La
corruption scandaleuse de Ciller et l'immédiate soumission de Yilmaz
aux militaires ouvrent toutes les voies du pouvoir aux islamistes du RP
LA VOIE PRINCIPALE
COURT-CIRCUITÉE
La coalition de la Voie Principale, fondée par le
Parti de la Juste Voie (DYP) de Ciller et le Parti de la Mère-Patrie
(ANAP) pour sauver le pays d'un possible pouvoir intégriste, a
court-circuité à cause de la corruption scandaleuse de Ciller et la
soumission immédiate de Yilmaz aux militaires. Ainsi toutes les portes
du pouvoir ont été ouvertes plus tôt que prévu au Parti de la
Prospérité (RP).
Bien que les deux partis conservateurs rivaux se
soient mis d'accord à la fin du mois de février pour enterrer leur
amère inimitié pour former une coalition minoritaire avec le soutien
passif du Parti Démocratique de Gauche (DSP) d'Ecevit, les anciennes
inimitiés ont refait surface peu de temps après des querelles
concernant les portefeuilles ministériels et les désignations de
bureaucrates à des postes-clés.
Comme les fissures se faisaient de plus en plus
profondes dans le partenariat, le RP a enfoncé le coin avec une série
de motions d'enquête à propos des accusations de corruption contre
Ciller qui a mené une précédente coalition avec les sociaux-démocrates.
La campagne du RP a atteint son objectif de forcer
l'ANAP de Yilmaz et le DSP d'Ecevit, tous deux engagés à combattre la
corruption, à s'abstenir de protéger Ciller par souci de cohérence.
Les motions d'enquête parlementaire contre Ciller
sur les irrégularités commises dans la procédure de privatisation de
deux entreprises d'État, TEDAS et TOFAS, ont déjà recueilli la majorité
des suffrages à l'Assemblée Nationale.
En plus d'humilier Ciller, l'enquête — qui sera
suivie d'autres, particulièrement sur sa fortune douteuse — a mis en
danger le poste de Premier Ministre qu'elle devait reprendre de Yilmaz
à la fin de l'année dans le cadre de l'accord de partenariat de cinq
ans.
Furieuse, Ciller tient pour responsable le Premier
Ministre Yilmaz du fait qu'une partie des députés de l'ANAP ont voté en
faveur des motions. Elle voit l'enquête parlementaire comme
conspiration politique à son encontre. Toujours est-il que c'est Ciller
elle-même qui fournit tous les prétextes à ses adversaires,
particulièrement au RP, pour ébranler l'actuelle coalition.
En effet, très récemment, la bataille d'accusations
de corruption à pris une nouvelle tournure lorsque Ciller a été accusée
de détournement au sujet des fonds alloués aux Premiers ministres. Le
quotidien Hürriyet a publié un document officiel montrant que Ciller
avait retiré le 13 février une somme de 500 milliards LT (6,5 millions
$) du fonds secret, un jour après que le ANAP ait décidé d'entamer des
négociations avec le RP pour la formation d'un gouvernement de
coalition.
Auparavant, le 19 avril, la presse révélait une
autre irrégularité de la famille Ciller. Il a été rapporté que
l'ancienne Première Ministre et son mari, Özer Ciller, avaient fait
enregistrer à leur nom un ranch de 90 ares que leur confidente Suna
Pelister avait acheté près de la station balnéaire de Kusadasi, en
1994. À cette époque, Ciller était ministre et son mari Özer Ciller
avait catégoriquement réfuté les déclarations de la presse qui disaient
que Pelister était une rentière pensionnée sans fortune personnelle et
qu'elle ne devait être qu'un prête-nom pour Ciller. Ainsi, en faisant
enregistrer le ranch à leur nom, la famille Ciller a elle-même donné la
preuve qu'ils avaient délibérément trompé l'opinion publique.
Malgré ces faits indéniables, cette plus corrompue
Premier Ministre du monde continue à user de démagogies simplistes
affirmant que toutes ces accusations contre elle font partie d'une
campagne de calomnies lancée parle RP, le PKK et le Dev-Sol avec pour
objectif de détruire l'État turc.
Alors que ceux qui ont le plus systématiquement
tenté de détruire l'État turc, en encourageant la montée de
l'intégrisme islamique et en menant le pays à la désunion, ne sont
autres que les politiciens corrompus et assoiffés de sang comme Ciller.
Ce sont ces politiciens qui tyrannisent toujours la
population kurde et les autres communautés ethniques, cèdent le pouvoir
aux généraux de l'Armée, font toutes les concessions possibles aux
groupes intégristes, rendent le pauvre plus pauvre et le riche plus
riche en suivant une politique économique dans l'intérêt d'une poignée
de privilégiés comme eux-mêmes.
Cette politique de trahison qui a été entamée par
Turgut Özal et Süleyman Demirel, Premier Ministres et Présidents de la
République, et qui a été poursuivie d'une manière plus dégoûtante par
Tansu Ciller et ses complices sociaux-démocrates tels que Erdal Inönü,
Yasar Karayalcin, Hikmet Cetin et Deniz Baykal.
Le Premier Ministre actuel, Mesut Yilmaz, a montré
en un seul mois de pouvoir que, malgré ses quelques manifestations de
bonne volonté du début, il a opté pour la même politique
anti-démocratique, anti-populaire et militaire.
En fait, quelles que soient ses intentions et ses
promesses, un homme politique qui avait choisi Ciller comme partenaire
et qui lui avait promis de lui laisser la place dix mois plus tard
était condamné dès le départ à suivre la même voie de la trahison.
Voici quelques caractéristiques de son gouvernement
de la Voie Principale:
- Juste après son investiture, la première chose
qu'il a fait, c'était de suivre un briefing de l'État-major et de
recevoir les instructions des militaires pour la poursuite des
opérations répressives.
- La loi d'état d'urgence a été à nouveau prolongée
pour quatre mois.
- Dans la deuxième semaine de son mandat, il a donné
le feu vert pour l'offensive militaire appelée "Opération Faucon"
au Kurdistan turc et à une série d'opérations trans-frontalières au
Kurdistan irakien, alors qu'il ne fait aucun doute que le PKK a cessé
ses actions armées depuis le mois de décembre 1995 pour ouvrir la voie
à une solution politique et pacifique et que des institutions
internationales comme le parlement Européen ont appelé le gouvernement
turc à suivre le cessez-le-feu.
- L'une des plus spectaculaires manœuvres
d'assimilation de la République a été mise en pratique dans la
troisième semaine du mandat de Yilmaz. Alors que l'opinion
internationale s'attendait à un respect intégral de l'identité
nationale et des valeurs du peuple kurde, le gouvernement turc a
proclamé que le Newroz, célébré le 21 mars par les Kurdes comme étant
leur Nouvel An, n'était plus une fête kurde mais la fête du printemps
des Turcs. Tandis que le peuple kurde se voyait encore interdire la
célébration de leur Newroz traditionnel, le gouvernement turc a
organisé des cérémonies officielles sous le nom de "Nevruz", et Yilmaz
s'est personnellement encouru pour participer à une telle cérémonie qui
s'est déroulée avec la participation des militaires et des Loups Gris
néo-fascistes du MHP.
Incroyable mais vrai, les couleurs nationales du
peuple kurde — jaune, rouge et vert — ont été proclamées par le
gouvernement de Yilmaz comme étant celles du peuple turc. Comme l'on
s'en souvient, de nombreux Kurdes, et même la députée kurde Leyla Zana,
ont été poursuivis pour avoir porté ces couleurs pour montrer leur
identité ethnique. Depuis qu'il s'est avéré impossible d'empêcher ce
geste totalement innocent, il a été annoncé dans un pamphlet publié sur
l'ordre du Premier Ministre que ces trois couleurs n'avaient jamais
appartenu aux Kurdes; ils étaient utilisés par les Turcs durant la
période seldjoukide et l'Empire ottoman.
- En ce qui concerne le terrorisme d'État, tous les
articles et lois anti-démocratiques, y compris l'article 8, sont
toujours conservés dans la législation turque et le nouveau
gouvernement n'a fait aucun pas dans le sens de leur abrogation. Au
contraire, comme nous le verrons dans les pages qui suivent, les
intellectuels et les activistes des droits de l'homme sont
continuellement accusés et condamnés sur base de ces lois et articles.
Des journaux et des revues sont encore saisis et interdits à la
publication.
Quant aux relations internationales, tandis que la
Turquie se retrouve de plus en plus isolée à cause de son irrespect des
standards démocratiques et de sa politique expansionniste menaçante à
l'égard des pays voisins, le gouvernement de Yilmaz tente de
contrebalancer cela en s'assurant le soutien des États-Unis et d'Israël
au nom de la coopération dans le cadre de la lutte contre le
terrorisme. Récemment, un accord militaire signé avec Israël,
permettant aux avions de ce dernier de s'entraîner dans l'espace aérien
turc et permettant à ses navires d'accéder aux ports turcs, a été mis
en application par le gouvernement de Yilmaz.
En échange, Israël a promis à la Turquie de l'aider
dans sa sale guerre contre les Kurdes et dans son conflit avec la Syrie
et l'Iran qu'Ankara accuse d'abriter la guérilla kurde.
Déjà furieux contre la Turquie à cause de la
restriction de l'usage des eaux de l'Euphrate, les pays arabes accusent
tous ensemble le gouvernement turc de trahir le monde musulman en
collaborant avec Israël.
Comme souligné par Cengiz Candar, dans le quotidien
Sabah du 23 avril, "La Turquie, un grand pays qui a marqué de son
empreinte l'histoire et la culture de cette vaste région, qu'elle a
gouverné durant des siècles, un pays avec une population
majoritairement musulmane, a maintenant été réduit au niveau de 'roue
de secours' pour Israël".
L'intégrisme islamique est déjà devenu la première
force politique du pays grâce aux politiques aveugles des militaires et
de leurs alliés dans le gouvernement. Les irrégularités honteuses de
Ciller et l'incroyable silence des sociaux-démocrates en la matière a
donné au RP une chance en or de se présenter comme la seule force
politique à se battre contre la corruption. Il peut ainsi gagner plus
aisément gagner le soutien des masses qui souffrent dans la misère.
En outre, la récente coopération militaire et de
renseignements avec Israël au détriment des intérêts du monde musulman
va certainement accélérer la marche vers le pouvoir des intégristes
dans ce pays à prédominance musulmane. Une telle Turquie ne sera jamais
la Turquie que l'Europe souhaite voir en son sein.
C'est le prix que l'Union Européenne doit payer en
échange de sa politique à court terme qui consiste à soutenir des
politiciens corrompus et répressifs, à l'image de Ciller, et à conclure
dans la précipitation une Union douanière avec eux au nom de la
préservation de la Turquie laïque contre le fondamentalisme islamique.
