendues suite aux accusations réciproques liées à l'opération
turque en Irak et l'enlèvement de 10 touristes allemands par le
PKK.
Le ministre allemand des affaires
étrangères Hans Dietrich Genscher a affirmé le 9 août que l'offensive
turque frappait des civils dans la région kurde et constituait une
"grave violation des droits de l'homme". Il a dit également que l'acte
de la Turquie allait à l'encontre des principes de l'ONU et de la
Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE).
Suite à cela, le ministre turc des
affaires étrangères a rappelé l'ambassadeur en Allemagne a exprimé son
mécontentement au sujet de la déclaration de Genscher. Ankara décrivit
la coïncidence entre le relâchement de 10 touristes allemands par le
PKK et l'affirmation de Genscher comme significative.
Le PKK a enlevé 15 touristes allemands
le 1er août alors qu'ils campaient près d'un lac de cratères près de la
ville de Tatvan. Cinq des touristes sont parvenus à s'échapper par la
suite.
Le PKK a relâché les touristes restants le 10
août.
Le ministre turc des affaires étrangères a
affirmé:" Le ministre allemand des affaires étrangères a critiqué la
Turquie quatre jours après que l'opération ait commencé, suite à la
libération des otages. Un tel agencement dans le temps a donné lieu à
des spéculations d'après lesquelles les touristes allemands avaient été
relâchés par le PKK en échange d'une condamnation virulente par
l'Allemagne de l'opération turque en Irak. Cette affirmation peut créer
l'impression que Bonn apporte son soutien au PKK."
Pourtant, le PKK a annoncé que l'enlèvement était en
représailles pour la persécution de ses membres en Allemagne. En fait,
pendant que Genscher critiquait la Turquie, la police allemande mettait
en détention plus de 100 exilé kurdes qui attaquaient les banques et
les bureaux des compagnies d'aviation turques en Allemagne pour
protester contre l'opération militaire turque contre les camps du
PKK.
Par ailleurs, la Suisse a annoncé le 9
août qu'elle décidait de stopper toutes ventes d'armes et d'équipement
à la Turquie.
DEUX RAPPORTS SUR LA TORTURE EN TURQUIE
Les pratiques incessantes de torture en
Turquie ont fait l'objet de deux rapports alarmants.
Rapport sur la torture de la TIHV
Le 14 juillet 1991, la Fondation
des droits de l'homme de Turquie (TIHV), qui a été fondée pour
faciliter le traitement et la réhabilitation des victimes de la
torture, a présenté au public un rapport préparé au sujet des incidents
de torture et des décès survenus au cours des 6 premiers mois de 1991.
Nous reproduisons ci-dessous un
communiqué de presse de la TIHV sur ce rapport:
"Cette évaluation par la TIHV montre
que la torture reste l'infraction numéro un aux droits de l'homme à
l'ordre du jour en Turquie.
"D'après le rapport, 13 personnes sont
décédées dans des circonstances douteuses en détention ou en prison au
cours des 6 premiers mois de 1991. La situation révèle que la
sécurité de la vie est constamment menacée dans les lieux de détention
et les prisons.
"Le second point qui appelle
l'attention dans le rapport est le fait qu'environ 200 incidents de
torture ont été allégués dans cette période de 6 mois. Comme on sait,
malgré l'application généralisée des méthodes de torture telles que le
tabassage et la falaka (coups sur la plante des pieds) sur les
suspects de crimes ordinaires aux postes de la police et de la
gendarmerie, ces personnes ne réclament pas leurs droits et la torture
qui leur est infligée reste inconnue. Presque toutes les personnes qui
ont déposé des plaintes officielles concernant la torture et des
mauvais traitements ou qui, quoique très peu nombreuses, reçoivent des
rapports de médecin certifiant la torture sont des personnalités
politique. Considérant la difficulté qu'il y a à avoir une information
fiable en dehors d'Ankara et d'Istanbul, et spécialement des régions de
l'état d'urgence, il devient évident que ces 200 cas de torture ne
reflètent qu'une faible part des attaques infligées par les organes
d'Etat contre la dignité physique et morale des personnes.
"En dehors des journalistes et des avocats,
on trouvait également des joueurs de football, des homosexuels et même
des réfugiés irakiens parmi ceux qui ont été soumis à la torture après
avoir été mis en détention par la police ou la gendarmerie au cours de
la première moitié de 1991. Les proches des prisonniers qui ont été
détenus au cours de manifestations, des ouvriers et des étudiants en
constituent la majorité. Il y a des femmes et des jeunes filles parmi
les victimes de la torture. Presque toutes les femmes victimes de
torture se plaignent d'abus sexuels.
"L'étudiante I.B., qui a été pendue nue
par des bretelles durant sa détention au centre de police Gayrettepe à
Istanbul entre le 8 et le 22 avril, révèle un exemple grave d'abus
sexuel dans sa déclaration après sa libération: 'ils m'ont donné des
chocs électriques sur les mains, les doigts de pied et les
organes génitaux et m'ont menacé de viol'. La déclaration de E.P., qui
était également en détention à Gayrettepe, d'après laquelle elle a été
violée et sa plainte officielle devant le bureau des accusations
constituent un autre exemple frappant parmi les incidents mentionnés
dans les rapports.
