A l'attention des membres du Parlement
Européen et
de l'Assemblée Parlementaire
du Conseil de l'Europe.
6e MOIS DE "DEMOCRATISATION"
_ La Constitution de 1982 imposée par les militaires est toujours en
vigueur.
_ Le Conseil de
Sécurité Nationale demeure au dessus du gouvernement.
_ L'Etat-major
reste indépendant du Ministère de la Défense.
_ L'Organisation
Contre-Guérilla demeure intouchable.
_ Les Cours de la
Sûreté de l'Etat poursuivent leurs persécutions.
_ Le Kurdistan turc
est toujours soumis à l'état d'urgence.
_ Le terrorisme
d'Etat et les attaques aériennes se poursuivent dans le Kurdistan.
_ 22 députés kurdes
risquent la peine capitale.
_ 290 intellectuels
sont poursuivis pour une pétition adressée à l'ONU.
_ Un journaliste
kurde assassiné.
_ Un journaliste
emprisonné pour avoir critiqué l'armée.
_ Le sociologue
Besikci condamné à payer une amende de 190.000 $.
_ L'enseigne de
l'Institut Kurde enlevée par la police.
_ Les célébrations
du 1er mai dans la rue et une grève furent interdites.
_ Des tests de
virginité ont conduit deux adolescentes au suicide.
Depuis la formation de la nouvelle coalition
gouvernementale dirigée par Demirel, le Parlement Européen et le
Conseil de l'Europe ont adopté une attitude plus compréhensive et
tolérante à l'égard de la Turquie. Comme le Conseil de l'Europe,
principale institution européenne de défense des droits de l'homme, est
actuellement présidé par Ankara, le Rapport Dury sur les relations
CE-Turquie qui doit être débattu au Parlement Européen en juillet
contient des appréciations plutôt que des critiques envers le nouveau
gouvernement. Même le Rapport Gawronski sur les Droits du Peuple Kurde,
adopté récemment par le Parlement Européen, est accueilli par la presse
turque pro-gouvernementale comme un nouveau signe de sympathie
européenne envers la Turquie, car il exclut le droit à
l'autodétermination pour les Kurdes. (Pour ces deux rapports, voir
Info-Türk, mai 1992)
Pour ce qui est du Conseil de l'Europe, le débat sur
le Rapport Lentz-Cornette/Baarveld-Schalman sur la Turquie, qui est
plus courageux que ceux du Parlement Européen (voir Info-Türk, février
1992), est remis pour ne pas embarrasser les amis à Ankara.
Pourtant, la nouvelle coalition, en dépit de ses
promesses et déclarations destinées à charmer les rapporteurs du
Parlement européen, n'a pas adopté les réformes fondamentales pour
transformer la "démocratie" militariste mise en place par les généraux
putschistes en une véritable démocratie conforme aux conventions
internationales.
Bien au contraire, le terrorisme d'Etat n'a cessé de
se renforcer par des bains de sang, des arrestations, des poursuites,
des condamnations et des interdictions frappant les publications et
associations.
Voici la situation peu brillante des droits de
l'homme en Turquie au sixième mois de pouvoir de la coalition DYP-SHP.
• La Constitution de 1982 imposée par les militaires
est toujours en vigueur
Alors que le nouveau gouvernement avait promis
d'apporter une profonde modification de la Constitution de 1982, le
paquet d'amendements à la Constitution préparé par les partis de la
coalition et envoyé le 26 mai aux partis de l'opposition en vue d'une
élaboration ne contient aucun changement en vue de :
- mettre fin aux pouvoirs extraparlementaires du
Conseil de Sécurité Nationale, dominé par les chefs de l'armée;
- soumettre l'Etat-major des Forces Armées à
l'autorité du gouvernement;
- supprimer les Cours de la Sûreté de l'Etat;
- supprimer les articles qui permettent
l'interdiction des partis, des organisations et des publications.
kurdes ou de gauche,
_ L'Etat-major reste indépendant du Ministère de la
Défense
Le 14 mai, la Commission de Défense Nationale du
Parlement rejeta la proposition de loi du député du SHP, Celal
Kürkoglu, qui suggérait que le quartier général de l'Etat-major soit
intégré au cabinet du Ministère de la Défense.
Kürkoglu insista sur sa proposition argumentant que
les personnes nommées seraient sous l'autorité de celles élues ou que
les personnes élues seraient sous l'autorité de celles nommées.
Cependant, le Ministre de la Défense, Nevzat Ayaz,
expliqua que le problème ne pouvait pas être résolu par l'adoption de
la clause d'une loi mais devait être traité dans le cadre d'une
modification de la Constitution.
Etant donné que le paquet de réformes ne contient
aucun changement en la matière, le chef de l'armée restera, comme
avant, indépendant du Ministère de la Défense.
• L'Organisation Contre-Guérilla reste intouchable
En dépit de toutes les promesses faites pendant la
campagne électorale, le SHP a supprimé de son agenda le débat sur
l'Organisation Contre-Guérilla.
Une proposition du député kurde, Mahmut Alniak, pour
que soit menée une enquête sur les sinistres activités de cette version
turque du "Gladio" fut débattue par le groupe parlementaire du SHP le
26 mai dernier. Bien que la majorité du groupe ait voté en faveur de la
proposition, le leader du parti et Premier Ministre adjoint, Erdal
Inönü, rejeta le scrutin sous prétexte que la majorité ne suffisait pas
pour prendre une décision et annonça, "J'ai supprimé ce problème dans
l'agenda."
Cette organisation, dont la dénomination officielle
est Département de Guerre Spécial, est sous l'autorité du Chef
d'Etat-major et est chargée des "activités menées derrière le front et
de la défense du territoire national pendant l'occupation." Cependant,
elle joue un rôle actif et secret dans le terrorisme d'Etat dans le
sud-est de la Turquie.
• Le Kurdistan turc est toujours soumis à l'état
d'urgence
Comme nous le rapportions dans notre édition d'avril
1992, le Parlement turc approuva par une majorité écrasante, le 17 mars
dernier, un prolongement de deux mois de l'état d'urgence dans dix
provinces du sud-est.
Quand il était dans l'opposition, le SHP s'était
montré contraire à ce régime d'exception dans le Kurdistan turc, et
après les dernières élections législatives il était arrivé au
gouvernement avec la promesse de le supprimer. Cependant, en dépit
d'une forte opposition des membres du parti, la majorité du groupe
parlementaire du SHP vota en faveur d'un prolongement de l'état
d'urgence. Devant cette situation, les députés kurdes ont décidé
d'abandonner le SHP.
Selon une information récente, les partis au
gouvernement ont déjà décidé de prolonger à nouveau de quatre mois
l'état d'urgence en juillet prochain.
• Terrorisme d'Etat et attaques aériennes dans le
Kurdistan
Comme le souligne Amnesty International, le
terrorisme d'Etat dans le Kurdistan turc s'est renforcé en 1991 et au
début de 1992.
Le bain de sang du Newroz fut suivi d'une série
d'attaques militaires contre les villages kurdes aussi bien en Turquie
que dans le nord de l'Irak.
Tout récemment, le 31 mai, les raids aériens turcs
sur des emplacements civils sous contrôle kurde dans le nord de l'Irak
causèrent la mort d'au moins sept civils. Juste avant les élections du
19 mai dans le Kurdistan irakien, les chasseurs turcs avaient touché de
nombreux villages dans la zone.
Le Parti Démocratique du Kurdistan (KDP) a introduit
une plainte officielle auprès d'Ankara pour que cessent les attaques
au-delà des frontières. Le KDP fit savoir qu'en raison des continuels
bombardements des avions turcs, les civils refusaient de regagner leurs
maisons près de la frontière ou se cachaient dans des caves durant la
journée pour éviter les assauts.
Quant au Kurdistan turc, les forces de sécurité
turques ont poursuivi leurs attaques sur la population locale à l'aide
d'avions, de tanks, d'hélicoptères et d'armes lourdes.