L'EXPANSIONNISME DU FASCISME DE TURKES SOUTENU PAR L'ÉTAT
Bien que le MHP néo-fasciste n'ait pas réussi à
recueillir suffisamment de voix pour entrer à l'Assemblée Nationale, le
gouvernement turc continue à reconnaître en la personne du chef du MHP,
Türkes, la principale autorité dans les relations avec les républiques
Turciques du Caucase et d'Asie centrale.
Dans une vision de rassembler tous les peuples
turcophones "de l'Adriatique à la Mer de Chine" et de les garder sous
la domination de l'expansionnisme de la Turquie, les représentants de
ces républiques étaient invités à la soi-disant "Assemblée des États et
des Communautés Turciques", le 24 mars à Ankara.
À l'ouverture, le Président Demirel a dit, "De
l'Adriatique à la Mer de Chine, à travers 11 millions de
kilomètre-carrés, il y a 200 millions de Turcs. Le monde turc a émergé
comme un arbre qui ne peut plus être mis à part ou négligé."
Türkes, qui est aussi président de la Fondation de
l'Amitié, de la Fraternité et de la Coopération de l'Assemblée des
États et des Communauté Turciques (TUDEV), a demandé l'adoption du turc
comme langue officielle dans tous les États turciques.
Il a également offert à Demirel un bâton de marche
muni à sa crosse d'une tête de loup gris, symbole du mouvement fasciste
turc, qui a été accepté avec enthousiasme par le Président de la
République.
L'ancienne Première Ministre Ciler aussi était
présente lors de cette réunion et, conformément au rituel
fasciste, elle a battu le fer en compagnie de Türkes.
L'ARMÉE ATTAQUE LES KURDES MALGRÉ LES APPELS AU CESSEZ-LE-FEU
Malgré l'appel du Parlement Européen à prendre en
considération le cessez-le-feu unilatéral du PKK, le nouveau
gouvernement continue à maintenir les opérations militaires au
Kurdistan.
Après la formation du nouveau gouvernement,
l'État-major turc a donné, le 19 mars, un briefing au Premier Ministre
Mesut Yilmaz et aux ministres qui détiennent des portefeuilles clés à
propos des questions de sécurité et des "menaces qui pèsent sur le
pays". Avant la réunion, Yilmaz a eu une réunion privée avec le chef
d'État-major Ismail Hakki Karadayi.
Les forces turques ont lancé le 5 avril une
offensive dont le nom de code était "Opération Hawk" dans les cantons
de Hani et de Lice de la province de Diyarbakir. Les responsables de
l'État d'urgence ont annoncé le 11 avril que les forces de sécurité ont
abattu 110 militants du PKK et capturé cinq. Les mêmes autorités ont
également admis que 33 membres des forces de sécurité avaient été tués
au cours de l'opération.
Le ministre de l'Intérieur Ülkü Güney a dit que
l'opération contre le PKK continuerait jusqu'à ce qu'il ne reste plus
aucun "terroriste".
Malgré cette opération sanglante, le PKK a annoncé
qu'il ne romprait pas le cessez-le-feu. "Les forces de guérilla
continueront à être dans une position de défense active" a déclaré un
porte-parole à l'agence pro-kurde DEM en Allemagne.
Le Turkish Daily News a rapporté le 11 avril que des
tuyaux fournis par des services de renseignements étrangers "amis"
avaient joué un rôle clé dans les lourdes pertes subies dans les rangs
des militants du PKK.
"Parallèlement à la coopération entre les services
de renseignements turcs et occidentaux dans le cadre de l'OTAN, Ankara
a récemment approfondi sa 'coopération technique' avec Israël. Dans la
dernière opération, la Turquie pouvait avoir accès à 'toutes' les
facilités de renseignements offertes", ont dit les sources du TDN.
LA LOI D'ÉTAT D'URGENCE À NOUVEAU RECONDUITE
Une des premières choses faites par le gouvernement,
conformément aux directives des militaires, a été la prolongation de
l'état d'urgence dans 10 provinces du Sud-est accordant des pouvoirs
étendus aux autorités locales en matière de restriction des
libertés.
Le 14 mars, le projet de loi prolongeant l'état
d'urgence pour une durée de quatre mois à partir du 19 mars était
adopté par l'Assemblée Nationale par 227 voix contre 179 et 51
abstentions.
LES INSTRUCTIONS DE L'ÉTAT-MAJOR POUR CACHER LES CRIMES COMMIS PAR
L'ARMÉE
Dans une action pour contrer les accusations
concernant les mauvais traitements infligés à la population,
l'État-major turc a récemment mis en garde les unités engagées dans le
combat contre le PKK contre l'exposition au peuple des corps mutilés
des militants tués.
D'après la presse du 6 mars, les ordres et
directives émis à propos de la conduite des relations avec la
population civile depuis que les unités de l'armée ont pris en main les
fonctions de sécurité interne avaient été compilés dans un recueil
intitulé Les Lignes Directrices pour les Relations Publiques et les
Voies pour Convaincre la Population.
Le livre contient les instructions suivantes pour
les troupes prenant part aux recherches ou aux opérations contre les
militants séparatistes:
"Lors de la conduite de perquisitions, ne causez pas
de tort à la propriété des habitants locaux. Si un quelconque dommage
était occasionné par inadvertance, payez le dommage.
"Ne menez pas les perquisitions avec dureté et des
méthodes irrégulières. Agissez avec réserve à l'égard des femmes et des
vieillards. Ne fouillez pas les femmes vous-mêmes. Employez des femmes
policiers, des sages-femmes, des infirmières, des enseignantes ou des
femmes de confiance parmi la population locale.
"Ne chargez pas les gardes de village de conduire
eux-mêmes des fouilles de maisons. Effectuez les perquisitions en
coordination avec les autorités locales.
"À l'issue des perquisitions, assurez-vous d'obtenir
des déclarations signées par les villageois certifiant que leurs
propriétés n'ont pas subi de dommages, et conservez ces écrits. Ces
documents doivent comporter les signatures des chefs ou des anciens des
villages.
"Au cas où un dommage aurait été causé et que son
exploitation soit probable, essayez d'en réaliser des photos ou un
enregistrement vidéo. Lors de la conduite de perquisitions, soyez
vigilants contre les mines-pièges et les interventions actives des
terroristes. Ne négligez jamais les mesures de sécurité de manière à ne
causer aucun dommage. N'oubliez pas que vous pouvez tomber nez à nez
avec un terroriste à tout moment.
"Dressez soigneusement la liste de tout ce qui est
pris sur les terroristes abattus; ne permettez aucun vol. Évitez de
contraindre le peuple en exhibant sur les places de villages les corps
mutilés de terroristes morts avec l'intention de délivrer message
'voyez ce qui arrive'. De telles attitudes peuvent effectivement
effrayer les gens, mais ils ne fourniront pas une image agréable de
l'État; au contraire, ils nuisent à sa réputation.
"Assistez les pauvres, les malades et les
nécessiteux dans vos zones de responsabilité en organisant les
provisions d'eau et de nourriture, la réparation de leurs maisons et la
moisson de leurs récoltes.
"Si vous voyez des gens marcher sur la route,
prenez-les dans votre véhicule si vous avez de la place.
"Lorsque vous devez vous adresser aux gens, ne les
rassemblez pas dans les maisons du chef de village, du cheikh ou des
riches, choisissez plutôt des lieux publics comme la place du village,
le café du village, la cour de la mosquée ou de l'école.
Expliquez
poliment aux notables que cela n'est nullement destiné à les offenser.
"Les villageois vous feront des présents pour
s'assurer que vous agirez avec tolérance à leur égard. Acceptez les
présents de ces gens mais avec modération. Offrez-leur en retour des
cigarettes, du thé, du sucre ou des rations en boîte.
"Mettez à profit chaque opportunité de les persuader
du fait que vous partagez leurs joies et leurs peines. Aidez-les à
enterrer leurs morts, participez aux funérailles, rendez des visites de
condoléances. Pour ces gens, d'après les traditions locales, celui qui
visite la maison d'un mort ne peut être un ennemi.
"Participez aux prières de masse à l'occasion de
cérémonies religieuses. Donnez des tapes amicales aux enfants.
Participez aux cérémonies de mariage et joignez-vous aux danses
populaires.
"Faites réciter des prières à la mémoire de vos
soldats morts et invitez les gens de la région à la cérémonie. Pendant
le Ramadan, répondez à l'invitation des villageois de rompre le jeûne
ensemble. Organisez vous-mêmes les repas de rupture du jeûne et
assurez-vous que, à côté des riches, les pauvres du village sont aussi
invités.
"Si vous devez vous approvisionner localement, ne
marchandez jamais. Au contraire, payez plus que le prix normal. Faites
vos achats de différents magasins au lieu de n'acheter qu'à un seul
d'entre eux. Ainsi, vous ne montrerez pas uniquement que vous ne faites
pas de discrimination entre les gens, mais en même temps vous gagnerez
la reconnaissance des détaillants qui font moins de bonnes affaires.
"N'oubliez jamais que vous représentez l'État dans
les endroits où vous officiez. La confiance et le respect que vous
évoquez chez les gens augmentera leur confiance, leur respect et leur
loyauté envers l'État".
QUATRE ANCIENS DÉPUTÉS À NOUVEAU CONDAMNÉS
Le 11 avril, la Cour de la Sûreté d'État d'Ankara a
condamné quatre anciens députés du défunt Parti de la Démocratie (DEP)
à une peine de deux ans et deux mois et à presque 120 millions LT
d'amende pour violation de l'article 8 de la loi anti-terroriste et de
l'article 80 du Code pénal turc.
Ahmet Türk, Sirri Sakik, Sedat Yurttas et Mahmut
Alniak avaient auparavant été condamnés à des peines de prison allant
jusqu'à sept ans et demi par la même cour en même temps que quatre
autres députés du DEP, Leyla Zana, Orhan Dogan, Hatip Dicle et Selim
Sadak, qui étaient condamnés à 15 ans de prison.
Tandis que les verdicts à l'égard de ces derniers
étaient ratifiés par la Cour de Cassation, la CSE a été enjointe par la
Cour Suprême de rejuger quatre autres accusés.
Pendant le nouveau procès, Türk, Sakik, Yurttas et
Alniak ont accusé l'État de mener une politique de pression et de
renier le "Peuple kurde" et ont rejeté l'accusation selon laquelle ils
visaient à diviser le pays.