"Trois filles, âgées de 12 à 13 ans,
qui se sont adressées à la section de Diyarbakir de l'Association des
droits de l'homme (IHD) le 15 mai, nous racontent un événement
incroyable. Ces enfants, qui avaient perdu leur chemin dans la région
montagneuse de Savur, ont été emmenés à la brigade de gendarmerie de
Mardin pour être interrogés, sur base de l'accusation qu'elles
pouvaient avoir essayé de rejoindre des terroristes. La déclaration de
H.K., 12 ans: 'les yeux bandés, j'ai été emmenée dans une
cellule. Ils m'ont battu avec des bâtons de bois et des matraques.
Ensuite, ils m'ont menacés de me violer si je ne leur obéissais pas'.
L'échec des tentatives pour ouvrir une enquête concernant cet incident,
qui se trouvait relaté dans la presse, est également frappant.
"Plus de 50 incidents dans le
rapport de la TIHV révèlent que des personnes ont eu les bras, les
jambes et d'autres organes brisés, ont du être hospitalisés et ont pu
recevoir des rapports médicaux. Cependant, le rapport ne mentionne des
enquêtes sur la torture que pour 4 incidents. Deux de ces enquêtes
concernent des incidents de torture qui n'avaient pas été rapportés à
la cour en conformité avec la Loi Anti-terreur, mais avaient été
transmis aux conseils administratifs provinciaux, de sorte que toute
autre procédure légale était évitée.
"Par exemple, I.A. et son frère qui ont
été détenus le 11 mai 1991, se sont adressés au bureau de procureur
public à Bitlis en affirmant qu'ils avaient été torturés et forcés de
manger des excréments de chien dans le poste de la gendarmerie à Bitlis
Güroymak. Pourtant, le procureur de la République Özer Tarhan,
conformément à l'article 15 de la Loi Anti-terreur, n'a ouvert aucune
enquête, et pris une décision de "non-responsabilité" concernant les
officiers de sécurité impliqués. L'annulation du procès concernant
l'assassinat de l'enseignant Siddik Bilgin en accord avec la nouvelle
loi est un autre exemple sous ce rapport.
"En conséquence, en évaluant les
incidents de torture qui sont survenus au cours des 6 premiers mois de
1991, il apparait clairement que la torture est pratiquée de façon
systématique, et comme méthode d'interrogatoire, plutôt que comme fin
en soi, elle est de plus en plus pratiquée sans restriction par les
officiers de la sécurité fondant leur autorité sur certaines
dispositions de protection de la Loi Anti-terreur. Ces mesures de
protection, en particulier l'article disant qu'aucun procès ne peut
être ouvert devant la cour ou qu'aucune enquête ne peut être menée sans
l'approbation des commissions de discipline constituées aux
administrations provinciales concernant les officiers de sécurité
participant aux incidents de torture permettent l'application de la
torture sans crainte d'être tenu responsable par les officiers de
sécurité.
"Dans le même temps, le gouvernement ne
prend aucune initiative qui puisse dissuader ceux qui pratiquent la
torture. Les membres du gouvernement, qui mentionnent la torture
seulement quand il y sont obligés, arguent que la torture n'est pas
appliquée systématiquement, et les déclarations obtenues sous la
torture sont largement utilisés dans les procès comme preuves. De
telles pratiques devraient être empêchées. La disposition légale qui a
été proposée dans le nouveau programme du gouvernement lu le 30 juin
1991 concernant la présence d'avocats lors des interrogatoires en
détention préventive devrait être mise en pratique immédiatement en
tant que mesure d'urgence."
Rapport d'Helsinki Watch
Helsinki Watch a publié le 30 juillet
1991 un nouveau rapport intitulé: "Turquie: torture, assassinats
policiers et violence politique en augmentation".
Nous reproduisons ci-dessous la partie qui
introduit le rapport:
"Helsinki Watch est gravement
préoccupé par l'escalade récente des violations des droits de l'homme
en Turquie. En premier lieu, le nombre des personnes décédées dans des
circonstances douteuses en détention en Turquie s'est accru de façon
dramatique. Depuis le 1er janvier, onze personnes sont mortes en
détention et deux autres ont disparu dont on pense qu'elles sont
décédées après avoir été détenues par les forces de sécurité.
"Deuxièmement, depuis le début de mars
1991, l'usage de la force mortelle par les forces de sécurité a connu
une escalade: la police a tué par balles 19 personnes au cours
des raids sur des maisons, 19 dans des manifestations, et 16 autres
dans des circonstances douteuses-un total de 45 personnes.
"Helsinki Watch demande au gouvernement
de Turquie de mettre fin à ces pratiques alarmantes, qui sont en claire
violation des normes et des accords internationaux. Chacun de ces
incidents devrait être promptement et complètement investigué et
les responsables poursuivis. Le gouvernement de Turquie devrait
affirmer clairement que de telles pratiques ne seront pas tolérées, et
que tout membre des forces de sécurité qui torture ou exécute
sommairement quelqu'un sera soumis à une enquête, inculpé d'acte
criminel et poursuivi devant la cour et, s'il est reconnu coupable,
puni de la manière appropriée.