Le Comité du Kurdistan, dans une conférence de
presse donnée le 21 mai à Bruxelles, rapportait que l'armée turque
avait récemment tué des centaines de villageois et que les membres de
la presse s'étaient vus refuser l'accès à la zone où se déroulaient les
opérations. "La population civile est délibérément massacrée et
la raison de ce carnage est que les Kurdes sont la source de la
guérilla et l'armée turque veut les tuer en masse," ajouta le Comité.
Le même jour, plus de 10.000 immigrants ou réfugiés
kurdes participaient à une manifestation massive dans les rues de
Bruxelles pour protester contre le terrorisme d'Etat dans le Kurdistan
turc et lancer un appel aux Communautés Européennes et aux autres
institutions internationales pour qu'elles fassent office
d'intermédiaires et prennent les mesures nécessaires pour mettre fin à
cette "sale guerre" entre les deux parties en conflit et aident à
frayer le chemin vers une solution politique.
Un porte-parole du Front National de Libération du
Kurdistan (ERNK) déclara à cette occasion : "La Turquie fait
constamment appel à la communauté internationale pour qu'elle
intervienne dans le conflit entre les Arméniens et les Azéris. Nous
voulons également que les institutions internationales contrôlent la
situation. Dans ce conflit, alors que les Kurdes demandent
continuellement le dialogue, l'Etat turc persiste à trouver une
solution par la force armée. L'Etat turc est en train d'imposer cette
sale guerre au peuple kurde."
_ 22 députés kurdes risquent la peine capitale
Le vice-président du Parlement, Yilmaz Hocaoglu
reçut en mai 22 dossiers demandant la levée de l'immunité
parlementaire de 22 députés kurdes.
Le Procureur principal de la Cour de la Sûreté de
l'Etat, Nusret Demiral, accusant les députés de faire des déclarations
contre l'intégrité de la République, demande au Parlement de lever leur
immunité afin de les traduire en justice. Si l'action en justice est
introduite, les députés risquent la peine capitale.
Les dossiers avaient été précédemment bloqués par le
président du Parlement Hüsamettin Cindoruk, qui affirmait que les
membres du Parlement jouissaient de "la liberté de la tribune."
Cependant, lorsque Cindoruk remplaça le Président de
la République Özal durant son voyage aux Etats-Unis, le procureur
soumit en son absence les dossiers au vice-président du Parlement
Yilmaz Hocaoglu, qui le remplaçait.
Apparemment, Cindoruk était parfaitement au courant
des intentions de son remplaçant, mais cette fois-ci il ne s'est pas
opposé à ce que les dossiers soient reçus.
Le 4 avril, le Procureur principal Demiral demanda
également à la Cour Constitutionnelle de fermer le Parti Travailliste
du Peuple (HEP) prétextant des activités incompatibles avec la
Constitution et le Code des Partis Politiques.
• 290 intellectuels poursuivis en raison d'une
pétition auprès de l'ONU
Une pétition conjointe signée par 290 intellectuels,
dont le président du HEP, Feridun Yazar, des députés kurdes, des
syndicalistes, des journalistes, des écrivains et des artistes et qui
demande l'intervention des Nations Unies et d'autres institutions
internationales pour mettre fin au terrorisme d'Etat dans sud-est de la
Turquie fut qualifiée par la presse pro-gouvernementale turque de
"haute trahison."
La pétition, qui affirme que "l'Etat turc tente
d'anéantir la population kurde", demande que la guérilla kurde soit
traitée selon les règles internationales relatives à la guerre.
Devant cette campagne provocatrice, le procureur
principal de la Cour de la Sûreté d'Etat, Nusret Demiral, ouvrit une
enquête et interrogea un par un les 290 intellectuels qui ont signé la
pétition. Le 4 juin il déclara que l'enquête portant sur la pétition
était close et que le dossier serait remis à la CSE pour y juger les
290 intellectuels.
• Un journaliste kurde assassiné
Un journaliste kurde de 27 ans, Hafiz Akdemir, qui
travaillait pour le quotidien Özgür Gündem, fut abattu le 8 juin à
Diyarbakir par un terroriste non-identifié.
Özgür Gündem rapporte qu'Akdemir fut tué d'une seule
balle, ce qui rappelle des dizaines d'autres meurtres survenus dans le
Sud-est et attribués à la Contre-Guérilla.
L'assassinat d'Akdemir s'est produit après que le
journal ait mené une campagne d'une semaine visant à attirer
l'attention sur diverses violations des droits de l'homme dans le
Sud-est et au deuxième jour d'une interview en série du leader du PKK,
Öcalan.
Auparavant, des hommes armés avaient assassiné le
représentant de 2000e Dogru, Halit Güngen, à Diyarbakir et le reporter
de Yeni Ülke, Cengiz Altun. Pendant le massacre du Newroz, le reporter
du journal Sabah, Izzet Kezer, fut également assassiné.
Plus de 90 personnes auraient été tuées dans des
circonstances controversées dans le sud-est turc au cours de l'année
dernière.
• Besikci condamné à payer une amende de 130.000 $
Le sociologue Ismail Besikci, qui est une des
principales cibles du terrorisme d'Etat en raison de ses courageuses
positions sur la question kurde, et son éditeur, Ünsal Öztürk, furent
condamnés le 24 mai par la Cour de la Sûreté de l'Etat d'Ankara à payer
des amendes d'une valeur de 900 millions de LT (130.000 $) en vertu de
l'Article 8 de la Loi Anti-Terreur sous l'accusation d'avoir fait la
propagande séparatiste dans neuf livres.
Des 14 livres écrits par Besikci, 13 ont fait
l'objet de poursuites judiciaires et neuf d'entre eux ont été
confisqués par les autorités.
Besikci, de 53 ans, fut arrêté pour la première fois
en 1971 pour ses recherches sociologiques sur l'est de l'Anatolie et
resta trois ans en prison. Il fut relâche en 1974 dans le cadre d'une
amnistie générale, mais ne put reprendre son poste à l'université. En
1979 il était de nouveau arrêté et remis en prison, et en 1980 une
nouvelle action était introduite contre lui en raison d'une lettre
qu'il envoya à l'Union des Ecrivains Suisses. D'autres actions furent
introduites contre lui pour les déclarations qu'il fit dans ses autres
procès.
Il resta encore six ans en prison, entre 1981 et
1987. Son livre Kurdistan: Colonie Internationale lui coûta une
nouvelle fois la prison en mai 1990, mais fut relâché en juillet.
Besikci fut arrêté à nouveau en mars 1991 pour un
message qu'il envoya à un Meeting de Solidarité Kurde en Allemagne en
octobre 1990. Il fut relâché en avril de la même année.
Certains de ses procès ont été abandonnés en raison
de la Loi Anti-Terreur, mais d'autres articles de cette loi en ont
ouvert d'autres. En août 1991, il était arrêté à Ankara pour ses
publications et ne fut relâché que deux mois plus tard. Il fut de
nouveau arrêté en novembre pour son livre Le Logement forcé des Kurdes,
et remis en liberté le même jour.
• L'enseigne de l'Institut Kurde enlevée par la
police
L'Institut Kurde, premier de son genre en Turquie,
fut fondé le 18 avril à Istanbul, mais perdit son enseigne en turc et
en kurde trois heures après lorsque la police l'enleva de la façade du
bâtiment.
Le 22 avril, le députe kurde, Mahmut Kilinc, soumit
une motion au Parlement demandant qu'on explique en quoi l'institut et
son enseigne violaient la loi. Il demanda également si le gouvernement
rejetait l'identité kurde à travers cette sorte d'interdictions.
L'Institut Kurde, structure privée pour l'étude de
la langue, l'histoire et la culture kurdes, fut fondé sous la
supervision du Centre Culturel de la Haute Mésopotamie.
Le Dr Ismail Besikci, un des fondateurs de
l'institut et président de celui-ci, déclara: "Les fondateurs de
l'institut ont été encouragés par le peuple kurde. Il y a une guerre
dans le Sud-est. La population là-bas en est maintenant consciente, et
en participant à des rassemblements elle fait partie d'un soulèvement
sans armes. Les Kurdes veulent apprendre leur propre histoire, leur
culture et leur langue."
Besikci déclara également qu'il trouvait l'approche
du nouveau gouvernement envers le problème kurde hypocrite et que tout
changement d'attitude en la matière n'était que le résultat de la
pression occidentale.