LE DDP PRO-KURDE BANNI, MAIS REMPLACÉ PAR LE DBP
La Cour Constitutionnelle a décidé le 25 mars
d'interdire le Parti de la Démocratie et du Changement (DDP) pro-kurde
pour les motifs que son programme contient certaines paragraphes qui
violent la Constitution.
Précédemment à ce verdict, le 11 mars, le président
Refik Karakoc et d'autres leaders ont démissionné de ce parti pour
échapper à 5 ans d'interdiction de leurs droits politiques et ont fondé
un nouveau parti dénommé le Parti de la Démocratie et de la Paix (DBP).
Karakoc, en qualité de président du nouveau parti, a
dit que le DBP aussi ferait des efforts pour que soient franchis le
plus rapidement possible les pas en vue de la résolution de la question
kurde.
Ibrahim Aksoy, le premier président du DDP interdit,
qui avait été remplacé par Karakoc, se trouve toujours en prison à
Ankara.
UN NOUVEAU PARTI SOCIALISTE: LE PARTI DU TRAVAIL (EP)
Consécutivement à la création du Parti de la Liberté
et de la Solidarité (ÖDP), un groupe d'ouvriers et d'activistes de
gauche ont mis sur pied un nouveau parti socialiste le 25 mars sous le
nom de Parti du Travail (EP). Le président du EP, Abdullah Levent
Tüzel, a dit: "Notre parti est composé principalement de travailleurs
et d'intellectuels engagés dans la cause de la classe ouvrière. Nous
considérons la question kurde comme étant non seulement la cause des
ouvriers kurdes mais aussi celui des ouvriers turcs".
Tüzel a ajouté que le EP était prêt à prendre part à
une alliance avec les autres partis de gauche dans les intérêts de la
classe ouvrière, de la démocratie et des libertés.
Les autres partis socialistes sont le Parti de la
Liberté et de la Solidarité (ÖDP), le Parti Ouvrier (IP) et le Parti du
Pouvoir Socialiste (SIP).
SEIZE LYCÉENS TORTURÉS PAR LA POLICE A MANISA
Seize lycéens qui avaient été mis en état
d'arrestation en décembre 1995, à Manisa, ont été traduits devant la
CSE d'Izmir, le 12 mars 1996, pour avoir participé aux actions du
Parti/Front Révolutionnaire de Libération du Peuple (DHKP/C). À
l'ouverture du procès, les accusés, parmi lesquels quatre ont moins de
18 ans, ont dit qu'ils avaient été torturés par la police.
La cour a décidé de les juger en huis clos, sans la
présence des journalistes, sous prétexte que certains des détenus sont
mineurs d'âge.
Le procureur de la République a requis jusqu'à 15
ans de prison pour activités illégales.
Sur les plaintes des lycéens concernant la torture,
Amnesty International a demandé aux autorités turques, le 16 avril, de
procéder à une nouvelle enquête approfondie et impartiale pour vérifier
ces accusations.
Le communiqué de presse d'AI disait: "Nous sommes
alarmés de recevoir un nombre croissant de rapports selon lesquels des
enfants auraient été torturés sous garde à vue policière."
"Pendant leur détention, entre le 26 décembre 1994
et le 5 janvier 1996, dans le quartier général de Manisa, la police
aurait bandé les yeux des accusés, les aurait dénudés, les aurait
aspergés d'eau froide et leur aurait fait subir des électrochocs y
compris au niveau de leurs organes génitaux. Les policiers ont violé
les détenus masculins à l'aide de matraques et ont serré leurs
testicules. Les détenus féminins ont fait l'objet de tests
gynécologiques forcés et ont été menacées de viol, de soumission au
test de virginité et de défenestration."
Il déclarait également que les plaintes de torture
étaient étayées par des rapports médicaux provenant des hôpitaux dans
lesquels ils avaient été soignés durant leur détention.
"Une jeune fille de 17 ans a dû être transférée à
l'hôpital pour saignement vaginal consécutif à l'application de chocs
électriques sur ses parties génitales. Un jeune de 16 ans (qui est
toujours en état d'arrestation) a récemment été transféré à l'Hôpital
d'État d'Izmir. Les jeunes relâchés reçoivent un traitement médical de
l'Association Turque des Droits de l'Homme", disait la déclaration d'AI.
Le communiqué de presse faisait également référence
à Sabri Ergül, un député du CHP, décrivant sa visite surprise au
quartier général de la police de Manisa où les enfants auraient été
torturés: "J'ai entendu un cri et j'ai ouvert la porte de la pièce
suivante pour voir ce qui s'y passait. Les jeunes gens étaient là,
leurs yeux étaient bandés et certains d'entre eux étaient nus."
AI a dit qu'elle surveillait aussi les procès des
présumés auteurs des tortures exercés sur des enfants. "Le procès
contre des officiers de police qui auraient soumis à des chocs
électriques Abdullah Salman, 13 ans, dans les locaux de la police de
Sisli à Istanbul, entre le 7 et le 9 novembre 1994, est toujours en
cours. Le bras de Halil Ibrahim Okkali, âgé de 12 ans, a été cassé lors
de sa détention au commissariat de police de Cinarli le 27 novembre
1995 à Izmir, et un procès a récemment été ouvert", a déclaré AI.
CENTRES DE TRAITEMENT DE LA TORTURE SOUS PRESSION
Les autorités turques ont lancé une campagne de
pression avec pour objet la fermeture des centres de traitement de la
torture fondés par la Fondation des Droits de l'Homme de Turquie (TIHV).
Le 22 mars, le Procureur général a demandé à la TIHV
les noms et adresses des personnes qui ont déclaré avoir été torturés.
Dans une autre action, le bureau du Département de
la Santé à Adana a demandé au centre de réhabilitation de la ville les
noms des médecins qui y travaillent, ainsi que ceux des personnes qui
se plaignent de tortures. Par ailleurs, le centre situé à Adana a fait
l'objet d'une enquête de la part du Département de la Santé pour savoir
si oui ou non il soignait les patients - un acte que le Département dit
être illégal.
Le président de la TIHV, Yavuz Önen, a accusé le
Ministère turc des Affaires étrangères d'être derrière ces pressions;
Önen a dit que la TIHV était une fondation ayant
travaillé six ans sous le contrôle de la Direction Générale des
Fondations et qu'elle était respectueuse des lois.
Il a ajouté que l'enquête actuelle était une
tactique de terreur, destinée à essayer de réduire le nombre de
candidatures émanant de gens ayant été torturés, aussi bien qu'une
tentative pour effrayer les médecins qui dispensent bénévolement leurs
services.
La seule réponse apportée par la TIHV à la demande
du procureur portant sur les noms et adresses de ceux qui se sont
plaints d'avoir été torturés, a été la description de ses activités -
aider les victimes de la torture en leur indiquant où elles peuvent
obtenir des soins et éventuellement payer le traitement.
HABITAT II À ISTANBUL BOYCOTTÉ PAR LES ORGANISATIONS DES DROITS DE
L'HOMME
Habitat II, la dernière conférence majeure du siècle
organisée par l'ONU, qui se tiendra du 3 au 14 juin à Istanbul doit
faire face à deux crises qui menacent tout le succès du sommet.
Le premier dilemme est que de nombreux ONG
pourraient boycotter la conférence parce que les ONG turques n'ont pas
été autorisées à prendre part au forum.
Le second dilemme est un conflit entre la
Municipalité Métropolitaine d'Istanbul contrôlée par le RP et
l'Administration Turque du Logement (TOKI), le corps désigné par le
gouvernement pour être l'hôte officiel de la conférence.
Les organisations non-gouvernementales telles que
l'Association des Droits de l'Homme (IHD) et la Fondation des Droits de
l'Homme en Turquie (TIHV) de même que nombre d'organisations
écologistes ont déclaré qu'elles ne participeraient pas aux forums des
ONG en guise de protestation contres les règles qui gouvernent la
conférence.
Elles ont déclaré que la Turquie n'était pas le bon
pays pour servir de hôte à une telle conférence à cause de ses
nombreuses violations documentées des droits de l'homme.
Un certain nombre d'ONG, tenant une conférence de
presse le 22 avril, ont déclaré qu'elles organiseraient une série
d'activités dans le cadre de la Plate-forme Alternative à Habitat.
Mettant l'accent sur les effets de la guerre civile
dans le Kurdistan turc, elles ont dit: "Les villages et les forêts sont
brûlés dans le Sud-est, les gens sont évacués de force, 2,5 millions
sont forcés de quitter leur maison à cause de cette guerre. Une grande
partie de cette population vit dans des installations de fortune ou
dans des camps".
La plate-forme a également critiqué les desseins
d'Habitat dans les termes suivants:
"L'objectif fondamental des Nations-Unies dans ce
genre de sommets est de faciliter le développement des marchés des pays
du Nord et de déterminer comment elles peuvent abuser du meilleur des
ressources des pays du Sud. Les salons de la construction qui se
tiendront dans le cadre d'Habitat II sont le meilleur exemple de cette
situation. Comme la vie dans notre monde est une structure hiérarchique
déterminée par les puissances dominantes, les voix de ceux qui se
battent pour la classe ouvrière et les libertés sont supprimées. Les
groupes ethniques, les femmes, les enfants, les homosexuels et les
personnes handicapées physiques ou mentaux sont dénués de tous droits
démocratiques et sont forcés de vivre dans certaines villes, dans
certaines rues déterminées et même dans des zones fermées."
Les organisateurs de la Plate-forme Alternative à
Habitat ont également critiqué la manière d'organiser Habitat II:
"À Istanbul, les chiens et chats des rues sont tués
pour donner un masque artificiel à la ville. Istanbul se prépare à
Habitat en multipliant par cinq les prix des chambres d'hôtel. Ils font
des calculs pour déterminer combien Habitat rapportera à Istanbul en
termes d'échanges. Tout ceci figure dans les médias. Le seul point qui
est négligé, ce sont les organisations non-gouvernementales…"
ISMAIL BESIKCI À NOUVEAU CONDAMNÉ
Le sociologue Ismail Besikci a été condamné, le 13
mars 1996, à 16 mois de prison et à une amende de 133 millions LT pour
son livre Les Concepts Souillés: Science, Égalité, Justice, publié en
1994. Dans le même procès, le directeur de la Maison d'édition Yurt,
Ünsal Öztürk, a également été condamné à six mois d'emprisonnement et à
une amende de 100 millions LT.
LE TERRORISME D'ÉTAT EN MARS
1.3, à Ankara, onze étudiants universitaires sont
jugés par une cour pénale pour avoir tenu une manifestation de
protestation à l'Assemblée Nationale.
1.3, à Istanbul, 47 étudiants universitaires sont
détenus par la police après une manifestation effectuée en guise de
protestation contre la hausse des droits d'inscription à l'université.