"La Turquie est le 3ème bénéficiaire
par importance de l'aide américaine; elle a reçu approximativement 550
millions de dollars en aide militaire et économique pour l'année
fiscale 1991. A la lumière du tableau des violations continuelles
flagrantes des droits de l'homme par la Turquie, Helsinki Watch demande
au gouvernement des Etats-Unis d'expliquer, comme il est requis dans la
section 502b de l'Acte d'assistance étrangère, les 'circonstances
extraordinaires' qui justifient l'aide maintenue à la Turquie.
"Helsinki Watch est également
gravement préoccupé par une escalade des actes violents des groupes
terroristes en Turquie --poses de bombes, attaques armées et
assassinats. Depuis le 1er janvier 1991, les groupes terroristes de
gauche ont revendiqué les assassinats de 13 personnes, parmi lesquelles
des généraux à la retraite, des officiers de police et deux américains.
Helsinki Watch demande à ces groupes de mettre fin à ces actes
alarmants.
"La violence politique dans le sud-est
de la Turquie est également très préoccupante. Helsinki Watch demande
tant au PKK qu'aux forces de sécurité de s'abstenir d'attaquer des
civils, qui souffrent tant des attaques armées des forces de sécurité
que des militants du PKK."
Dans les parties suivantes, le rapport
donne des informations détaillées sur les morts en détention, 200
récents incidents de torture, des tueries au cours de raid, dans des
manifestations et dans d'autres circonstances, des tueries par des
groupes terroristes, la violence politique dans le sud-est de la
Turquie, et rappelle les prescriptions des lois internationales
concernant des droits de l'homme.
DISCRIMINATION A L'ENCONTRE DES PRISONNIERS KURDES
La Cour constitutionnelle a annulé le
22 juillet deux parties controversées de la Loi Anti-terreur qui
imposait des restrictions sur le système de la "mise en liberté
conditionnelle", variant selon la durée de la peine de prison impliquée.
Les sections annulées par la Cour sont
toutes celles du paragraphe A et une partie du paragraphe B de
l'article 4 provisoire de la Loi Anti-terreur. De la sorte, ceux qui
ont été condamnés en vertu de l'article 146 du Code pénal turc,
principalement les militants des organisations de gauche turques, ont
été relâchés. Les annulations sont en réponse à, et couvrent les
demandes reçues des cours de la loi martiale.
Quant à ceux qui ont été condamnés en
vertu de l'article 125 du Code pénal turc, principalement des
activistes kurdes, ils restent en prison parce que la Cour
constitutionnelle n'a pas encore traité la demande venue de la SHP qui
demande d'annuler l'entièreté des restrictions, y compris celles
concernant l'article 125.
CENSURE SOUS L'ETAT D'URGENCE AU KURDISTAN
La Cour constitutionnelle a levé le 5
juillet une partie de la censure sur l'information relative à des
incidents dans la région de l'état d'urgence, mais elle a donné
le feu vert à la continuation de la censure dans le Kurdistan turc.
Le décret 430, qui est devenu loi
depuis automne passé, prévoit des lourdes amendes ainsi qu'une
suspension de 10 à 30 jours pour les publications qui, volontairement,
falsifient et/ou présentent de façon incorrecte les faits concernant
les incidents dans la région de l'état d'urgence.
La Cour constitutionnelle a supprimé la
partie du décret concernant les "précautions supplémentaires
s'étendant au delà des frontières de la région, à prendre au cours de
la période de la loi de l'état d'urgence".
D'après le décret qui reste
d'application dans les régions de l'état d'urgence, "les publications,
incluant les quotidiens et magazines qui produisent des récits
falsifiés ou inexacts sur la région de l'état d'urgence ou sur les
activités des gouverneurs dans la région sont interdites dans la région
ou leur entrée doit être soumise à une autorisation officielle.
L'amende pour les magazines mensuels est égale à la somme de leurs
dernières ventes mensuelles; les périodiques qui publient moins
fréquemment qu'une fois par mois payent la somme de leur plus récente
vente, tandis que les publications nouvellement parues paient au moins
75% de la somme des ventes mensuelles moyenne du plus grand journal
quotidien.
La région sous la juridiction de l'état
d'urgence comprend l'Anatolie du sud-est, habitée principalement par
des Kurdes, et inclut Mardin, Diyarbakir, Sanliurfa, Hakkari, Bitlis,
Batman, Sirnak, Bingol et Tunceli.
LE TBKP FERME PAR LE TRIBUNAL
La Cour constitutionnelle a décrété le
22 juillet le Parti communiste unifié de Turquie (TBKP) illégal et
ordonné sa fermeture.
Le procureur général avait demandé à la
Cour en juin 1990 d'ordonner la fermeture du TBKP 10 jours après son
lancement officiel.
La décision de la Cour de fermer le
parti a été prise par consensus sur base du fait que le parti avait
comme but l'établissement de la domination d'une classe
sociale sur les autres et de détruire l'intégrité et le
système politique du pays.
Elle affirme que le parti a été établi
sous un nom illégal, et qu'il était la continuation d'un parti illégal.
D'après la décision, "le parti a violé plusieurs articles
constitutionnels, comme l'article 2, qui définit la république,
l'article 3 qui stipule l'intégrité de l'état, l'article 10 sur
l'égalité devant la loi, et l'article 14 sur les partis politiques, en
choisissant des noms et emblèmes interdits pour des partis, et en
ayant pour but de créer de minorités".