• Un journaliste emprisonné pour avoir critiqué
l'armée
Un journaliste du quotidien islamiste Zaman, Ömer
Okcu, fut arrêté le 12 mai dernier et devra purger une année de prison
à laquelle il avait été condamné pour avoir critiqué les forces armées.
Dans son article, écrit sous le pseudonyme Hekimoglu
Ismail, Okcu avait accusé les forces armées d'être discriminatoires
envers les croyants religieux.
L'Association des Avocats déclara que l'arrestation
d'Okcu confirmait le caractère "tabou" qu'avaient encore les forces
armées dans le pays. Le Conseil de la Presse et l'Association des
Journalistes reprochèrent également au gouvernement de permettre
l'emprisonnement de journalistes.
• Les célébrations du 1er mai et les grèves sont
toujours interdites
Malgré les promesses faites à l'Organisation
Internationale du Travail (OIT), le gouvernement continue d'interdire
les manifestations et les grèves des travailleurs.
Alors que le 1er mai fut marqué par des
rassemblements et des défilés dans les rues du monde entier, en Turquie
toute célébration à l'air libre fut interdite. Les syndicats durent
fêter le 1er mai dans des salles.
Bien des jours auparavant, les forces de sécurité
avaient été mobilisées partout dans le pays afin d'empêcher tout
rassemblement pour le 1er mai et ce même jour toutes les villes
industrielles furent occupées par des forces de police et des soldats.
Des centaines de personnes qui tentèrent d'organiser des rassemblements
furent immédiatement arrêtés.
D'autre part, le 31 mai, le gouvernement remettait
une grève de 14.000 agriculteurs du secteur public pour une période de
60 jours argumentant que celle-ci pouvait porter atteinte à la santé
publique et à la sécurité nationale.
• Des tests de virginité poussèrent deux filles au
suicide
Les tests de virginité obligatoires dans les écoles
pour jeunes filles adolescentes donnent lieu à des situations
dramatiques et à une grande colère au sein des cercles pour la défense
des droits de l'homme.
L'Association des Femmes Turques annonçait le 9 mai
dernier qu'une école de formation religieuse à Simav avait forcé deux
étudiantes adolescentes à subir des tests de virginité parce qu'elles
s'étaient rendues à un picnic avec des amis. L'examen confirma leur
virginité. Lorsque l'école chercha à leur faire subir un deuxième test
dans un hôpital plus grand, les deux filles tentèrent de se suicider et
l'une d'elles est morte.
Dans un incident similaire à Ula, une étudiante se
trouva dans une situation semblable et s'ôta la vie.
Les associations de femmes, à travers de diverses
actions se sont insurgées contre cette pratique.
DEUX MOIS DE TERRORISME D'ETAT
Le 6.4, dans la ville de Pötürge (Malatya), deux
personnes furent abattues par les forces de sécurité pour avoir refusé
de se rendre.
Le 6.4, dans le district de Lice, les forces de
sécurité firent feu sur la foule qui prenait part à une manifestation
non autorisée et blessèrent deux personnes. En signe de protestation,
les commerçants locaux fermèrent leurs commerces.
Le 7.4, les prisonniers politiques étaient encore
victimes de la discrimination lors de la Fête du Sucre. Alors que les
prisonniers ordinaires recevaient la visite de leurs parents, les
prisonniers politiques n'ont pas eu droit aux visites. Un groupe de
parents qui s'étaient réunis devant la Prison de Bayrampasa à Istanbul
furent dispersés de force et 40 d'entre eux furent arrêtés.
Le 8.4, pendant une descente dans une imprimerie à
Ankara, la police, affolée par la déflagration d'un pot d'échappement,
tira sur une voiture et tua une femme appelée Sükriye Kacmaz.
Le 8.4, dans la ville de Silvan (Diyarbakir), un
commando du Hezbollah tua deux personnes, Nihat Kadinan et Ahmet Turan.
La police empêcha une tentative de manifestation contre ce meurtre.
Le 8.4, à Istanbul, la police politique aurait
arrêté cinq personnes parmi lesquelles se trouvait un étudiant de 16
ans.
Le 9.4, la police arrêta 17 personnes accusées
d'avoir occupé les locaux du DYP à Istanbul le 28 mars.
Le 9.4, dans le district de Kozluk, la police
empêcha les funérailles d'un militant du PKK, tué au cours d'une
confrontation avec les forces de sécurité, et le couvre-feu fut décrété.
Le 9.4, l'Association des Droits de l'Homme
annonçait que, dans le district de Dargecit, les forces de sécurité
avaient mené un raid dans le village de Tanyeri et avaient torturé
Sevki Akinci, de 15 ans, l'obligeant à se coucher sur des cendres
incandescentes.
Le 10.4, à Istanbul, la police annonçait
l'arrestation de sept membres supposés du PKK.
Le 10.4, quatorze prisonniers politiques de la
prison spéciale de Kayseri se sont mis en grève de la faim pour
protester contre les conditions d'incarcération. L'administration de la
prison fit savoir que les grévistes seraient soumis à des sanctions
disciplinaires.
Le 10.4, à Urfa, les forces de sécurité arrêtaient
15 membres supposés du PKK.
Le 12.4, 40 prisonniers politiques se sont mis en
grève de la faim à la prison spéciale de Ceyhan pour protester contre
les conditions d'incarcération.
Le 12.4, à Adana, 450 travailleurs d'une usine de
fertilisants commencèrent une grève sur le tas pour protester contre
les licenciements. La tente dressée par les travailleurs fut arrachée
par la police et trois d'entre eux furent arrêtés.
Le 15.4, à Batman, Ramazan Sat et Güler Öztas
déclaraient avoir été torturés au poste de police au cours de leur
détention entre le 24 mars et le 1er avril.
Le 15.4, à Istanbul, un groupe d'étudiants qui
portait vers Ankara une pétition contre la présence policière à
l'université fut stoppée à la frontière de la province et 22 d'entre
eux furent arrêtés. Pendant ce temps, à l'Université Mimar Sinan, dix
étudiants étaient arrêtés pour avoir organisé un meeting sur le même
thème.
Le 17.4, le IHD annonçait qu'on ne disposait
d'aucune information quant à l'endroit où se trouvait la jeune fille
Nazmiye Sevgin, arrêtée 19 jours auparavant.
Le 17.4, au cours des opérations policières menées à
Elazig et Malatya, 15 personnes, dont un étudiant de 15 ans, furent
arrêtées pour avoir soutenu le Dev-Sol. Par la suite, un des détenus,
Mehmet Emin Tüzün, était hospitalisé, victime de la torture.
Le 17.4, à Istanbul, un garçon de 12 ans fut abattu
par les gendarmes alors qu'il passait près d'une zone sous surveillance
policière.
Le 18.4, à Istanbul, les forces de sécurité firent
une descente dans une maison et tuèrent 11 membres supposés du Dev-Sol.
Le même jour, une autre opération qui se déroulait à Savur causa la
mort à 32 militants supposés du PKK.
Le 18.4, à Izmir, un meeting sur les incidents du
Newroz et la Question Kurde, était annulé à la dernière minute en
raison des menaces policières.
Le 18.4, dans la ville de Bismil (Diyarbakir), le
Kurde Mithat Kutlu mourait au poste de police six heures après sa
détention alors qu'il était torturé.
Le 19.4, à Idil, plus de 3.000 habitants kurdes
tentèrent de quitter la ville en direction des montagnes mais furent
arrêtés par les tirs des forces de sécurité. Une personne fut tuée,
deux autres blessées et 14 arrêtées.
Le 19.4, à Istanbul, le gouverneur fermait
l'Association pour la Culture Patriotique et Démocratique pour une
durée indéterminée.
Le 21.4, dans la ville de Kozan (Adana), le jeune
Osman Akbas, de 15 ans, fut abattu par les forces de sécurité.
Le 21.4, à Bursa, l'Association des Droits et des
Libertés (Özgür-Der) fut interdite par le gouverneur sous prétexte
qu'elle maintenait des liens avec des organisations clandestines. En
outre, le gouverneur n'autorisa pas les congrès annuels des sections de
Bursa et Aydin de l'Association des Travailleurs Municipaux
(Tüm-Bel-Sen).