1.3, à Pervari, 27 protecteurs de village auraient
été détenus pour avoir abrité des militants du PKK.
1.3, la CSE d'Ankara condamne dix personnes à
diverses peines de prison qui vont jusqu'à 22 ans et six mois pour
avoir pris part aux activités du Parti Communiste Marxiste-Léniniste
(MLKP).
2.3, à Izmir, un lycéen, Hikmet Öztan, est abattu
par des tireurs non identifiés.
4.3, à Diyarbakir, l'imam Yakup Veyisoglu est
assassiné par les militants d'un groupe intégriste.
4.3, à Kinik, Abidin Apaydin déclare avoir été
torturé dans le quartier général de la police de Manisa après avoir été
détenu le 9 février dans le village de Taspinar.
5.3, à Van, Taceddin Ertas est victime d'une attaque
armée.
5.3, le quotidien Demokrasi rapporte qu'un
sexagénaire, Selahaddin Akbulut, détenu l'année dernière par les
gendarmes est retrouvé assassiné.
7.3, à Catak, le président local du HADEP, Nezir
Ocek, et cinquante autres personnes sont mis en état d'arrestation.
7.3, à Tekirdag, deux médecins, Sahin Bal et Zehra
Aydin, sont poursuivis pour avoir délivré un certificat médical
attestant des traces de torture sur le corps d'une victime de la
torture, Mehmet Siddik Dogru. Ils sont accusés d'avoir jeté le
discrédit sur l'État turc en rédigeant un rapport médical sans
fondements.
7.3, les forces de sécurité arrêtent douze personnes
à Ankara pour activités illégales. Le même jour, à Istanbul, neuf
personnes sont mises en état d'arrestation par la police politique.
7.3, six personnes sont jugées par la CSE de
Diyarbakir pour avoir réalisé des actions armées. Trois d'entre eux
encourent la peine capitale et les trois autres risquent jusqu'à 15 ans
de prison.
7.3, le bureau d'Istanbul du Parti Ouvrier (IP) est
détruit par l'explosion d'une bombe. L'acte est revendiqué par le
groupe intégriste IBDA-C.
8.3, le procureur de la CSE de Diyarbakir poursuit
huit membres du Hizbullah. Quatre accusés risquent la peine de mort et
les autres jusqu'à 15 ans de prison.
9.3, à Ankara, une manifestation d'enseignants
organisée pour protester contre l'interdiction du Syndicat du Personnel
Éducatif, Scientifique et Culturel (Egitim Sen) est empêchée par la
police qui fait usage de la force. 20 manifestants sont blessés et 32
sont mis en état d'arrestation.
10.3, à Istanbul, une manifestation en faveur de la
paix est interdite par le gouverneur.
11.3, cinq membres du Parti Communiste
Révolutionnaire de Turquie (TDKP) sont condamnés par la CSE d'Istanbul
à différentes peines de prison qui vont jusqu'à 12 ans et six mois.
11.3, à Diyarbakir, la police arrête cinq personnes
lors d'une descente dans une maison.
12.3, un groupe de Loups Gris du MHP attaquent des
étudiants gauchistes à l'Université Hacettepe d'Ankara et blessent deux
d'entre eux.
12.3, à Diyarbakir, plus de 20 étudiants
universitaires sont mis en état d'arrestation pour une manifestation de
protestation contre l'augmentation des droits d'inscription à
l'université.
13.3, à Istanbul, dix-sept jeunes qui avaient été
arrêtés pour activités politiques en février, affirment avoir été
torturés durant leur détention policière de 12 jours. Cinq des victimes
ont moins de dix-huit ans.
13.3, à Istanbul, une manifestation organisée à
l'occasion du premier anniversaire du massacre de Gazi tourne en une
violente confrontation lorsque la police intervient, et sept personnes,
y compris dans les rangs de la police, sont sérieusement blessés. 35
personnes sont placés en garde à vue.
15.3, les forces de sécurité arrêtent 23 personnes à
Istanbul et dix personnes à Adana pour avoir pris part à des actions du
PKK.
17.3, Lors des manifestations d'étudiants contre
l'augmentation des droits d'inscription à l'université, les forces de
sécurité arrêtent 167 étudiants à Bursa et 77 à Eskisehir. Au cours des
incidents qui ont eu lieu à Bursa, sept étudiants sont grièvement
blessés.
18.3, à Bursa, 26 étudiants de l'Université Uludag
sont placés en état d'arrestation au cours de leur action de
protestation.
18.3, à Lice, Hasan Pelin, âgé de 16 ans, est
victime de l'explosion d'une mine placée par les forces de sécurité.
19.3, à Aydin, selon les déclarations faites à la
presse par leurs familles, onze lycéens auraient fait l'objet de
tortures au cours de leur détention.
19.3, le président de l'IHD d'Istanbul, Ercan Kanar,
et sept autres dirigeants du IHD sont traduits en justice par le
procureur de la cour militaire de l'État-major. En vertu de l'article
155 du CPT, ils risquent chacun jusqu'à deux mois de prison pour avoir
autorisé un groupe de femmes à tenir une conférence de presse contre le
service militaire obligatoire.
19.3, à Ankara, onze étudiants de l'Université
Hacettepe sont placés en état d'arrestation pour avoir participé à une
action de protestation contre l'augmentation des droits d'inscription à
l'université.
21.3, à Istanbul, trois personnes arrêtées lors des
célébrations du Newroz, Gonca Dönmezer, Cüneyt Tiskaya et Ali Eflek,
auraient été soumises à la torture au cours de leur détention.
21.3, à Van, trois dirigeants du HADEP, Cevdet
Armutcu, Mehmet Firat et Nezir Aksoy, affirment avoir été torturés
après leur arrestation par la police le 17 mars.
21.3, la CSE d'Istanbul condamne cinq personnes à
des peines de prison qui vont jusqu'à trois ans et neuf mois pour avoir
occupé les locaux du YDH situés à Istanbul dans le cadre d'une action
de protestation.
23.3, à Ankara, un rassemblement de masse organisé
par des étudiants pour protester contre l'augmentation des droits
d'inscription à l'université s'est clôturé par l'arrestation de 224
étudiants. Plus de 200 étudiants ont été grièvement blessés lors des
assauts violents de la police.
24.3, à Istanbul, une femme nommée Devrim Öktem
affirme qu'elle a été torturée et que son bébé a été maltraité dans le
quartier général de la police politique.
24.3, à Istanbul, dix personnes, parentes de détenus
politiques, sont poursuivies pour outrage aux autorités lors des
incidents survenus à la Prison d'Ümraniye et au cours desquels quatre
détenus avaient été tués.
24.3, à Istanbul, les forces de sécurité annoncent
l'inculpation de vingt personnes sous le chef de participation à des
actions du DHKP/C.
24.3, à Bingöl, un chef de village, Siddik Bulut,
l'imam Ahmet Faruk Kaya, ainsi que quatorze personnes ont été mis en
état d'arrestation pour avoir donné refuge et fourni de l'aide à des
guérilleros du PKK.
25.3, Kamil Dag, Turan Bulut, Aziz Yenigül et S.A.,
16 ans, qui avaient été arrêtés le 13 mars pendant les manifestations
organisées à l'occasion du premier anniversaire du massacre de Gazi,
auraient fait l'objet de tortures dans l'enceinte du commissariat de
police.
25.3, un lycéen de 17 ans, Deniz Özcan, prétend
avoir été torturé et menacé par la police parce qu'il avait été témoin
de l'assassinat du journaliste Metin Göktepe.
25.3, à Silopi, l'explosion d'une mine placée par
les forces de sécurité a coûté la vie au passager d'un autobus, Besir
Yen.
26.3, sur décision du gouverneur, la section d'Adana
de l'IHD a été fermée pour quinze jours.
26.3, une attaque menée par les Loups Gris du MHP à
l'École Professionnelle de Balikesir s'est terminé par la blessure de
cinq élèves et l'arrestation de quinze autres.
27.3, la CSE d'Istanbul condamne un membre de
l'Armée de Libération des Travailleurs et des Paysans de Turquie
(TIKKO), Yilmaz Zurnaci, à la peine de mort, sur base de l'article 146
du CPT.
27.3, une intervention policière à une réunion
d'étudiants à Malatya a mené à la blessure de trois étudiants et à
l'arrestation de neuf autres.
27.3, à Patnos, un paysan de 45 ans, Ali Karatas,
est retrouvé assassiné après avoir été placé en état d'arrestation par
la police.
27.3, à Diyarbakir, Ramazan Elen est abattu par des
tireurs non identifiés.
28.3, un fonctionnaire d'État, dont le nom est Metin
Yildiz, affirme avoir été torturé après sa mise en détention le 24
mars. Le même jour, à Istanbul, Yilmaz Basinc, âgé de 40 ans, a dit
qu'il avait été torturé pendant qu'il était en garde à vue policière.
29.3, le secrétaire de l'IHD de Hakkari, l'avocat
Hüseyin Ümit, est arrêté par la police lors d'une descente effectuée à
son bureau.
30.3, l'ancien président du Syndicat des
Travailleurs du Pétrole (Petrol Is), Münir Ceylan, se retrouve, sur
base de l'article 8, devant la CSE de Diyarbakir pour un discours qu'il
a prononcé en décembre 1995. Deux éditeurs de la revue Batman Postasi,
Nizamettin Izgi et Ercan Atay, qui ont publié le discours, sont
également jugés dans le cadre de la même affaire.
30.3, à Samandag, 46 membres du HADEP sont mis en
état d'arrestation pendant qu'ils assistent à une cérémonie de
commémoration pour un leader du HADEP, Mehmet Latifeci, qui avait été
assassiné un an auparavant.
30.3, à Diyarbakir, Hüseyin Senyigit est assassiné
par des tireurs non identifiés.
30.3, au cours des manifestations d'étudiants, la
police a arrêté 15 étudiants universitaires à Ankara.
31.3, à Mus, Resit Dürre affirme avoir été torturé
après son arrestation par les soldats, le 18 mars.
31.3, à Ankara, Mehmet Geckin qui avait été arrêté
alors qu'il lisait le périodique Alternative Socialiste affirme avoir
été torturé au cours de sa garde à vue.
31.3, un meeting organisé à Malatya par le Parti du
Travail (EP) nouvellement fondé est interdit par décision du gouverneur.
31.3, à Batman, les forces de sécurité arrêtent plus
de 40 personnes parmi lesquels se trouvent des dirigeants locaux du
HADEP. À Istanbul, la police annonce l'arrestation de trois militants
du DHKP/C.