La décision de la Cour stipule le
transfert de toutes les propriétés et avoirs du parti fermé au trésor.
Commentant la décision de la Cour, le
secrétaire général du TBKP Nabi Yagci (Haydar Kutlu) a déclaré
que le gouvernement était le principal responsable pour cette fermeture.
"Cette décision constituera une
nouvelle honte pour la Turquie" a-t-il déclaré. "Indépendamment des
motifs, la décision de fermer un parti politique a décontenancé tous
ceux qui croient à la démocratie. Quand les articles 141, 142 et 163 du
code pénal turc ont été annulés, les responsables gouvernementaux ont
déclaré qu'ils garantissaient la liberté de pensée . Pourtant la pensée
n'est pas une chose si abstraite, et il apparait que le sens de la
liberté de pensée n'a pas encore été pleinement compris. Cette
fermeture est complètement hors de propos dans cette ère qui pave la
voie vers de nouvelles libertés.
"Lorsque nous sommes retournés pour la
première fois en Turquie, nous avons été qualifiés par le président
Özal de 'terroristes' mais une seule poursuite n'a pas été engagée
contre le TBKP depuis qu'il est devenu une organisation légale il y a
un an. Le parti a même reçu une invitation du Conseil supérieur pour
les élections afin de prendre part aux prochaines élections
générales, et un représentant de l'ANAP a assisté à sa convention.
En défense de leur décision de fermer
le TBKP, le président de la Cour constitutionnelle a déclaré qu'ils
étaient obligé d'agir ainsi aussi longtemps que les articles
sus-mentionnés de la Constitution et le code sur les partis politiques
resteraient en vigueur et réclamé que toutes les forces démocratiques
du pays demandent l'annulation des articles en question.
LA DISK ACQUITTEE APRES 11 ANS
La Cour militaire de cassation a annulé
le 16 juillet une décision de la cour de la loi martiale fermant
la Confédération des syndicats progressistes (DISK) et toutes les
peines de prison prononcées contre les dirigeants de la confédération.
La haute cour, qui avait investigué sur
le cas de la DISK pendant des années, a décidé que comme la Loi
Anti-terreur a supprimé l'article 141 du Code pénal turc, le cadre
légal dans lequel la DISK avait été fermée 11 ans plus tôt n'existait
plus dans le pays.
Après le coup d'état du 12 septembre
1980, la DISK avait été immédiatement interdite par les militaires et
1.477 membres dirigeants de la confédération et ses 30 syndicats
affiliés arrêtés. 244 d'entre eux, dont le président de la DISK
Abdullah Bastürk, avaient été condamnés par un tribunal militaire
à de lourdes peines d'emprisonnement.
La récente décision a mis
un pont final au long combat mené par la DISK contre son arrêt de mort.
Mais une nouvelle action sera maintenant lancée: la réinstallation de
l'organisation et le dédommagement des pertes qu'elle a subie suite à
la décision de fermeture.
Quand les activités de la DISK avaient été
suspendues en 1980, ses propriétés avaient été mises sous contrôle d'un
curateur désigné par l'état. Suite à la décision de la cour concernant
sa fermeture, les avoirs de la DISK avaient été annexés au trésor
et partagés ensuite entre diverses organisations d'Etat. Maintenant,
tous ces avoirs, estimés à 1,5 trillions de LT (3,5 milliards de
dollars) devront être retournées à la DISK.
Après la décision de la haute cour, le
président de la DISK Bastürk a déclaré: "Nous repartirons depuis là où
nous avons été stoppé le 12 septembre 1980. La DISK reprendra son
combat pour plus de droits du travail et de démocratie dans le pays."
Il a immédiatement tenu une réunion
avec les exécutifs de la DISK et de ses syndicats affiliés afin de
tracer le chemin à suivre. Les statuts de la DISK doivent maintenant
être remis à jour pour s'accorder avec les exigences de la législation
actuelle. La confédération tiendra sa convention en urgence en accord
avec ses statuts modifiés.
Le procès des dirigeants de la DISK a
suscité un émoi international et le régime turc a subi une forte
pression pour exiger la cessation des poursuites. Bien qu'elle était
fermée en Turquie, la Confédération des syndicats européenne (CES)
avait maintenu des relations avec elle en tant que l'une des deux
centrales syndicales de Turquie et même lui avait donné le statut de
membre à part entière.
TEST DE VIRGINITE POUR UNE TOURISTE ALLEMANDE
Le 22 juillet, une équipe
de police a fait une descente sur un hôtel touristique à Urla et
ordonné aux touristes turcs et étrangers résidant à l'hôtel de montrer
leurs certificats de mariage. Une jeune femme allemande, Angelika
Wittwer, qui résidait à l'hôtel avec son ami turc, n'a pu produire de
certificat de mariage. La police en colère a emmené la touriste
allemande à l'hôpital pour lui faire subir un test de virginité et
tester si elle avait eu des rapports sexuels cette nuit là. Suite aux
tests, la touriste allemande a été retenue pendant 15 heures par la
police avant d'être relâchée par un tribunal.
cerceve
INTERDICTION DES TROIS COULEURS
Le 18/6, le ministère de l'intérieur a
publié un décret interdisant l'utilisation des trois couleurs, verte,
jaune et rouge, simultanément sur tout objet exposé au public, y
compris des vêtements, des objets imprimés, des devantures de magasin,
etc., car elles constituent les couleurs du drapeau national kurde
utilisé par le PKK. Pour des raisons pratiques, les feux de
signalisation n'ont pas été soumise à cette interdiction.