Le 21.4, à Batman, après la mort d'un de leurs
collègues dans un affrontement armé avec la guérilla kurde, les
policiers lancèrent une opération de représailles et s'en prirent aux
bureaux des partis, des associations et des publications progressistes.
Plus de 200 personnes furent arrêtées.
Le 21.4, au cours des funérailles des 11 personnes
tuées le 18 avril, la police arrêta plus de 100 personnes.
Le 21.4, les opérations policières menées à Istanbul
se soldaient par l'arrestation de 11 personnes.
Le 22.4, à Adana, huit étudiants de l'Université de
Cukurova furent arrêtés par la police qui effectuait une descente chez
eux.
Le 23.4, la police arrêtait trois personnes à
Istanbul et cinq autres à Ankara pour avoir distribué des tracts pour
le 1er Mai.
Le 23.4, les bureaux des syndicats de la santé
(Tüm-Saglik-Sen), de l'éducation (Egitim-Is) et des travailleurs
municipaux (Tüm-Bel-Sen) à Usak furent fermés par un tribunal à la
demande du Gouverneur.
Le 24.4, à Istanbul, les bureaux de l'Association
des Droits de l'Homme (IHD), de l'Association des Femmes Patriotiques
(YKD), Özgür-Der, de l'Association des Femmes Progressistes (DKD) et du
Syndicat des Travailleurs Municipaux (Bem-Sen) furent perquisitionnés
par la police et treize personnes furent arrêtées.
Le 24.4, la police arrêta neuf membres supposés du
Parti Révolutionnaire Communiste de Turquie (TDKP) à Edirne et neuf
autres à Adana pour avoir prêté leur soutien au PKK.
Le 24.4, à Istanbul, 24 personnes furent arrêtées
pour avoir pris part aux activités d'une organisation religieuse nommée
le Front des Pillards du Grand Est (BDAC).
Le 24.4, une semaine d'opérations policières dans la
région soumise à l'état d'urgence aurait donné lieu à l'arrestation de
26 personnes. Dans les villes d'Eruh et Kurtalan, un total de neuf
personnes furent placées en détention par les tribunaux pour avoir
soutenu le PKK.
Le 25.4, un groupe de jeunes filles commença une
grève de la faim à Izmir pour protester contre l'expulsion de l'école
de leurs camarades pour y avoir apporté des publications de gauche.
Cependant, la police est immédiatement intervenue et huit grévistes
furent arrêtées.
Le 25.4, un paysan kurde de 80 ans, Mehmet Yilmaz,
qui avait été arrêté par la police le 21 mars au cours d'une opération
menée à Batman, perdit connaissance durant sa détention et décéda par
la suite à l'hôpital.
Le 26.4, les Maisons du Peuple d'Eregli et Karabük
furent perquisitionnées par la police et un total de 14 personnes
furent arrêtées.
Le 26.4, Kadir Kurt, arrêté au cours d'un raid dans
le village de Birlik à Bismil (Diyarbakir) décéda le 18 avril au cours
de son interrogatoire. Son frère, également appréhendé, déclara qu'on
avait introduit une matraque dans l'anus de Kurt.
Le 26.4, à Cukurca (Hakkari), deux jeunes bergers
kurdes furent tués par l'explosion des mines qu'avaient placé les
forces de sécurité. Les villageois se plaignent de ne plus pouvoir
laisser paître leur bétail.
Le 26.4, les gouverneurs interdisaient un meeting
sur la Question Kurde à Ankara et un autre sur le 1er mai à Istanbul.
Le 26.4, à Istanbul, l'Association d'Art et de
Culture de Kartal, l'Association des Personnes sans Emploi,
l'Association de Solidarité des Travailleurs Municipaux et
l'Association des Femmes Progressistes (DEMKAD) furent perquisitionnés
par la police. Par ailleurs, cinq membres de l'Egit-Sen furent arrêtés
au cours d'une descente de police chez eux.
Le 27.4, à Istanbul, deux vendeurs d'eau furent
abattus par des agents de police et un troisième fut gravement blessé.
Le 27.4, la police arrêtait 16 personnes pour avoir
distribué des tracts pour le 1er mai.
Le 27.4, les forces de sécurité arrêtaient 12
personnes à Adiyaman, 10 à Idil, 4 à Silopi et 9 à Adana pour avoir
aidé les militants du PKK.
Le 27.4, à Izmir, la Maison du Peuple de Karsiyaka
était fermée par le gouverneur pour y avoir toléré la présence de
publications interdites et son président, Hakan Caliskan, ainsi qu'un
groupe de membres, furent arrêtés.
Le 27.4, à Istanbul, 41 personnes furent arrêtées
pour avoir distribué des tracts pour le 1er mai.
Le 27.4, à Kiziltepe, la voiture du président local
du SHP, Mehdi Cecen, fut la cible de tirs de mitrailleuse, et quatre
personnes, dont Cemen lui-même, périrent.
Le 27.4, un chauffeur de taxi, Agit Salman, fut
torturé à mort après avoir été arrêté par la police politique à Adana.
Le 28.4, l'Association d'Etudiants de l'Université
d'Anadolu, à Eskisehir, fut fermée après une descente de police pour y
avoir toléré la présence de publications interdites. Par ailleurs, le
président local de Özgür-Der, Nuran Askeri, fut arrêté.
Le 28.4, dans la ville d'Alanya, la police annonçait
l'arrestation de huit militants supposés du PKK.
Le 29.4, à Izmir, un tribunal ordonna l'arrestation
du propriétaire d'un café pour avoir omis d'hisser le drapeau turc le
Jour de la Souveraineté Nationale.
Le 29.4, à Samsun, dix personnes furent appréhendées
pour avoir participé aux activités d'une organisation clandestine.
Le 30.4, à Elazig, la police politique arrêtait
vingt personnes et bon nombre d'entre elles furent battues par les
gardes lorsqu'elles furent amenées à la prison du Type E.
Le 30.4, la police politique arrêtait 11 membres
supposés du Parti Communiste Révolutionnaire de Turquie (TDKP) à Izmir
et quatre membres supposés du Dev-Sol à Ankara.
Le 30.4, à Adana, la police fit une descente dans
une maison et tua trois membres supposés du Dev-Sol.
Le 1.5, le Gouverneur d'Istanbul ordonna la
fermeture de l'Association d'Art et Culture de Kartal, de l'Association
des Personnes sans Emploi, de l'Association de Solidarité envers les
Travailleurs Municipaux et de l'Association des Femmes Progressistes
(DEMKAD).
Le 1.5, le Gouverneur de la Région sous l'Etat
d'Urgence annonça la détention de 45 personnes récemment capturées par
la police dans la région.
Le 2.5, à Gümüshane, un étudiant de 13 ans accusé
d'avoir assassiné son camarade d'école fut trouvé mort dans sa cellule
de confinement au centre où il était interrogé.
Le 2.5, la CSE de Diyarbakir condamna sept personnes
à des peines de prison allant jusqu'à 25 ans pour avoir pris part aux
actes du PKK.
Le 4.5, à Ankara, les forces de sécurité firent une
descente dans une maison et y tuèrent quatre militants supposés du
Dev-Sol.
Le 5.5, la police politique arrêtait huit personnes
à Edirne et huit autres à Adana pour activités pro-PKK.
Le 5.5, l'avocate Meryem Erdal, présidente de
l'Association des Avocats Contemporains à Ankara (CHD), déclarait
qu'elle avait été torturée au cours de l'interrogatoire qui suivit son
arrestation lors des célébration du 1er mai.
Le 5.5, à Istanbul, l'Association pour les Droits et
les Libertés (Özgür-Der) fut fermée par le gouverneur. Neuf personnes
furent arrêtées au cours de la descente de police.
Le 5.5, la police politique arrêtait 16 étudiants
universitaires à Eskisehir et 12 à Konya.
Le 6.5, la Maison du Peuple de Yildirim à Bursa,
l'Association pour les Personnes sans Emploi et l'Association des
Femmes Patriotiques à Istanbul furent fermées pour activités
incompatibles avec leurs objectifs déclarés.