PRESSION SUR LES MÉDIAS EN MARS
2.3, le magazine politique Özgür Gelecek est saisi
sur base de l'article 312 du CPT par la CSE d'Istanbul.
4.3, un ancien éditeur responsable du défunt
quotidien Özgür Gündem, Besim Döner, est condamné par la cour militaire
de l'État-major à deux mois de prison et à 160 mille LT pour propagande
antimilitariste.
4.3, deux revues politiques, le numéro 36 du
Partizanin Sesi et le numéro 14 du Partizan, sont confisquées sur base
de l'article 312 par la CSE d'Istanbul.
6.3, le président de l'Association des Droits de
l'Homme (IHD), Akin Birdal, et 16 autres hauts responsables sont jugés
par la CSE d'Ankara pour avoir publié une lettre d'informations
intitulée La Solution dans la Paix. Chacun d'entre eux risque jusqu'à
trois ans de prison.
6.3, le président de la Fondation des Droits de
l'Homme de Turquie (TIHV), Yavuz Önen et huit autres hauts responsables
sont jugés par une cour pénale d'Ankara pour avoir publié un livre sur
la défense des droits de l'homme. Chacun d'entre eux disque jusqu'à six
mois de prison.
6.3, à la CSE d'Izmir s'achève le procès de Hasan
Karadag, président du Centre Culturel de Mésopotamie (MKM), Cevdet
Turgut, président local du HADEP et président de la station de radio
Demokrat, Cengiz Tasdemir, poursuivi sur base de l'article 8 à propos
d'un programme radiophonique. Chacun a été condamné à une amende de 86
millions LT.
7.3, le propriétaire d'Atilim, Aslihan Yücesan,
subit un interrogatoire.
8.3, le n° 8 de la revue politique Proleter Halkin
Birligi est saisi par la CSE d'Istanbul sur base de l'article 8.
11.3, la CSE d'Istanbul condamne un éditorialiste du
périodique Mücadele, Metin Balca, à 16 mois de prison et à une amende
de 133 millions TL sur base de l'article 8. L'éditeur responsable Cafer
Cakmak aussi est condamné à six mois de prison et à une amende de 50
millions TL; l'éditrice Gülten Sesen se voit infligée une amende de 100
millions TL.
12.3, la cour militaire de l'État-major condamne
deux journalistes, Hale Soysü (Aydinlik) et Seyh Davut Karadag (Özgür
Gündem), à deux mois d'emprisonnement et à une amende de 160 mille LT
chacun pour publications antimilitaristes. Deux autres personnes,
Mehmet Akdeniz et Bülent Yildirim, sont également condamnés par la cour
aux mêmes peines et amendes.
13.3, le périodique Hedef est confisqué par la CSE
d'Istanbul sur base de l'article 312 du CPT.
14.3, la directrice de la Maison d'Édition Belge,
Ayse Zarakolu, et le président du Parti Ouvrier (IP), Dogu Perincek,
sont jugés par la CSE d'Ankara à propos de leurs discours prononcés au
Congrès de l'IHD qui s'est tenu en octobre 1994. Chacun d'entre eux
encourt jusqu'à trois ans de prison sur base de l'article 8.
15.3, un magazine mensuel d'arts, Ada, est saisi par
une cour pénale d'Istanbul pour un article qui y est paru et qui
concernait l'assassinat du journaliste Metin Göktepe.
15.3, la police d'Istanbul arrête Ibrahim Cicek,
rédacteur en chef d'Atilim; son épouse, Aysel Cicek; Haci Orman, un
journaliste du bureau étranger du périodique; le propriétaire d'Atilim,
Aslihan Yücesan; et les membres de l'équipe, Ali Hidir Polat, Sabahat
Karahan, Zeynel Yesil et Duran Sahin. La police a pénétré de force dans
les maisons des sept personnes précitées. Leurs familles et le
personnel du journal ont entamé une grève de la faim pour protester
contre les détentions.
16.3, le directeur du périodique Kurtulus, Gökhan
Kiziroglu, qui avait été arrêté le 7 mars sur un campus de l'Université
Technique d'Istanbul affirme, après avoir été relâché, qu'il a été
torturé pendant sa détention.
18.3, le journaliste Ahmet Altan est condamné à 15,3
millions LT par une cour pénale d'Ankara pour avoir insulté le juge
principal de la Cour Constitutionnelle au cours d'une émission de
télévision.
18.3, le périodique Alinteri est fermé pour une
durée d'un mois par décision de la Cour de Cassation à cause d'articles
se rapportant aux assassinats de dirigeants du HADEP. Alinteri avait
déjà été fermé pendant vingt jours, entre le 27 février et le 17 mars.
19.3, un nouveau périodique, Emekcinin Alinteri, est
saisi par la CSE d'Istanbul sur base des articles 6 et 8 de la LAT.
20.3, le représentant à Diyarbakir du périodique
Ronahi, Halil Ibrahim Dede, est arrêté par la police en relation avec
les célébrations non autorisées du Newroz.
20.3, les périodiques Atilim et Özgür Genclik sont
fermés chacun pour 30 jours par décision de la Cour de Cassation.
20.3, la Cour de Cassation confirme un
emprisonnement de 6 mois et une amende de 111 millions LT à l'encontre
de Ismail Akkin, en tant qu'éditeur responsable d'Atilim, et une amende
de 100 millions à l'encontre du même journaliste en tant qu'éditeur
d'Özgür Genclik.
20.3, le rédacteur en chef du journal Demokrasi,
Mehmet Oguz, est condamné par une cour pénale d'Istanbul à un
emprisonnement de dix mois et à une amende de 1 million LT pour un
article qu'il a écrit dans un autre périodique, Özgür Yasam, pour avoir
insulté l'Assemblée Nationale. L'éditeur responsable du dernier
périodique cité, Ali Zeren, a aussi été condamné à une amende de 1,5
million pour avoir publié cet article.
20.3, une correspondante du quotidien Demokrasi,
Serpil Korkmaz, est placée en état d'arrestation par la police qui
effectue une descente à sa maison.
21.3, Gonca Dönmezer, une employée de Kizilbayrak,
est arrêtée et battue par la police au cours d'une manifestation, lors
du Newroz. Elle a été détenu à la Prison Metris, à Istanbul, pour
"avoir pris part à une manifestation illégale".
22.3, Hamza Yalcin, ancien éditeur responsable de
Odak, est emprisonné à la prison de Bayrampasa, à Istanbul, sous
présomption d'appartenance à une organisation illégale. Hatice Onaran,
ancienne éditrice responsable de Devrimci Cözüm, est également
incarcérée à la prison de Bayrampasa depuis la confirmation de sa
sentence de quatre ans et demi. Elle était poursuivie sur base de la
Loi Anti-Terreur à cause d'articles qu'elle avait publiés dans Devrimci
Cözüm.
23.3, à Ankara, des journalistes qui couvraient une
manifestation d'étudiants ont fait l'objet de violence policière; six
d'entre eux, Cemal Gökcanli (Kanal 6 TV), Serkan Cinier et Gökhan Eren
(Interstar TV), Kemal Ertas (Partizanin Sesi) et Burhanettin Bilici
(Associated Press), ont été blessés. Six autres journalistes auraient
été brièvement placés en garde à vue.
25.3, le quotidien Demokrasi rapporte que les
collaborateurs du périodique Atilim, qui avaient été arrêtés le 15
mars, ont été soumis à la torture.
27.3, l'éditeur responsable du périodique Odak,
Erhan Duman, affirme avoir été torturé avec six autres de ses amis
pendant leur garde à vue à Istanbul.
27.3, le poète Nihat Behram, qui a vécu comme
réfugié politique en Europe pendant seize ans, a été placé en état
d'arrestation à l'aéroport d'Istanbul lors de son retours au pays.
27.3, le n° 3 du périodique Proleter Dogrultu et le
n° 3 de la revue pour jeunes Reheval sont saisis par la CSE d'Istanbul
sur base des articles 6 et 8 de la LAT.
27.3, Mustafa Temiz, un employé du mensuel Özgür
Cukurova, et les journalistes Deniz Koc et Latife Capik sont arrêtés
par la police anti-terroriste à Adana. Ils se sont vus imposer une
garde à vue de dix jours. De même, Hidir Sari, éditeur du Proleter
Halkin Birligi, est arrêté et détenu pendant 24 heures. Il est accusé
d'avoir conservé des exemplaires d'une édition du journal dont la
saisie avait été ordonnée par les autorités judiciaires.
29.3, à Alanya, le rédacteur en chef du journal
local Memleketim, Serhan Altiparmak, est arrêté sous prétexte qu'il a
refusé d'effectuer son service militaire. Il a été relâché après avoir
prouvé qu'il avait déjà accompli son service.
29.3, trois employés du périodique Atilim, Sabahat
Karahan, Dogan Sahin et Zeynel Yesil, affirment avoir été torturés
pendant leur garde à vue.
29.3, deux correspondantes du périodique Kurtulus,
Yazgülü Güder Öztürk et Hamide Öztürk, sont arrêtées par la police qui
prend d'assaut leurs maisons.
30.3, le n° 10 du périodique Proleter Halkin Birligi
est saisi par la CSE d'Istanbul sur base de l'article 312 du CPT.
30.3, l'éditeur responsable du périodique Kurtulus,
Hüseyin Gündüz, est placé en état d'arrestation par des policiers vêtus
de gilets pare-balles qui prennent d'assaut sa maison.
31.3, à Ankara, les Loups Gris du MHP attaquent un
certain nombre de libraires et blessent cinq personnes.
PROVINCES KURDES DAVANTAGE PAUPÉRISÉES EN SEPT ANS
En 1994, les régions les plus riches de Turquie
étaient devenues un peu plus riches tandis que les plus pauvres étaient
devenues encore plus pauvres, par rapport à 1987.
Les statistiques par région du revenu national,
telles qu'établies par l'Institut des Statistiques de l'État (DIE), ont
montré que les sept ans d'efforts gouvernementaux fournis entre 1987 et
1994 se sont révélés vains dans la mise en place d'une tableau plus
équitable en matière de distribution régionale du revenu.
Ils ont révélé que les deux régions les plus riches,
Marmara et l'Égée, ont participé pour 52,8 pour cent du Produit
Intérieur Brut (PIB) de la Turquie en 1994, alors que ce même chiffre
était de 51,9 pour cent en 1987. À elle seule, la région de Marmara a
représenté 35,6 pour cent en 1994, devenant un peu plus riche par
rapport à ses 35,3 pour cent de 1987. La part de l'Égée dans le revenu
national a aussi progressé de 16,6 pour cent en 1987 à 17,2 pour cent
sept ans plus tard.