LE TERRORISME D'ETAT EN JUIN-JUILLET
Le 19/6, un ouvrier, Cafer Karaday, a
été traduit devant la Cour de sûreté de l'état d'Istanbul pour avoir
distribué un tract politique au chantier naval de Taskizak. Il risque
une peine de 10 ans de prison.
Le 21/6, à Ankara, la police a attaqué
des fonctionnaires publics manifestant pour leurs droits syndicaux et
mis en détention deux manifestants .
Le 22/6, la CSE de Diyarbakir a
condamné 16 membres supposés du PKK à des peines de prison allant
jusqu'à la prison à vie. Les accusés, qui chantaient des slogans après
l'audition du jugement ont été battus par les soldats en fonction dans
la salle d'audience.
Le 22/6, le gouverneur d'Izmir interdit
la distribution de posters et de tracts publiés par l'Association des
droits de l'homme de Turquie (IHD) en protestation contre la Loi
Anti-terreur.
Le 23/6, dans le district de Selin à
Kars, 13 paysans ont été détenus pour avoir pris une tasse de thé avec
des membres supposés du PKK. Parmi les détenus se trouvent un homme âgé
de 70 ans, Mehmet Cengiz, et son petit fils âgé de 9 ans, Taner Cengiz.
Le 28/6, à Istanbul, la police a tué
par balles une femme, Figen Üstün, et en a blessé une autre au cours
d'un raid sur une maison supposée appartenir à la Dev-Sol.
Le 2/7, dans le district de Bismil dans
la province de Diyarbakir, la police a ouvert le feu sur un groupe
protestant contre la Loi Anti-terreur. Trois protestataires furent
blessés et 20 autres détenus par la police.
Le 2/7, dans le district de Dargecit
dans la province de Mardin, un paysan nommé Ramazan Durmaz a été tué
par balles par des équipes spéciales de police alors qu'il essayait de
sortir du village pour rechercher son fils qui avait disparu depuis un
certain temps.
Le 2/7, le parti socialiste (SP) a
annoncé que trois dirigeants de parti ont été soumis à la torture en
détention policière dans la province de Van.
Le 3/7, l'Association pour les libertés
(Özgür-Der) a annoncé qu'au cours du raid de la police du 28 juin,
Figen Üstün a été tué en dépit du fait qu'il criait: "Ne tirez pas! Je
me rends!".
Le 4/7, à Ankara, au cours d'une
manifestation par les employés de l'Etat pour protester contre la
politique sociale et économique du gouvernement, 30 manifestants ont
été mis en détention et de nombreux fonctionnaires venus d'autres cités
pour participer à la manifestation ont été empêchés par la force
d'entrer dans la capitale.
Le 4/7, à Izmir, les gardiens de la
prison Buca ont blessé 6 détenus politiques en les battant.
Le 5/7, le procès de 53 personnes,
accusées d'agir pour l'organisation de la Jeunesse révolutionnaire
(Dev-Genc) s'est ouvert à Ankara. Chacun des inculpés risque une peine
de prison allant jusqu'à 15 ans.
Le 6/7, un raid policier a été effectué
sur la section d'Ankara de l'Union des enseignants (EGIT-SEN) et 43 de
ses membres ont été mis en détention.
Le 6/7, un lycéen de 17 ans,
Ismet Cetinkaya, a été condamné à 2 ans et 4 mois d'emprisonnement par
la CSE d'Istanbul pour avoir participé aux célébrations du premier mai.
Le 8/7, quatre membres de la Commission
des droits de l'homme de l'assemblée nationale turque a déclaré que
deux avocats, Bedii Yarayici et Murat Demir, avaient été soumis à la
torture alors qu'ils se trouvaient en détention par la police à Ankara.
Les noms des tortionnaires ont été transmis au bureau du procureur
public.
Le 8/7, l'Association des droits de
l'homme de Turquie (IHD) a annoncé dans son rapport que des escadrons
de la mort terrorisaient la population dans l'Est. D'après l'IHD, le
maire de la ville Hilal dans la province de Hakkari, Yakup Kara et
quatre de ses amis ont été assassinés le 28 juin et leurs corps brûlés
par l'un de ces escadrons de la mort. Deux responsables du parti
socialiste (SP), Ibrahim Sarica à Cizre et Mehmet Kilic à Sirnak, ont
également été assassinés par des personnes non identifiées.
Le 8/7, à Istanbul, après la fermeture
de la Maison du peuple à Kadikoy par le gouverneur, le président de la
maison Sedat Gül et d'autres responsables ont été mis en détention pour
avoir tenu une conférence de presse en protestation contre l'action du
gouverneur.
Le 8/7, l'Association pour les libertés
(Özgür-Der) a annoncé que Bülent Pak, mis en détention policière
le 27 juin, était soumis à la torture et que sa vie était en danger.
Le 9/7, 17 personnes ont été traduites
en justice devant la CSE d'Istanbul pour avoir organisé un meeting non
autorisé le premier mai. Chacun des inculpés risque une peine de prison
allant jusqu'à 3 ans.