Le 6.5, à Kiziltepe, le Hezbollah abattait Sirac
Akbay.
Le 6.5, à Sakarya, la police politique arrêtait 13
membres supposés du PKK.
Le 7.5, à Ankara, la police abattait Mustafa Gök
pour refus obéissance lorsque celle-là lui ordonna d'arrêter sa voiture
pour un contrôle de circulation.
Le 7.5, à Nusaybin, les forces de sécurité faisaient
une descente dans une maison et tuaient sept personnes dont une femme.
Le 7.5, dans la ville d'Igdir (Kars), neuf personnes
furent arrêtées pour avoir aidé le PKK.
Le 7.5, à Zonguldak, la police politique arrêtait
dix membres supposés d'une organisation clandestine.
Le 8.5, à Bursa, le travailleur Tevfik Özugurlu fut
abattu par la police pour avoir refusé de se rendre lors d'une fouille.
Le 7.5, cinq dirigeants de la Maison du Peuple
d'Üsküdar à Istanbul furent condamnés par la CSE d'Istanbul à un an de
prison chacun pour avoir participé à des activités incompatibles avec
la Loi sur les Associations.
Le 7.5, la police politique arrêtait huit membres
supposés de l'Armée de Libération des Ouvriers-Paysans de Turquie
(TIKKO) à Kayseri et cinq membres du TDKP à Bursa.
Le 7.5, à Ankara, 27 étudiants furent blessés au
cours d'une escarmouche entre étudiants de gauche et de droite au
campus l'Université d'Hacettepe et la police arrêta 27 d'entre eux.
Le 10.5, dans le village d'Izar à Mardin, les forces
de sécurité arrêtèrent cinq Kurdes.
Le 10.5, à Nusaybin (Mardin), trois jeunes paysans
périrent tués par l'explosion d'une mine placée par les forces de
sécurité.
Le 12.5, onze soldats d'origine kurde furent arrêtés
à Tokat après avoir déserté leur unité militaire à Amasya.
Le 13.5, à Ankara, la police arrêtait 40 étudiants
qui participaient aux funérailles d'un militant du Dev-Sol mort le 4
mai.
Le 14.5, le Gouverneur d'Ankara ordonna
l'introduction d'une action en justice pour fermer Yargi-Sen, un
syndicat fondé par les fonctionnaires travaillant dans les tribunaux et
les institutions judiciaires.
Le 14.5, à Ankara, 30 étudiants furent blessés au
cours d'une escarmouche entre étudiants de gauche et de droite à
l'Université de Gazi.
Le 14.5, Sekvan Aytu, président local du IHD à
Sirnak, fut arrêté.
Le 17.5, la CSE de Diyarbakir condamna six personnes
à des peines de prison allant jusqu'à 24 ans pour avoir pris part aux
activités du PKK. Dans une autre affaire, la même cour condamna une
personne à 12 ans et 9 mois de prison pour la même raison.
Le 17.5, à Kiziltepe, le Hezbollah abattit deux
personnes, Nuri Göcen et Edip Ibrahimoglu.
Le 17.5, les forces de sécurité firent feu, depuis
un hélicoptère de l'armée, contre un groupe de paysans qui faisaient
paître leur bétail dans le district d'Uludere, tuant un paysan et
quelque 100 animaux et blessant quatre autres paysans.
Le 19.5, les autorités provinciales fermèrent les
sections de Samsun et Vezirköprü du Syndicat des Travailleurs de
l'Enseignement (Egit-Sen) et les sections de Tunceli du Syndicat des
Fonctionnaires Publics (Kam-Sen) et du Syndicat des Travailleurs du
Service Sanitaire (Saglik-Sen).
Le 19.5, la police politique arrêtait cinq personnes
à Adana.
Le 19.5, le travailleur immigrant turc Hasan Alici,
de nationalité suédoise, fut arrêté à son arrivée à l'Aéroport
d'Antalya pour une action en justice introduite il y a 12 ans.
Le 20.5, à Fethiye (Mugla), Durmus Caylak, qui avait
été arrêté le 9 février pour trafic illégal, a disparu depuis. Son père
a demandé à la police de lui communiquer l'endroit où se trouvait son
fils.
Le 21.5, cinq personnes qui distribuaient des tracts
de la Jeunesse Patriotique à Manisa furent arrêtées par la police
politique.
Le 22.5, à Istanbul, Serdar Tanis, de 17 ans, fut
abattu par la police pour avoir refusé de stopper la voiture qu'il
conduisait, deux autres passagers de la voiture furent gravement
blessés.
Le 25.5, une infirmière enceinte, Nazli Top, restée
en détention policière du 27 avril au 7 mai, accusa la police de lui
avoir infligé des chocs électriques dans ses parties génitales et
d'avoir introduit une matraque dans son vagin. Ses déclarations furent
corroborées par un rapport médical.
Le 24.5, à Van, la police arrêtait 93
étudiants de l'Université de 100. Yil qui honoraient la mémoire de
Sirin Tekin, un étudiant assassiné en 1988 par un groupe
fondamentaliste.
Le 24.5, deux médecins de l'Hôpital d'Etat de
Diyarbakir et un étudiant universitaire à Samsun furent arrêtés par la
police.
Le 24.5, trois membres du HEP furent arrêtés au
cours d'une série d'opérations policières à Sirnak.
Le 24.5, des personnes inconnues assassinèrent
Ibrahim Demir, de 22 ans, à Batman et Ismail Sertkaya, de 36 ans, ainsi
qu'Ahmet Eren, de 17 ans, à Kiziltepe.
Le 25.5, à Sirnak, les forces de sécurité firent feu
sur un minibus tuant Salih Dolmus, père de huit enfants, et blessant
une autre personne.
Le 25.5, un étudiant de 16 ans fut expulsé d'une
école secondaire de Nazilli pour ses opinions politiques.
Le 26.5, à Adana, 34 prisonniers politiques de la
Prison Centrale commencèrent une grève de la faim pour protester contre
la dégradation des conditions d'incarcération. Six des grévistes sont
des femmes.
Le 26.5, la police annonçait l'arrestation de huit
membres supposés du Dev-Sol au cours des opérations menées à Trabzon,
Rize et Artvin.
Le 26.5, un ancien député de l'ANAP pour la province
de Siirt, Kemal Birlik, fut arrêté pour avoir fourni de l'aide
matérielle au PKK.
Le 27.5, à Gaziantep, la police arrêta 14 membres
supposés du TKP-ML.
Le 27.5, à Samsun, quatre étudiants furent arrêtés
pour avoir pris part aux activités du PKK.
Le 28.5, à Ankara, quatre personnes furent arrêtées
pour avoir pris part aux activités du PKK.
Le 29.5, à Istanbul, six personnes qui avaient été
arrêtés en avril pour appartenance à une organisation fondamentaliste,
déclarèrent avoir été torturées au cours de leur interrogatoire. Leurs
déclarations furent soutenues par un rapport médical.
Le 29.5, à Maras, la police arrêta six personnes
pour activités fondamentalistes.
Le 31.5, à Istanbul, un chauffeur de taxi, Recep Ali
Topal, déclara avoir été torturé après son arrestation, le 28 mai, et
s'être vu dans l'obligation de soudoyer les policiers pour échapper à
d'autre sévices. Cependant, il déclara avoir été battu une dernière
fois après les avoir soudoyés.
Le 31.5, une récente opération policière se soldait
par la détention de 244 personnes.
Le 31.5, à Mersin, deux personnes furent arrêtées
pour avoir scandé des slogans kurdes.
DEUX MOIS DE POURSUITES CONTRE LES MEDIAS
Le 1.4, un livre intitulé Doza Kurdistan, retraçant
les mémoires de Kadri Cemil Pasa et édité par Mehmet Bayrak, fut
confisqué par la CSE d'Ankara en vertu de l'Article 8 de la Loi
Anti-Terreur.
Le 1.4, une nouvelle revue défendant l'opinion des
islamistes, Ak-Zuhur, fut confisquée par la CSE d'Istanbul pour
propagande séparatiste.
Le 1.4, à Konya, le journaliste Muzaffer Tiglioglu
du journal Yeni Meram fut battu et poignardé par des personnes non
identifiées.