À l'inverse, les deux régions les plus pauvres,
l'Anatolie de l'est et l'Anatolie du sud-est, peuplées principalement
de Kurdes, ont montré une baisse de leurs parts cumulées au sein du PIB
entre 1987 et 1994. Les deux régions touchées par la pauvreté
représentent ensemble 9,2 pour cent du revenu national en 1994, en
légère baisse par rapport aux 9,3 pour cent de 1987.
Un autre indice a confirmé les écarts grandissants
entre les revenus. La part moyenne dans le PIB des huit provinces où
"l'état d'urgence" est d'application était de 0,40 pour cent en 1987.
Ces villes du Sud-est étaient Diyarbakir, Bingöl, Tunceli, Mardin,
Adiyaman, Van, Bitlis et Hakkari. En 1994, les 10 provinces d'état
d'urgence, avec l'addition de Batman et Sirnak, atteignaient une
moyenne de 0,33 pour cent du revenu national de la Turquie.
Les dix provinces les plus pauvres sont Bayburt,
Ardahan, Hakkari, Igdir, Tunceli, Bingöl, Sirnak, Gümüshane, Bitlis et
Agri, avec 0,1 pour cent du PIB.
Du côté des riches, a dit le DIE, Istanbul qui
représente 20,3 pour cent du PIB de la Turquie, a conservé sa première
place malgré un léger repli par rapport à ses 21 pour cent de 1987.
Izmir s'est classée deuxième avec 8,2 pour cent et Ankara troisième
avec 7,9 pour cent.
Les villes industrielles Kocaeli et Bursa se sont
classées quatrième et cinquième avec 4,6 et quatre pour cent
respectivement.
Les autres classés dans le top 10 étaient, dans
l'ordre, Adana (3,3 pour cent), Icel (2,9), Antalya (2,6), Manisa (2,6)
et Konya (2,2).
LES VIOLATIONS DES DROITS DE L'HOMME CONTINUENT COMME AVANT
Bien que la Turquie soit gouvernée depuis début mars
par une nouvelle coalition ayant promis de respecter les droits et
libertés fondamentales, 127 personnes se trouvent encore en prison pour
leurs opinions politiques à la fin du mois de mars.
Le rapport mensuel de l'Association des Droits de
l'Homme (IHD) montre que les violations des droits de l'homme se sont
poursuivies comme avant.
Ci-dessous, sont repris les chiffres de mars 1996:
- Attaques perpétrées par des assaillants
inconnus: 5 morts, 13 blessés
- Morts dans des exécutions extra-légales, sous la
torture et en détention: 9
- Tués dans des affrontements
armés: 97
- Disparus au cours de leur détention
préventive: 14
- Cas de torture: 64
- Personnes détenues: 2.076
- Personnes arrêtées par les
tribunaux: 208
- Sections de l'IHD fermées: 2
- Publications interdites: 9
- Bureaux de presse pris d'assaut par la
police: 11
- Journalistes détenus: 46
- Publications saisies: 13
- Peines de prison prononcées: 6
ans et 6 mois
- Amendes infligées: 2,1 milliards
LT
- Nombre de prisonniers d'opinion: 127
Auparavant, en février 1996, les chiffres concernant
les violations des droits de l'homme étaient établis comme suit:
- Attaques perpétrées par des assaillants
inconnus: 6 morts, 17 blessés
- Morts dans des exécutions extra-légales, sous la
torture et en détention: 17
- Tués dans des affrontements
armés: 37
- Victimes civiles d'attaques: 7
morts, 13 blessés
- Disparus au cours de leur détention
préventive: 16
- Cas de torture: 51
- Personnes détenues: 874
- Personnes arrêtées par les
tribunaux: 203
- Bureaux pris pour cible par des poseurs de
bombes: 14
- Associations et syndicats
fermés: 2
- Associations et journaux pris d'assaut par la
police: 12
- Journalistes détenus: 19
- Publications saisies: 13
- Peines de prison prononcées: 5
ans et 1 mois
- Amendes infligées: 474 millions
LT
- Peines de prison requises: 666
ans et 8 mois
- Nombre de prisonniers d'opinion: 124
L'APPEL DU CONSEIL DE L'EUROPE AU GOUVERNEMENT TURC
L'Assemblée Parlementaire du Conseil de l'Europe a
adopté, le 25 avril 1996, une recommandation basée sur le rapport du
député socialiste hongrois Andreas Barsony qui demande principalement à
Ankara un règlement pacifique de la question kurde et la levée de
l'article 8 et des autres lois et articles antidémocratiques qui se
trouvent dans la législation turque.
L'Assemblée a demandé à la Turquie de gracier quatre
anciens parlementaires kurdes et a suggéré une amnistie générale en
Turquie.
La recommandation fait référence à une précédente
résolution qui requiert un "processus de surveillance" à l'égard de la
Turquie et demande aux commissions juridique et des droits de l'homme
du Conseil d'établir un rapport sur la situation en Turquie pour la
session de septembre 1996 de l'Assemblée.
Les députés turcs ont exprimé, à l'Assemblée, leur
réserve à l'égard de la recommandation. Irfan Demiral, chef de la
délégation turque, à dit que le mécanisme de surveillance imposée à la
Turquie devrait être étendue à tout les "autres membres" pour
surveiller le racisme et la discrimination.
LE PROCÈS DE LA TURQUIE PAR LA COUR EUROPÉENNE ET LA COMMISSION
EUROPÉENNE
Pour la première fois, la Cour Européenne des Droits
de l'Homme a entendu les plaintes de sept citoyens turcs d'origine
kurde, le 25 avril, concernant la destruction de leur village par des
soldats turcs quatre ans auparavant.
Contre l'accusation de Akdivar et d'autres, la
défense turque dit que le village en question — le village de Kelekci à
Diyarbakir — avait été brûlé par le PKK.
La Commission des Droits de l'Homme, qui envoie des
applications à la cour, à décidé de prendre en compte l'affaire après
avoir envoyé des experts pour faire des investigations sur les lieux à
propos des versions des deux parties.
En faveur des intérêts de la Turquie, la procédure
n'aurait pas été tout à fait respectée, ainsi le litige devrait être
traité en Turquie plutôt que devant la Cour Européenne.
Le 26 avril, la Cour à entendu un autre cas contre
la Turquie par Zeki Aksoy. Il a déclaré à la Cour en mai 1993 qu'il
avait été torturé par la police turque. Il avait ensuite été assassiné.
Ces avocats ont dit qu'il avait reçu des menaces de morts lui ordonnant
de retirer sa plainte.
Ces deux cas avaient été portés devant la justice
européenne par l'assistance du Projet Kurde des Droits de l'Homme
(KHRP) et l'Association des Droits de l'Homme de Turquie (IHD).
D'autres part, la Commission Européenne a procédé du
15 au 19 avril à Ankara à l'audition de six cas qu'elle avait
précédemment déclaré admissibles. Les auditions de la Commission
avaient pour objet de réunir plus d'information à propos des
accusations d'éviction forcée, de torture et de mauvais traitements, et
de destruction de la propriété émises à l'égard du gouvernement turc.
Ces cas aussi ont été assistés par le KHRP et l'IHD.
Jusqu'à présent, 54 cas assistés par le KHRP ont été
déclarés admissibles par le Commission Européenne. Plus de 400
individus ont reçu l'aide du projet au niveau de la CEDH.
LES PAYS NORDIQUES PRÔNENT UNE SOLUTION PACIFIQUE A LA QUESTION KURDE
Le Comité Nordique d'Helsinki, branche de l'agence
internationale de la Commission d'Helsinki pour la surveillance des
droits de l'homme, a décidé d'envoyer une délégation à Ankara, du 20 au
25 avril, pour préparer une initiative politique en faveur de la
promotion de la paix dans sud-est de la Turquie.
Le Président du Comité, le Professeur Erik Siesby,
dans une lettre adressée au chef du PKK, Abdullah Öcalan, a dit:
"Nous n'avons pas de solutions toutes faites à la
question kurde. Tout ce que nous espérons réaliser, en guise de premier
pas vers la paix, est de rechercher les possibilités pour une solution
à la question kurde en écoutant les versions des différentes parties en
présence.
"Je comprends le point de vue du gouvernement turc
de ne pas répondre au cessez-le-feu unilatéral du PKK en disant qu'il
ne veut pas négocier avec une organisation terroriste. Mais je pense
qu'il n'y a aucune raison que le gouvernement continue d'évacuer les
villages situés dans la région.
"Il est inacceptable que la Turquie utilise son
armée pour résoudre un problème social et culturel. Une armée est
entraînée à tuer, et ceci n'est pas la voie qu'il faudrait utiliser
pour traiter les problèmes sociaux et culturels. Laisser la solution
aux militaires n'a pas de sens, et il ne pourrait qu'entacher l'image
de la Turquie.
"L'armée a été utilisée pour réaliser l'évacuation
de plus de 3000 villages, rendant ainsi sans abri 2 à 3 millions de
personnes. Ceci crée plus de problèmes que de résoudre quoi que ce
soit. Je suis désolé que la glorieuse armée turque utilise de tels
procédés contre son propre peuple."
Siesby a également appelé "tous les pays amis de la
paix" à agir en tant que médiateur entre la gouvernement turc et les
représentants kurdes. "Les pays nordique — Danemark, Norvège, Suède et
Finlande — sont quelques uns de ces pays amis de la paix", a-t-il
déclaré.
"Bien que nous n'ayons pas d'intérêts directs en
Turquie, nous sommes désolés à propos de la situation qui y règne.
Cette guerre dessert l'image de la Turquie en Occident, et la Turquie
ne peut plus (se permettre), économiquement parlant, de maintenir cette
guerre à l'intérieur de ses frontières."
"CADEAU POUR LE OUI" AUX MPE DE LA PART DE L'AMBASSADEUR TURC
Plusieurs membres du Parlement Européen auraient
exprimé leur mécontentement concernant les cadeaux turcs de cassettes
de musique classique qui leur avaient été envoyés après qu'ils aient
voté "oui" lors du vote de l'Union douanière en 1995.
D'après le Turkish Daily News du 16 janvier 1996,
les cassettes, qui sont des oeuvres de compositeurs occidentaux joués
par des orchestres turcs, ont été retournés par certains membres du
Parlement Européen qui les ont considérés comme de la "corruption".
L'Ambassadeur turc auprès des Communautés
Européenne, Uluc Özülker, a envoyé les cassettes avec une lettre de
remerciement mais le geste à été rejeté lorsque certains membres ont
dit qu'ils porteraient ceci à la réunion de l'assemblée générale.