Le 10/7, IHD a annoncé que l'avocate
Fethiye Peksen, détenue le 5 juillet à Ankara, était soumise à la
torture et que sa vie était en danger.
Le 12/7, trois membres supposés de la
gauche révolutionnaire (Dev-Sol) ont été traduits en justice devant la
CSE d'Ankara. Le procureur a réclamé la peine capital pour chacun
d'entre eux en vertu de l'article 450/4 du code pénal turc.
Le 12/7, à Istanbul, le
gynécologue dr Ali Tezel Erol était détenu par la police ainsi que deux
autres personnes.
Le 13/7, le président local
du parti populaire du travail (HEP) à Urfa, Muhsin Melik et le
président d'Elazig du même parti, Orhan Demirbag ont été détenus par la
police.
Le 15/7, le représentant d'Istanbul des
Maisons du peuple, Hüseyin Kahraman, qui a été mis en détention par la
police le 6 juillet avec quatre de ses amis, a affirmé avoir été soumis
à la torture et que son tympan était endommagé. Un rapport médical
certifie que, souffrant des effets de la torture, il ne peut travailler
pour 15 jours au moins. A Izmir, un autre détenu politique, Günes
Ardic, a reçu après sa libération un rapport médical certifiant qu'il
ne peut travailler pour 10 jours à cause des torture qu'il a subi
pendant ses 2 jours de détention policière.
Le 17/7, à Ankara, la police a détenu
Elif Berk et trois autres personnes pour avoir participé aux
funérailles de la sœur de celle-ci, Zeynep Eda Berk, tuée au cours d'un
raid policier à Istanbul.
Le 18/7, à Ankara, l'avocate Fethiye
Peksen, après avoir été mise en détention policière pendant 13 jours, a
affirmé qu'elle avait été soumise à la torture.
Le 18/7, le gouverneur d'Istanbul a
ordonné la fermeture du siège de l'Association pour les libertés
(Özgür-Der). Au cours de l'exécution de cet ordre, la police a
également mis en détention 58 membres de l'association.
Le 19/7, à Ankara, au cours d'un raid
sur une maison, la police a tué Buluthan Kangalgil et Fintöz Dikme.
Le 19/7, le secrétaire général du HEP,
Ibrahim Aksoy, a affirmé que son neveu, Naki Göksu avait été assassiné
par des gendarmes dans le district de Mazgirt dans la province de
Tunceli le 9 juin.
Le 20/7, à Istanbul, au cours des
funérailles de Fintöz Dikme, tuée par le police à Ankara, 30 personnes
ont été détenues par les forces de sécurité.
Le 22/7, des centaines de personnes ont
été mises en détention à travers le pays au cours des manifestations en
protestation contre la visite du président Bush en Turquie.
Le 22/7, le HEP a annoncé qu'un
dirigeant de parti, Salahattin Özcelik, avait été emmené le 20 juillet
par des hommes prétendant être des policiers et qu'il n'y avait aucune
information depuis lors sur ce qu'il lui était advenu.
Le 22/7, le procureur a intenté une
procédure légale contre Turgut Kazan, bâtonnier du Barreau d'Istanbul,
suite à sa conférence de presse du 6 mai sur la nouvelle Loi
Anti-terreur.
Le 23/7, quatre personnes ont été
traduites devant la CSE, étant accusées d'avoir assassiné l'ancien
commandant régional de la gendarmerie à Adana. Trois des inculpés
risquent chacun la peine capital, et le 4ème une peine de prison allant
jusqu'à 15 ans en vertu de l'article 146 du code pénal turc.
Le 23/7, le président du HEP d'Urfa,
Muhsin Melik, a été arrêté par la CSE à Diyarbakir.
Le 24/7, à Izmir, deux membres du parti
socialiste ont été détenus pour avoir pris part à une action de
protestation contre la visite du président Bush.
Le 24/7, le chef du village de Güneyce
à Sirnak a annoncé qu'un berger kurde de ce village, Osman Ekinci,
avait été battu à mort au poste de gendarmerie de Görendoruk le
20 juillet. Ekinci, âgé de 27 ans, avait 6 enfants. Un des trois
autres bergers détenus en même temps que lui, Hasan Ekinci a été
gravement blessé au cours du tabassage. Les sorts de deux autres
bergers, Agit Ceker et Ramazan Gecgel, n'étaient pas connus.
Le 26/7, le docteur Ali Erol Teztel a
annoncé après ses 15 jours de détention policière qu'il avait été
soumis à la torture au cours de ses interrogatoires. Le même jour, à
Bursa, une étudiante universitaire, Gülseren Havaci a dit qu'elle avait
été soumise à la torture et au harcèlement sexuel au cours de son
interrogatoire au poste de police quand elle refusa d'être un
informateur de la police.
Le 26/7, toutes les personnes détenues
à Istanbul pendant la fermeture de la Özgür-Der deux semaines
auparavant étaient relâchées. Elles ont déclaré après leur libération
que la police les a soumis à la torture et menacé de mort.
Le 26/7, à Istanbul, quatre lycéens,
l'un âgé de 13 ans et les trois autres de 15 ans, ont déclaré qu'ils
avaient été soumis à la torture au poste de police pendant trois jours
suite à leur mise en détention pour avoir distribué un tract politique.