Le 8.4, le N°25 de l'hebdomadaire Yeni Ülke et le
premier numéro de la nouvelle revue, Gercek, furent confisqués par la
CSE d'Istanbul en vertu de l'Article 8 de la LAT.
Le 14.4, le numéro d'avril du mensuel Newroz fut
confisquée par la CSE d'Istanbul pour séparatisme.
Le 21.4, un correspondant de l'hebdomadaire Gercek,
Sadik Gülec, fut arrêté par la police alors qu'il couvrait les
funérailles d'un militant politique à Istanbul.
Le 25.4, la distribution d'une édition spéciale
consacrée au 1er mai du mensuel Kurtulus fut interdite par le
Gouverneur d'Istanbul.
Le 26.4, le N° 32 de la revue culturelle Imza fut
confisqué par la CSE d'Istanbul en raison de ses articles sur le Newroz.
Le 27.4, le correspondant à Izmir du magazine
politique Mücadele, Devrim Demir, fut arrêté devant la prison de Buca à
Izmir, alors qu'il couvrait une action de protestation.
Le 2.5, l'édition spéciale pour le 1er mai du
mensuel Ekimler fut confisquée par la CSE d'Istanbul en vertu de
l'Article 6 de la LAT.
Le 3.5, cinq journalistes, Dogan Dargin, Metin
Kayaoglu et Güzel Aslaner du Emegin Bayragi ainsi qu'Emel Atici et
Imdat Halis du Hedef furent arrêtés par la police politique.
Le 5.5, quatre membres du Groupe Musical Yorum,
Metin Turan, Elif Sumru Güzel, Taner Tanriverdi et Nuray Erdem, furent
arrêtés par la police à l'Aéroport d'Istanbul alors qu'ils rentraient
d'une tournée d'un mois en Europe.
Le 6.5, Irfan Ucar, correspondant d'un nouveau
journal qui verra bientôt le jour, Özgür Gündem, fut arrêté alors qu'il
interviewait un avocat dans son bureau d'Istanbul.
Le 6.5, à Izmir, le correspondant de Yeni Demokrasi,
Ali Haydar Umut, fut placé en détention par un tribunal.
Le 10.5, le rédacteur en chef du mensuel Toplumsal
Kurtulus, Necdet Kambir, qui avait été arrêté le 1er avril à Istanbul,
déclara avoir été torturé pendant son interrogatoire.
Le 10.5, le N°43 du bimensuel Mücadele fut confisqué
par la CSE d'Istanbul l'accusant de faire de la propagande pour une
organisation illégale.
Le 12.5, le journaliste Irfan Ucar, arrêté le 6 mai,
déclara après sa mise en liberté qu'il avait été torturé durant son
interrogatoire.
Le 12.5, le correspondant à Mardin de l'hebdomadaire
Yeni Ülke, Ibrahim Yersiz, fut arrêté par la police et placé en
détention par un tribunal.
Le 16.5, l'éditeur du mensuel Özgür Halk, Riza
Erdogan, fut condamné par un tribunal à 5 mois de prison pour une
interview du leader du PKK, Öcalan.
Le 16.5, la représentante de Diyarbakir du bimensuel
Mücadele, Sakine Fidan, fut arrêtée par la police.
Le 19.5, les concerts de Samsun et Ordu du groupe
musical Yorum ainsi qu'une représentation du Théâtre Birlik d'Ankara à
Trabzon furent interdites par les gouverneurs de ces provinces.
Le 20.5, deux journalistes du journal Zaman, le
rédacteur en chef, Sevket Engin, et le journaliste, Ilhan Bardakci,
furent inculpés pour avoir critiqué dans un article les opinions
d'Atatürk, fondateur de la république.
Le 22.5, l'édition du mois de mai du mensuel
Kurtulus fut confisquée par la CSE d'Istanbul en vertu de l'Article 8
de la LAT.
Le 26.5, les derniers numéros des hebdomadaires Yeni
Ülke et Azadi furent confisqués par la CSE d'Istanbul pour propagande
séparatiste. Selon Yeni Ülke, 33 de ses 83 numéros publiés à ce jour
ont été confisqués par la CSE d'Istanbul, principalement pour
propagande séparatiste.
Le 28.5, le chanteur Mehmet Suavi Saygan fut arrêté
en raison d'une action en justice introduite contre lui il y a quatorze
ans, en 1978.
Le 29.5, le représentant à Diyarbakir du mensuel
Özgür Halk, Hüseyin Eben, fut condamné par la CSE à 26 mois de prison
et à payer une amende de 46 millions de LT (6.500 $).
Le 31.5, les derniers numéros des mensuels Hedef et
Emegin Bayragi ainsi que ceux de l'hebdomadaire Gercek furent
confisqués par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste ou pour
avoir fait l'éloge de certaines organisations illégales.
LE PARLEMENT EUROPEEN CONDAMNE LES ATTAQUES TURQUES DANS LE KURDISTAN
Le Parlement Européen adopta dans sa session du 12
juin une résolution sur les Droits du Peuple Kurde proposée par le
libéral italien Gawronski. Quant au vote de la motion de résolution sur
les relations CE-Turquie, proposée par la socialiste belge Raymonde
Dury, il fut remis à la session de juillet 1992.
Dans la résolution adoptée, le Parlement Européen
condamne "les attaques des forces armées turques contre les zones
peuplement et les bombardements, par l'aviation turque, des villages
kurdes d'Anatolie et d'Irak" ainsi que "le terrorisme du PKK contre les
Kurdes et les Turcs."
Cependant, l'organe législatif des Communautés
Européennes omit de se prononcer sur le droit à l'autodétermination du
peuple kurde et de proposer une solution politique à long terme.
Voici les principaux points concernant la Turquie,
repris dans la résolution sur les droits du peuple kurde adoptée par le
Parlement Européen :
"Le Parlement européen,
"• condamne les attaques des forces armées turques
contre les zones de peuplement kurde en Anatolie et en Irak, ainsi que
les actes de terrorisme du PKK contre les Kurdes et les Turcs;
"• condamne les bombardements, par l'aviation
turque, de villages kurdes d'Anatolie et d'Irak en raison des risques
que ceux-ci présentent pour la population civile;
"• estime que les mesures économiques et culturelles
prises par le gouvernement turc pour régler le problème kurde sont
insuffisantes et déclare que seul un dialogue politique entre le
gouvernement turc et les représentants élus du peuple kurde peut
conduire au règlement du problème kurde en Turquie, à condition, bien
entendu, que le gouvernement turc conserve une volonté sincère de
négocier; invite le nouveau gouvernement turc à faire un pas en avant
dans sa politique de coopération positive et de reconnaissance
culturelle des Kurdes de Turquie au sens de la Convention européenne
des droits de l'homme et de la déclaration sur les minorités et se
félicite de son plan visant à réduire la pauvreté dans le Sud-Est de
l'Anatolie et de ses propositions de réformes démocratiques et
juridiques;
"• invite le gouvernement et le Parlement turcs à
éliminer de la législation en vigueur toute disposition directe ou
indirecte (inscrite dans la Constitution, dans les lois ou dans les
Codes) comportant des mesures discriminatoires à l'encontre de
personnes, de groupes ou d'associations pour des raisons linguistiques
ou ethniques);
"• estime qu'il importe que soit respectée la
diversité culturelle du peuple kurde et que les droits spécifiques qui
lui sont garantis devraient englober la possibilité de s'exprimer,
d'écrire, de publier, d'être jugé et de recevoir un enseignement en
langue kurde;
"• estime qu'il est indispensable de définir des
mesures économiques appropriées destinées à améliorer le développement
économique et social de la région de l'Anatolie, qui seraient d'un
bénéfice réel pour la population kurde;
"• condamne la récente recrudescence du terrorisme,
qui ne saurait que compromettre les réformes qui sont d'un intérêt
capital pour les Kurdes;
"• exhorte les associations de Kurdes turcs vivant à
l'étranger de s'abstenir de tout acte de violence, de souscrire
délibérément à la politique de protection des droits de l'homme et de
s'engager dans la voie de la coopération;
"• charge sa sous-commission "droits de l'homme" et
la commission parlementaire mixte CEE/Turquie, se réunissant dans le
cadre de l'accord d'association, de suivre de près l'évolution de la
situation des droits de l'homme des Kurdes en Turquie, car leur
violation ne manquerait pas d'avoir des effets défavorables sur les
relations entre la CEE et la Turquie;
"• invite la Communauté et ses Etats membres à faire
preuve de vigilance pour s'assurer que la population kurde jouit du
respect des droits de l'homme, tant individuels que collectifs, en Iran
et en Syrie, et insiste pour que le développement des relations de la
Communauté avec ces pays dépende notamment du traitement qu'ils
réservent aux citoyens kurdes."