MONTÉE DU RACISME: EMEUTES ANTIKURDES À ERDEMLI
Dans le cadre de la campagne de lavage de cerveau
mené par des militaires et les médias turcs, un simple incident
familial peut facilement retourner en une flambée raciste en Turquie.
Dans la petite ville méditerranéenne de Erdemli près
d'Antalya, une querelle a éclaté le 9 mars entre une famille de la
région et une autre famille qui avait déménagé à la ville, en
provenance de la province du l'est anatolien Agri. La querelle
aboutit au meurtre de Galip Cetin, un membre de la famille locale.
Le lendemain, 10 mars, plus de 2000 habitants de
Erdemli se sont réunis devant l'hôtel du gouvernement, lançant des
slogans du genre, "Nous allons jeter hors de Erdemli tous les Kurdes",
et, "À bas le PKK!". Ils ont causé aussi de sérieux dommages à des
commerces kurdes en les attaquant avec des pierres et des bâtons et,
dans un cas, en allumant un feu.
Des incidents similaires étaient auparavant survenus
à Alanya, à Fethiye et dans d'autres régions où une population locale
turque rencontre un nombre substantiel de kurdes qui migrent pour des
raisons économiques ou pour échapper au terrorisme d'État dans l'est et
le sud-est du pays.
LE CPJ APPELLE A LA LIBÉRATION DE TOUS LES JOURNALISTES EMPRISONNÉS
Le Comité de Protection des Journalistes (CPJ) a
rendu le 2 avril une pétition au Premier Ministre turc Mesut Yilmaz
signée par 50 journalistes et dirigeants de médias américains demandant
la libération de tous les journalistes emprisonnés en Turquie.
"La Turquie détient plus de journalistes en prison
qu'aucun autre pays", a dit Avner Gidron, le directeur des recherches
du CPJ. "Nous envoyons cette pétition au Premier Ministre Yilmaz pour
faire savoir au gouvernement turc que ceci est matière à de sérieuses
inquiétudes parmi les journalistes aux États-Unis."
La question des 51 journalistes dans les prisons
turques avait effectivement été soulevée au cours d'un dîner offert à
Washington par le Président Demirel le 28 mars à la presse américaine.
La réponse du Président, selon laquelle ceux qui se trouvaient en
prison étaient en réalité des terroristes qui paradent en habits de
journalistes, n'avait pas satisfait les journalistes américains.
"Malheureusement, il apparaît que le nouveau
gouvernement n'a pas amélioré le triste record de son prédécesseur en
matière de liberté de la presse", a dit Gidron. "L'emprisonnement de
journalistes et la violence contre la presse continuent."
Le CPJ a relevé qu'au moins "sept journalistes
avaient été emprisonné au cours des deux dernières semaines. Et
plusieurs reporters avaient brutalement été battu par la police au
cours d'une récente manifestation d'étudiants à Ankara."
"L'article 8, malgré de récentes révisions,
criminalise encore les nouvelles qui sont censées viser la destruction
de l'indivisibilité de l'État turc. De la même manière, l'article 7
criminalise tous les articles de presse considérés par l'État comme de
la 'propagande terroriste'. Et l'article 312 du Code pénal turc prévoit
jusqu'à 3 ans de prison pour les écrits censés 'inciter à la haine et à
l'inimitié', déclare la pétition du CPJ.
Il a été rappelé à Yilmaz que de telles pratiques
"constituent une violation flagrante de l'article 19 de la Déclaration
Universelle des Droits de l'Homme, qui consacre les droits de tous les
citoyens des pays membres des Nations unies 'à rechercher, recevoir, et
à envoyer de l'information et des idées à travers tout les médias sans
distinction de frontières."
Le CPJ a demandé à Yilmaz "de rechercher
l'abrogation de l'article 8 de la Loi Anti-Terreur et de l'article 312
du Code pénal."
Ensuite, il a demandé à Yilmaz de rechercher une
révision de l'article 7 de la Loi Anti-Terreur dans le but de mettre
fin à son utilisation comme une arme contre la presse.
LE DÉFICIT COMMERCIAL DE LA TURQUIE ATTEINT 172,5%
L'Institut d'État des Statistiques (DIE) a annoncé
le 26 mars que le déficit extérieur de la Turquie était montée à 172,5
pour cent en 1995, avec 14,07 milliards $ contre 5,16 milliards $ en
1994. Les exportations turques ont augmenté de 19,5 pour cent avec 21,6
milliards $ par rapport aux 18,1 milliards $ de 1994, alors que les
importations en 1995 ont progressé de 53,5 pour cent avec 35,7
milliards $ par rapport aux 22,3 milliards $ en 1994.
Le pourcentage des exportations par rapport au
importations a chuté à 60,6 pour cent en 1995 alors qu'il était de 77,8
pour cent en 1994.
LA DETTE EXTÉRIEURE DE LA TURQUIE GRIMPE A 73,3 MILLIARDS $
La Banque Centrale turque a annoncé le 19 avril que
le solde de la dette extérieure de la Turquie, y compris les
obligations du secteur privé, était montée à 73,3 milliards $ l'année
passée contre 65,5 milliards $ en 1994, atteignant ainsi 44,3 pour cent
du produit national brut.
D'après des estimations, la Turquie devra rembourser
11 milliards $ en 1996, 10,6 milliards $ en 1997, 10,2 milliards $ en
1998 et 7,9 milliards $ en 1999 même si elle n'emprunte plus rien.
Avec un déficit annuel du commerce extérieur de 14
milliards $, le solde de la dette extérieure de la Turquie pourrait
dépasser les 100 milliards $ en l'an 2000.
LE QUOTIDIEN EVRENSEL FERMÉ POUR UN MOIS
L'un des principaux quotidiens d'opposition de
Turquie, Evrensel, a été fermé pour un mois par la Cour de Sécurité
d'État au début du mois d'avril 1996.
Les journalistes et les activistes des droits de
l'Homme ont tenu des meetings à Istanbul et à Ankara pour protester
contre la pression exercée à l'égard d'Evrensel. À Istanbul, le 6
avril, presque 100 journalistes et activistes des droits de l'Homme se
sont réunis devant l'Association des journalistes de Turquie (TGC) pour
dénoncer la décision.
Le rédacteur en chef du quotidien, Ihsan Caralan,
s'exprimant lors du meeting, a dit que 23 numéros d'Evrensel avaient
été saisis.
Metin Göktepe, un reporter d'Evrensel, avait été
battu à mort au cours de sa garde à vue policière après avoir assisté
aux funérailles de 2 mutins de prison en janvier.
99 INTELLECTUELS À NOUVEAU JUGÉS PAR LA CSE
Quatre-vingt-dix-neuf intellectuels de Turquie qui
ont opté pour la résistance passive, dans le cadre d'un effort
d'expansion des limites de la liberté de pensée, ont été à nouveau
jugés par la CSE d'Istanbul le 13 mars.
Ils sont accusés par le procureur d'avoir violé
l'article 8 en apposant leur signatures en tant qu'éditeur du livre
Liberté d'Expression.
Le livre consiste en des articles qui ont été
censurés et beaucoup de leurs auteurs avaient été emprisonnés pour
avoir fait la promotion du séparatisme.
LA COUR SUPRÊME BULGARE VALIDE L'ÉLECTION D'UN MAIRE TURC
La Cour Suprême de Bulgarie a confirmé un Turc
d'origine comme maire légitime d'une région avec une importante
population turque.
Au dernière élection d'octobre, Rasim Musa avait été
élu maire de Kardzhali avec 50,7 pour cent des suffrages contre 49,3
pour cent en faveur du candidat soutenu par le Parti Socialiste Bulgare
(BSP).
Une cour régionale, sur la demande du BSP, avait
déclaré nul l'élection de Musa prétextant des irrégularités de vote.
Cependant, la Cour Suprême a décidé le 26 avril que
les mauvaises pratiques n'avaient pas affecté l'issue de l'élection
municipale.
Musa est un membre du Mouvement pour les Droits et
les Libertés, qui a 15 sièges dans le parlement national bulgare qui en
compte 240.
Les leaders des Turcs d'origine ont accusé le BSP de
jouer la carte nationaliste à l'approche des élections présidentielles
qui doivent avoir lieu à la fin de cette année en Bulgarie.
D'autre part, la controverse à propos du poste de
mufti principal a atteint son paroxysme consécutivement à la
désignation de Nedim Gencev à la présidence du Haut Conseil de l'Islam
de Bulgarie.
L'année dernière, Fikri Salih avait été élu mufti
principal de Bulgarie, mais sa désignation n'a toujours pas été
approuvé par les autorités gouvernementales.
Salih a traité Gencev d'ancien agent du KGB et a
accusé le BSP de jouer de sales jeux pour créer un conflit entre les
Musulmans en Bulgarie.
Il a également dit qu'ils avaient fait appel à la
Cour Internationale de Justice à La Haye et à la Conférence Islamique
Mondiale pour protester contre la pression que le gouvernement bulgare
était en train de mettre sur les Musulmans du pays.
AIDES MILITAIRES AMÉRICAINES ET VIOLATION DU DROIT DE LA GUERRE
Dans un nouveau rapport détaillé publié le 21
novembre 1995, Human Rights Watch affirme que les armes fournies par
les partenaires de la Turquie membres à l'OTAN, en particulier par les
États-Unis, jouent un rôle central dans les abus commis par les forces
de sécurité turques dans le cadre de leur campagne pour évacuer et
brûler des villages kurdes dans le sud-est de la Turquie.
Ci-dessous, nous reproduisons l'introduction et le
chapitre Transferts d'Armes et Aides à la Turquie du rapport comportant
179 pages et intitulé Transferts d'Armes et violations des Droits de la
Guerre en Turquie:
Introduction
Depuis 1984, le PKK, ou le Parti des Travailleurs du
Kurdistan, a combattu l'État turc dans une tentative de dégagement
d'une zone pour les Kurdes dans le sud-est de la Turquie, bien qu'il y
ait des indications récentes selon lesquelles le PKK pourrait se
contenter de moins. Cependant, le gouvernement turc a formulé des
oppositions au PKK, affirmant que le but ultime de l'organisation
demeurait la disparition de la Turquie.(1) Le gouvernement turc
considère le PKK comme une organisation terroriste.
Le Sud-est rural de la Turquie, où vit la majorité
des Kurdes dont le nombre avoisine les dix millions, est la région la
plus pauvre et la plus sous-développée du pays. Tandis que la Turquie
occidentale, urbaine a sans cesse développé son infrastructure
technologique et industrielle, reliant aux marchés européens les
parties les plus riches de la Turquie, le Sud-est s'est retrouvé
relégué de plus en plus loin. Le sous-développement du Sud-est est
demeuré essentiellement inchangé malgré les efforts limités du
gouvernement en vue d'augmenter la croissance économique, comme dans le
cas du projet régional d'irrigation GAP dont l'État est à la base.