Le 27/7, huit prisonniers politiques
qui avaient été libérés le 25 juillet en vertu de la libération
conditionnelle, ont été à nouveau mis en détention pour service
militaire.
Le 29/7, à Istanbul, un chauffeur de
taxi, Muzaffer Onat a déclaré après ses cinq jours de détention
policière qu'il avait été soumis à la torture au poste de police. On
lui a délivré un rapport médical certifiant qu'il ne peut travailler
pour 5 jours suite aux effets de la torture.
Le 29/7, le président de l'Union des
barreaux turcs (TBB), Attila Sav a déclaré que les avocats qui
défendent les victimes de la torture étaient également soumis à la
torture. Dans une circulaire à tous les barreaux, il disait: "'L'avocat
Ramazan Ferat à Urfa, l'avocat Osman Yetkiner à Rize, l'avocat
Ersoy Saglam à Ordu, les avocats Abdurrahman Alaca et Yasar Ertas à
Kars, les avocats Murat Demir et Bedii Yarayici à Istanbul et l'avocate
Fethiye Peksen à Ankara ont été victimes de tortures et de mauvais
traitements alors qu'ils accomplissaient leurs devoirs professionnels.
Le 29/7, à Adana, sept personnes ont
été détenues pour avoir insulté le président de la République et les
membres du gouvernement. Tous les détenus seront jugés en vertu de
l'article 15 du Code pénal turc.
Le 30/7, deux membres supposés de la
Dev-Sol ont été détenus à Eskisehir.
Le 30/7, le président de Mersin du HEP
Fahri Gül a déclaré que 17 personnes mises en détention avaient été
soumise à la torture.
Le 31/7, la CSE d'Izmir a entamé le
procès de 31 personnes accusées d'avoir mené des activités du PKK; une
écolière de 16 ans, H.S. risque la peine capitale de même que 5 autres
inculpés.
LE DOCTEUR BESIKCI A NOUVEAU ARRETE
Alors qu'il avait été relâché en avril,
bénéficiant des articles provisoires de la Loi Anti-terreur, le célèbre
sociologue turc Dr Ismail Besikci a été une fois de plus arrêté par la
Cour de sûreté de l'état d'Ankara le 31 juillet 1991 en vertu de
l'article 8 de la même loi anti-terreur.
Il est accusé de "propagande
séparatiste" pour son livre récent intitulé Terrorisme d'état au
moyen-orient. Ce livre, publié par Yurt Yayinevi, avait déjà été
confisqué le 31 mai sur base des mêmes accusations.
Quelques semaines plus tard, le 31
août, le procureur de la République entamait une nouvelle procédure
légale contre le docteur Besikci devant la CSE d'Istanbul en vertu de
la même loi. Cette fois, il est accusé de "séparatisme" pour une lettre
adressée à un rédacteur du quotidien Cumhuriyet, dont le texte complet
a été publié dans l'hebdomadaire Yeni Ülke.
Auparavant, le 12 juillet, un autre
livre récent de Besikci, le programme de 1931 du parti populaire
républicain et la question kurde, avait également été confisqué par la
CSE pour séparatisme.
Le docteur Besikci risque une peine de
prison allant jusqu'à cinq ans et une amende de 100 millions de LT
(25000 dollars), dans chaque dossier ouvert en vertu de l'article 8 de
la Loi Anti-terreur.
Au cours des deux dernières années,
cinq autres livres écrits par le docteur Besikci avaient fait l'objet
de confiscations et de poursuites légales par la CSE en vertu de
l'article 142 du Code pénal turc. Comme cet article avait été annulé
par la Loi Anti-terreur, toutes ces poursuites avaient été abandonnées
et Besikci relâché.
Besikci devient maintenant victime de
la loi nouvelle qui l'avait sauvé de la prison.
PERSECUTION DES MEDIAS EN JUIN-JUILLET
Le 17/6, le numéro 8 du mensuel
Özgür Halk a été confisqué par la CSE d'Istanbul en vertu de l'article
312 du code pénal turc. Un numéro spécial du mensuel Haziran a
également été confisqué par la même cour pour un article critiquant la
loi anti-terreur.
Le 18/6, l'éditeur responsable du
bimensuel Emegin Bayragi, Nazim Talan, a été mis en détention par la
police à Istanbul pour un article critiquant la Loi anti-terreur. 2
jours plus tard, il était arrêté par la CSE d'Istanbul.
Le 18/6, le livre d'Umit Oguztan
intitulé la reine Sissi a été confisqué par une cour pénale
d'Istanbul pour motif d'obscénité.
Le 19/6, le n° 34 de l'hebdomadaire
Yeni Ülke a été confisqué par la CSE d'Istanbul en vertu de l'article 8
de la Loi anti-terreur sous l'accusation de séparatisme.
Le 23/6, la représentation d'une
pièce de théâtre à propos des grèves de la faim dans les prisons,
intitulé Ne soyez pas trompés! a été interdite par le gouverneur du
district de Merzifon
Le 27/6, le poète Ahmet Telli a été mis
en détention, accusé d'être impliqué dans un sabotage, mais relâché 6
heures plus tard.