LE RAPPORT D'AMNESTY INTERNATIONAL SUR LA TURQUIE
Amnesty International, dans son récent rapport de 31
pages et publié en mai 1992, critique le gouvernement turc en les
termes suivants : "En dépit des grands engagements pris par le
gouvernement pour que cesse la torture dans les postes de police,
aucune des mesures pratiques ou législatives nécessaires n'a été
adoptée, et la systématique pratique de la torture s'est donc maintenue
avec la même intensité. Il y a eu une alarmante augmentation du nombre
de 'disparitions', des exécutions sans jugement et des assassinats par
des équipes de la mort dans la province de Mardin."
Voici les principaux points du rapport d'A.I.
• La Loi Anti-Terreur - Des prisonniers de conscience
L'Article 8 de la Loi Anti-Terreur autorise
l'arrestation d'individus et leur inculpation pour diffusion de
propagande séparatiste même lorsque ceux-ci n'ont pas préconisé la
violence. Un certain nombre de personnes qu'Amnesty International
considère être des anciens prisonniers de conscience ont été détenus
pendant des semaines ou des mois tandis qu'on enquêtait sur des
inculpations faites en vertu de l'Article 8. L'organisation exprima
également ses craintes à propos des obstacles supplémentaires que
dresse devant les personnes qui se plaignent de tortures ou mauvais
traitements, l'Article 15, paragraphe 3 de la Loi Anti-Terreur en vertu
duquel les plaintes de torture étaient adressées au "conseil
administratif local" qui avait le pouvoir de bloquer les actions en
justice intentées contre un officier de police accusé de mauvais
traitements ou de torture. Le 31 mars [1992], lorsqu'il prenait les
dernières décisions sur la Loi Anti-Terreur, la Cour Constitutionnelle
annula l'Article 15 paragraphe 3. Les plaintes seront donc directement
traitées par les procureurs publics au lieu de les adresser au conseil
administratif local. Cependant, dans les provinces du sud-est soumises
à l'état d'urgence, les plaintes de torture contre les forces de
sécurité seront encore soumises à l'approbation des conseils
administratifs locaux et ce en vertu de la Loi sur les Poursuites
Judiciaires contre les Fonctionnaires Publics.
Le Loi Anti-Terreur diminua les peines de milliers
de prisonniers condamnés pour des délits communs, mais les réductions
sont plus limitées dans le cas de prisonniers politiques accusés de
travailler pour un renversement violent ou une division de l'Etat, en
vertu des Articles 146 et 125 du CPT. La Cour Constitutionnelle, bien
qu'estimant précédemment que la discrimination envers les personnes
condamnées en vertu de l'Article 146 du CPT était injuste et
inconstitutionnelle, estime que les sévères condamnations imposées à
ceux condamnés en vertu de l'Article 125 (pour des délits comparables
en tous points à ceux commis par les condamnés en vertu de l'Article
146) ne devraient pas être levées. Plus de 200 prisonniers,
principalement des Kurdes, resteront donc en prison, beaucoup d'entre
eux condamnés suite à des procès injustes dans des cours militaires
pendant les années qui suivirent le coup d'Etat militaire de 1980.
La Cour Constitutionnelle n'introduisit aucun
changement à l'Article 16 de la Loi Anti-Terreur qui prévoit un régime
de confinement solitaire et d'extrême isolement pour les prisonniers
condamnés ou en détention en vertu d'un quelconque Article relevant de
la Loi Anti-Terreur. Amnesty International craint que toute tentative
d'application de l'Article 164 ne donne lieu à des conditions
d'incarcération où sont pratiqués des traitements et des sévices
cruels, inhumains et dégradants. Amnesty International a demandé à
plusieurs reprises l'annulation de cet article.
• Le recours systématique à la torture persiste
partout en Turquie
Une interminable série de témoignages de torture
n'ont cessé de parvenir jusqu'à Amnesty International et de paraître
dans la presse turque tout au long de l'année 1991 et début 1992. En
1991, dans son rapport annuel, l'indépendante Fondation des Droits de
l'Homme de Turquie fit savoir qu'elle avait reçu des informations,
principalement à travers la presse quotidienne, concernant 168
incidents impliquant des cas de torture de 552 personnes, parmi
lesquelles 218 avaient obtenu des rapports médicaux officiels appuyant
leurs déclarations.
Les même facteurs qui par le passé avaient contribué
au maintien d'une grande incidence de la torture sont restés inchangés.
Ces facteurs réunis forment un système efficace qui permet aux
tortionnaires de poursuivre leurs activités. Ces facteurs sont :
I) Les suspects sont soumis à des
périodes de détention extrêmement longues, dépassant souvent les
limites légales.
II) Les détenus sont tenus au
secret, ce qui est une règle quasiment invariable.
III) Les médecins employés par l'Etat et les centres
médicaux autorisés fournissent souvent des rapports trompeurs.
IV) Les plaintes de torture sont
généralement ignorées, retardées ou supprimées.
• Longues périodes de détention policière
Les normes internationales des droits de l'homme
demandent que les détenus soient rapidement amenés devant un juge. En
novembre 1991, lors du protocole de formation du nouveau gouvernement
de coalition, on promettait que : "La durée de détention policière
serait écourtée. On mettrait fin à la torture et aux plaintes de
torture." Le 27 avril 1992, le journal Cumhuriyet rapportait que le
cabinet turc avait soumis à la Grande Assemblée Nationale Turque (TBMM)
une législation qui réduirait le temps de détention policière maximale
(dans le cas de délits collectifs) à huit jours. La diminution du temps
de détention envisagée dans le projet de loi tel qu'il était rapporté
par la presse turque, bien que constituant une petite amélioration
bienvenue, serait certainement insuffisante pour mettre en échec le
système de torture. Les normes des droits de l'homme reconnues
internationallement préconisent une période de détention policière
maximale beaucoup plus courte.
• Détention en isolement
Amnesty International a exprimé à plusieurs reprises
sa crainte de voir aussi bien les suspects de délits politiques que les
suspects de délits criminels être placés au secret, augmentant le
risque de torture. En fait, le contact entre les avocats, la famille et
les détenus sont pratiquement inexistants. Des 455 cas de suspects en
détention policière contrôlés par Amnesty International entre septembre
1990 et septembre 1991, l'accès aux avocats et aux famille ne fut
autorisé que dans dix cas, et l'accès du médecin une seule fois. Les
plaintes de torture concernent 210 de ces cas. Parmi les vingt et une
personnes qui ont déclaré ne pas avoir été torturées se trouvaient
toutes celles, sauf une, autorisées à recevoir l'assistance judiciaire,
la famille ou le médecin. Des 49 personnes susmentionnées et qui ont
déclaré, de manière détaillée, avoir été torturées pendant leur
détention policière à Istanbul, Gaziantep, Siirt et Ankara depuis
novembre, lorsqu'était formé le nouveau gouvernement, 46 étaient tenues
au secret complet. Seulement deux de ces détenus, un à la Section
Anti-Terreur du Département de Police d'Izmir et un autre à la Section
Anti-Terreur du Département de Police d'Istanbul, ont été autorisés à
voir leur avocat. Un autre détenu fut autorisé à voir sa famille le
dernier des 12 jours qu'il passa en détention à la Section
d'Investigation Criminelle du Département de Police d'Izmir.
• Certificats médicaux trompeurs
Les suspects sont détenus pendant de longues
périodes de telle sorte que les preuves physiques de la torture
disparaissent avant qu'ils ne puissent se trouver en présence d'un
médecin ou d'une cour. Toutefois, les détenus prétendent souvent qu'ils
ne sont pas correctement examinés à la fin de leur période de
détention, et que la police ou les soldats sont souvent présents lors
de l'examen afin de décourager toute tentative de plainte ou dissuader
le médecin de préparer un rapport complet et précis.
• Echec dans l'investigation des plaintes de torture
Alors qu'aucune des garanties contre la torture
promises par les gouvernements successifs n'a été adoptée à ce jour,
l'Article 15 de la Loi Anti-Terreur a paralysé un grand nombre de
plaintes formelles de torture au cours de l'année 1991. Cette mesure
supposait que les plaintes de mauvais traitements ou de torture, contre
la police ou la gendarmerie, pendant les périodes de détention pour un
délit compris dans la vaste définition du "terrorisme" que fait la Loi
Anti-Terreur étaient soumises à une investigation par le bureau local
du gouverneur (qui constitue le chaînon direct de commandement entre le
Ministère de l'Intérieur et les forces de police locales). Bien que
cette mesure ait été supprimée par le Tribunal Constitutionnel, elle
reste d'application dans les dix provinces turques soumises à l'état
d'urgence.
• Décès et disparitions pendant la détention
policière
Etant donné que les interrogatoires sont effectués
dans le plus grand secret par la police et la gendarmerie et que ces
derniers sont rarement poursuivis lorsqu'ils font l'objet de plaintes
de mauvais traitements ou de torture, il n'est peut-être pas surprenant
que les décès pendant la détention policière se soient poursuivis
pendant l'année 1991 et le début de 1992. Au cours de l'année 1991, 15
personnes sont mortes pendant leur détention dans des circonstances qui
laissent croire que leur mort a pu être causée par la torture.
• Exécutions sans procès et "disparitions" dans le
Sud-est de la Turquie
Amnesty International est profondément affecté par
les plus de 50 exécutions qui ont eu lieu dans le Sud-est de la Turquie
et à propos desquelles ont dénonce une participation des forces de
sécurité (ainsi qu'un certain nombre de "disparitions" depuis l'été
1991). Les principales cibles de cette avalanche d'assassinats, qui
n'ont pas encore cessé, ont été :
a. Les habitants des villages qui ont refusé de
participer au système de gardiens de village désignés par le
gouvernement.
b. Les hommes politiques locaux - en particulier les
membres du Parti Travailliste du Peuple (HEP).
En février 1992 deux journalistes qui travaillaient
pour des publications qui cherchaient des cas d'exécutions
extrajudiciaires furent tués par des assassins inconnus.
Certains journalistes et de nombreux Kurdes
attribuent cette succession d'exécutions extrajudiciaires à la
soi-disante Contre-Guérilla, crée en 1953 pour faire partie des
services secrets et connue alors sous le nom de Département de Guerre
Spécial. Bien qu'il soit impossible de confirmer ou infirmer les
rumeurs qui attribuent ces assassinats à une campagne secrète de la
Contre-Guérilla, A.I. a recueilli de l'information concernant plus de
30 cas d'exécutions extrajudiciaires supposées et deux "disparitions"
supposées dans le Sud-est de la Turquie.
Les assassinats pourraient également être perpétrés
par des membres subalternes d'une unité quelconque des forces de
sécurité comme les Equipes Spéciales ou des gardiens de village.
Depuis juin 1991 vingt personnes au moins ont été
tuées dans des circonstances qui nous amenent à croire que les forces
de sécurité pourraient y être impliquées. Les principales cibles ont
été les membres des villages qui ont obstinément refusé de servir dans
les corps de gardiens de village. De plus, de nombreuses victimes ont
un membre de leur famille qui s'est enrôlé dans la guérilla du PKK. Le
déroulement des incidents indiquerait clairement qu'un groupe
présentant certaines des caractéristiques d'un escadron de la mort a
opéré dans la zone de Nusaybin/Midyat, province de Mardin.
La presse turque a publié des rapports sur plus de
cinquante assassinats délibérés et arbitraires perpétrés par les
guérilleros du PKK. La plupart des victimes étaient des civils, tués
pour avoir soi-disant aidé les forces de sécurité ou leur avoir fourni
des informations, ou parce qu'on les croyait en contact avec
l'organisation Hezbollah.
Amnesty International condamna énergiquement
l'assassinat de prisonniers et l'assassinat délibéré et arbitraire de
civils par des groupes d'opposition, tout comme elle condamne sans
condition la peine de mort et les exécutions extrajudiciaires par les
gouvernements.
MANDELA REJETA LE PRIX DE LA PAIX ATATÜRK
Le leader du Congrès National Sud-africain (ANC),
Nelson Mandela, refusa le Prix de la Paix Atatürk qui devait lui être
remis le 19 mai à Ankara.
Dans un communiqué publié le 12 mai, l'ANC souligna
que "Nelson Mandela avait consacré toute sa vie au service de la
démocratie, des droits de l'homme et de la liberté face à l'oppression."
Le lendemain, le porte-parole de l'ANC, Gil Marcus,
expliqua au cours d'une interview téléphonique avec Reuters les raisons
du refus en les termes suivants :
"Si quelqu'un a une question, il devrait essayer de
se mettre dans la peau d'un Kurde pendant un moment. Un leader du
mouvement anti-apartheid turc, M. Dikerdem, se trouvait en prison pour
avoir critiqué les gouvernements turcs depuis le début des années 80.
Mais il n'y a pas que les arrestations. C'est tout ce que les
arrestations traduisent qui rendent le prix inacceptable... la somme de
tout ce qu'ils sont en train de faire."
Un groupe de 15 députés kurdes dans le Parlement
Turc ont remis une "lettre ouverte de gratitude à Mandela, précisant
que le gouvernement turc remettait ces prix pour masquer des politiques
basées sur l'usage de la force.
Le prix, qui comprend une récompense d'environ 9.500
$, fut précédemment remis au Secrétaire Général de l'OTAN Luns et au
Général Kenan Evren, chef de la junte militaire qui envoya des
centaines de milliers de personnes en prison pour leurs opinions
politiques.
Après le refus, les officiels du gouvernement et la
presse pro-gouvernementale lancèrent une insultante campagne contre le
leader de l'ANC et déclarèrent qu'il s'agissait en fait d'une grande
erreur que de concéder le Prix de la Paix Atatürk à un "terroriste"
comme Mandela.
Avec l'appui de Demirel et de Türkes
LES LOUPS GRIS SONT ARRIVES AU POUVOIR EN AZERBAIJAN
Alors que se développe l'ouverture de la Turquie
envers les nouvelles républiques turco-islamiques de l'ancienne Union
Soviétique, les Loups Gris, d'idéologie néo-fasciste, ont accru leur
influence dans la vie politique de ces pays.
Le gouvernement de Demirel-Inönü, ignorant les
avertissements des cercles démocratiques, continue d'accepter
l'ingérence de l'ancien Colonel Türkes dans les affaires internes de
ces républiques.
Au cours de sa première visite officielle dans ces
républiques à la fin du mois de mai, Demirel prit Türkes à ses côtés en
tant que "invité d'honneur" et lui permit de s'adresser aux foules et
de propager ses idées Panturkistes et Pantouranistes; idées qui
affirment la supériorité de la race turque et l'union de tous les Turcs
du monde au sein de l'Empire du Touran.
Lorsque la délégation turque se trouvait à Baku,
Alparslan Türkes participa à un rassemblement électoral du leader
nationaliste, Abulfez Elcibey, et s'exprimant depuis la tribune, il
déclara que la Turquie soutenait Elcibey et demanda à la foule de
l'élire président de la République pour que triomphe le nationalisme
turc.
Au grand étonnement des observateurs, Elcibey
exprima également son admiration pour Türkes et son attachement à
l'idée du Pantouranisme. Plus frappant encore, les militants d'Elcibey
présents au meeting portaient tous le même t-shirt avec le symbole des
Loups Gris dans le dos.
Aussi bien Türkes qu'Elcibey saluèrent la foule avec
le signe particulier des Loups Gris.
Abulfez Elcibey fut élu président de la République
d'Azerbaijan aux élections du 8 juin.