Le 28/6, la CSE d'Ankara a arrêté une
journaliste, Mme Deniz Teztel, deux avocats, Murat Demir et Bedii
Yarayici et 4 autres personnes, sur l'accusation d'avoir fourni des
informations à l'organisation clandestine Dev-Sol. Deniz Teztel, chef
du service des droits de l'homme du quotidien Günes, et ses amis
avaient été détenus par la police deux semaines auparavant.
Le 3/7, dans la ville de Söke dans la
province d'Aydin, 18 personnes de nationalité danoise ont été mises en
détention pour avoir distribué des brochures contenant de la propagande
chrétienne.
Le 4/7, Mme Nazli Ilicak,
rédactrice du quotidien Tercüman, a été condamnée à une amende de 369
millions de LT (85.000 dollars) pour avoir insulté 102 députés de
l'ANAP au pouvoir dans un article intitulé "les chiens de Pavlov".
Le 9/7, quatre dossiers différents ont
été ouverts contre le bimensuel Emegin Bayragi en vertu de l'article 8
de la Loi anti-terreur. Accusé de séparatisme, l'éditeur responsable
risque une peine de prison allant jusqu'à 13 ans et une amende de 250
millions de LT (80.000 dollars) et l'éditeur une amende de 650 millions
de LT (150.000 dollars).
Le 10/7 , le procureur de la République
a entamé une procédure légale contre l'éditeur responsable du mensuel
Toplumsal Kurtulus, Necdet Kanbir, en vertu de l'article 312 du TPC,
pour un article sur le PKK.
Le 13/7, les directeurs du théâtre
Birlik, Erol Toy et Gül Göker, ont été mis en détention dans le
district de Manavgat où ils préparaient la représentation de la
pièce de Toy Pir Sultan Abdal. La représentation de cette pièce a été
interdite dans les provinces de Malatya et Isparta également. Bien que
Pir Sultan Abdal ait été représenté dans de nombreux pays européens par
le même théâtre, sa représentation en Turquie a jusqu'ici été interdite
19 fois par les autorités locales.
Le 16/7, deux responsables du mensuel
Sorun, Sirri Öztürk et Zeki Öztürk ont été traduits en justice en
vertu de l'article 312 du TPC pour un article sur l'anniversaire de la
résistance ouvrière de 1970.
Le 17/7, le représentant de Zonguldak
du mensuel Mücadele a été mis en détention
Le 22/7, deux correspondants de
Diyarbakir de l'hebdomadaire Yeni Ülke, Faysal Dagli et Haydar
Gecilmez, ont été mis en détention à Istanbul.
Le 23/7, le n° 39 de l'hebdomadaire
Yeni Ülke a été confisqué par la CSE d'Istanbul en vertu de l'article I
provisoire de la loi n° 5680.
Le 24/7, une journaliste suisse, Mme
Barbara Anna Kistler, ainsi que 3 autres personnes, ont été traduits en
justice devant la CSE d'Istanbul pour avoir travaillé pour une
organisation clandestine. Chacun des inculpés, qui ont été arrêtés en
mai, risque une peine de prison allant jusqu'à 22 ans.
Le 24/7, la direction de la sûreté
d'Ankara a refusé de délivrer un passeport à l'écrivain kurde Ahmet
Aras sous le prétexte qu'il y avait une décision de justice lui
interdisant de se rendre à l'étranger. Bien que Aras avait été
poursuivi 20 ans auparavant en vertu de l'article 141 du TPC, il a
bénéficié en 1974 d'une amnistie générale et il n'y a pas eu d'autre
action en justice depuis lors. De plus, l'article en question n'existe
plus depuis avril 1991.
Le 26/7, le journaliste Ümit Kivanc est
poursuivi pour un article qu'il a écrit pour la revue satyrique Nankör.
Il risque une peine d'emprisonnement allant jusqu'à 3 ans pour avoir
insulté Atatürk.
Le 30/7, un correspondant de 2000e
Dogru, Vedat Yayla a été mis en détention policière alors qu'il
couvrait les actions ouvrières dans l'usine verrière Pasabahce à
Istanbul
Le 31/7, Mme Ayse Zarakolu,
directrice de la maison d'édition Belge, a été poursuivie devant la
cour pénale n°2 d'Istanbul, pour avoir publié le livre du poète Sosyal
Ekinci intitulé Cagri. Elle risque une peine de prison allant jusqu'à 3
ans pour insulte à Atatürk.
Le 31/7, Lizzy Schmidt, correspondante
du quotidien allemande Frankfurter Rundschau, qui avait été arrêtée
alors qu'elle couvrait les incidents de Diyarbakir, est retournée en
Allemagne après 3 jours de détention. Une cour locale a jugé toutes les
accusations portées contre elle par la police sans fondement. La
journaliste allemande a déclaré avoir été soumise à des mauvais
traitements au cours de l'interrogatoire de la police.
Le 31/7, l'éditeur du quotidien Yeni Ülke,
Serhat Bucak, a été mis en détention par la police à Istanbul
Le 31/7, à Samsun, neuf personnes de
différentes nationalités ont été mises en détention pour avoir
distribué du matériel de propagande chrétienne, parmi lesquels les sud
coréens Kyungae Lee et Kyung Sihn- knm, les autrichiens Frank Seeley et
David Richard Wight, les suisses Carl Magnus et Blond Mellanoton,
l'allemande Merda Maria et la sud africaine Deborah Jean Lavler.