Toutefois, le sous-développement économique
n'était pas le seul facteur contribuant à la montée du PKK et la
sympathie qu'il soulève parmi de nombreux Kurdes. Le sous-développement
économique dans le Sud-est a été de pair avec une répression culturelle
de l'identité ethnique kurde. Alors que les Turcs indiquent avec raison
que les Kurdes peuvent s'intégrer facilement au sein de la société
turque et atteindre les plus hautes responsabilités dans la vie
politique et sociale, ils négligent souvent de préciser que ces Kurdes
doivent faire comme des "Turcs" qui ont renoncé à leur héritage
ethnique.(2) Jusqu'à récemment, par exemple, la langue kurde était
interdite en Turquie. De manière pratique, bien que le gouvernement
turc ne pouvait faire cesser les villageois d'utiliser leur langue
maternelle à la maison, il a brillamment réussi à empêcher que le kurde
ne soit utilisé au niveau des plates-formes publiques.(3)
Les origines organisationnelles du PKK remontent aux
années 1970, lorsque les mouvements gauchistes de tous genres ont gagné
en importance auprès des intellectuels et de la classe ouvrière de
Turquie. Abdullah Öcalan, le chef du PKK depuis sa création, était à
l'origine membre d'un groupe gauchiste au département des sciences
politiques de l'Université d'Ankara. À la fin des années 1970, une
lutte à triple sens s'est engagée entre les mouvements quasi-fascistes
de droite, la gauche turque, et le gouvernement turc. En 1980, comme la
lutte devenait de plus en plus violente, l'armée turque a renversé le
gouvernement civil et a instauré un régime militaire. Les lavages de
cerveaux qui s'en suivirent, ayant pour cible les activistes
politiques, furent particulièrement rudes à l'encontre de la gauche
turque.
Immédiatement avant le coup d'état du 12 septembre
1980, cependant, Abdullah Öcalan, ensemble avec d'autres gauchistes
kurdes, s'est envolé pour la vallée libanaise de la Bekaa, qui était à
l'époque le fief d'organisations palestiniennes nationalistes et de
gauche. Entre 1980 et 1984, Öcalan et ses partisans ont fondé le PKK et
ont construit une organisation bien structurée. en 1984, le PKK a lancé
ses premières attaques sur les représentants de l'État turc, comprenant
les postes militaires, les enseignants des écoles publiques et les
fonctionnaires de l'État (pris pour cible parce que le PKK voyait en
eux les représentants d'un "État colonial"), et les membres des "gardes
de village" paramilitaires, les Kurdes de la région recrutés par
l'État, et leur familles.
La stratégie anti-insurrectionnelle de la Turquie
La guerre entre les forces armées turques et le PKK
a été dans un premier temps une lutte rurale. Avec ses montagnes
accidentées, ses myriades de grottes et ses hivers rudes, le Sud-est de
la Turquie convenait parfaitement à une force de guérilla déterminée
jouissant d'une partie de la population rurale. Le PKK a exploité ces
avantages, se cachant des forces turques lorsqu'il était poursuivi,
émergeant pour attaquer aussi bien les installations militaires et de
l'État que les milices kurdes de l'État lorsque la pression était
levée. Bien qu'il y ait eu des affrontements dans les centres urbains,
la campagne du PKK demeurait essentiellement un phénomène rural.
Bien que le PKK et les forces de sécurité turques se
soient battus pour le contrôle du sud-est depuis 1984, la guerre n'est
entrée dans son actuelle phase brutale qu'en 1992, consécutivement à la
guerre du Golfe. Auparavant, les bases arrières du PKK étaient d'abord
situées au Liban, dans la vallée de la Beka qui n'est pas contiguë aux
frontières turques. Les efforts de réapprovisionnement du PKK étaient
obligés de suivre une route difficile, tortueuse vers la Turquie à
travers un deuxième, un troisième et un quatrième pays. Après avoir
vaincu les forces irakiennes au Koweït au début de l'année 1992, la
coalition menée par les États-Unis a considéré le Nord de l'Irak,
peuplé principalement de Kurdes irakiens, comme une zone autonome
quasi-souveraine, imposant une zone d'interdiction de vol aux avions
irakiens et fournissant de l'aide aux Kurdes irakiens via la Turquie.
Le PKK a utilisé à son avantage la nouvelle situation dans le Nord de
l'Irak, développant des bases avancées près de la frontière
irako-turque et envoyant des combattants et du matériel à ses forces
situées en Turquie.
En 1992, la présence du PKK dans les régions
montagneuses de la Turquie était forte, et les cadres du PKK avaient
fait des incursions dans des villes du Sud-est comme Sirnak, Lice et
Cizre. Un réseau du PKK était mis en place à travers les villages
situés dans les régions du Sud-est, avec une attention toute
particulière portée aux villages qui se trouvent le long de la
frontière irakienne et dans la province de Diyarbakir. Les forces de
sécurité turques, qui n'étaient pas préparées à l'influx du PKK, ont
perdu leur monopole du pouvoir dans la région. Dans les villes, la
présence du PKK se caractérisait par des manifestations de masse, des
drapeaux brandis, des grèves commerciales et des meetings politiques.
Le PKK était en bonne voie pour devenir une force politique populaire
et puissante dans le Sud-est.
Au milieu de l'année 1992, l'armée turque s'est
réorganisée dans le Sud-est et a lancé une offensive urbaine contre le
PKK. La région était inondée de troupes, aussi bien de la Gendarmerie
que des militaires, et les forces de sécurité ont adopté une politique
d'accablement et de réponse disproportionnée aux actions du PKK. Les
assauts portés par les forces de sécurité sur Sirnak, Lice et Cizre
sont apparus comme de sévères punitions collectives destinées à
l'ensemble des populations de ces villes. Dans ces incidents de la
mi-1992, les forces de sécurité ont profité des provocations du PKK
pour dresser des barrages non discriminants et d'y procéder à des
fusillades au moyen d'armes lourdes contre la population urbaine et les
immeubles, tuant un total d'au moins soixante-cinq personnes, selon les
estimations de la Fondation pour les Droits de l'Homme de Turquie, et
causant des dommages importants. Les zones urbaines sont rendues
inhabitables, des milliers de civils fuient leur maisons, et les forces
de sécurité ont démontré avec succès leur détermination pour affirmer
de nouveau leur contrôle sur les villes.
Parallèlement aux assauts portés sur les villes de
la région du sud-est, les forces de sécurité ont créé et renforcé les
forces d'élite anti-insurrectionnelles existantes.(4) Des troupes
expérimentées ont été recrutées au sein de l'armée régulière et de la
Gendarmerie pour constituer des forces spéciales
anti-insurrectionnelles faisant partie tant de la Gendarmerie que de la
police, elles ont reçu un entraînement spécifique et un équipement
moderne, et elles ont aussi reçu l'ordre de se positionner en première
ligne pour la destruction du PKK. Ces unités sont rapidement devenues
les plus grands violeurs des droits de l'homme dans la région, avec la
réputation d'agir avec brutalité et impunité.
Plus important, sans doute, est le fait que les
forces de sécurité ont changé leur stratégie rurale. Avant 1992, les
forces turques se trouvaient dans des bases centrales et des
forteresses, se déplaçant uniquement en réponse à une attaque du PKK.
En 1992, toutefois, les Turcs ont adopté une "stratégie de défense
régionale", traçant une grille qui divise le sud-est de la Turquie en
zones de responsabilité. Des unités individuelles ont reçu la tâche de
patrouiller à l'intérieur d'un carré dans la grille, et les forces de
sécurité ont reçu l'ordre de rester en patrouille dans les montagnes
pour des périodes plus longues. "Nous avions l'habitude de toujours
rester dans les bases, à attendre que vienne le PKK. Depuis 1992,
cependant, nous avons reçu l'ordre de rester des semaines hors des
bases", a dit V.A., un ancien officier de l'armée turque, à Human
Rights Watch en 1995.(5) En étant constamment en mouvement, en montant
des embuscades et en observant les zones reculées, les militaires
espèrent réduire la liberté de mouvement du PKK et augmenter le contact
avec les guérilleros. Une seconde composante de la nouvelle stratégie
était la création de "zones de non accès", zones montagneuses déclarées
hors limites par les militaires, sans se soucier de savoir si les zones
étaient habitées ou non. V.A. a dit que dans la région Kars, où il
officiait, un flanc entier de montagne ainsi que ses pentes et vallées
adjacentes avaient été "interdites". "Nous avons ouvert le feu sur tout
ce qui bougeait dans ces zones", a-t-il dit, "civil ou guérilleros, peu
importait. Toute personne qui y allait était abattu." D'après
Christopher Panico, plusieurs régions, y compris des zones proche des
monts Tendürek et Agri, étaient déclarées "zones militaires", ce qui
était un peu plus que des zones de tir militaires.(6)
Les villages kurdes situés dans les montagnes
présentaient un problèmes particulièrement épineux aux architectes de
la nouvelle approche de la contre-insurrection. Le contrôle de milliers
de villages individuels requerrait beaucoup plus de troupes,
d'hélicoptères et de ressources que l'État turc voulait investir. Les
forces de sécurité ont traité ce problème de deux manières,
l'éradication des villages et le renforcement des "gardes de village",
avec des implications graves dans chacun de ces cas.
Evacuation et destruction de villages
C'est, en Turquie, un secret de Polichinelle que la
destruction, par les forces de sécurité, d'un grand nombre de villages
dans un effort de déni du support logistique du PKK. Le gouvernement
turc a graduellement admis l'étendue du problème, bien qu'il continue à
nier que les forces de sécurité sont responsables pour la plus grande
part des évacuations forcées. Le gouvernement a donné une série de
diverses estimations en ce qui concerne les destructions de villages:
en avril 1994, le Ministre de l'Intérieur Mentese a dit dans une
conférence de presse que 871 villages et hameaux avaient été évacués;
pour la fin de 1994, cependant, selon les estimations de Mentese,
fournies dans un document écrit, avait grimpé à 2.297 villages et
hameaux partiellement ou totalement évacués.(7) Le 27 juin 1995,
Mentese a dit au Parlement turc dans un discours public que 2.200
villages avaient été "vidés ou évacués".(8) Le 25 juillet 1995, le
quotidien turc du centre, Milliyet, a cité le bureau du gouverneur de
la région d'état d'urgence du sud-est comme déclarant que 2.664
villages et hameaux avaient été partiellement ou totalement évacués.(9)
Selon un expert turc des Droits de l'Homme reconnu, les évacuations ont
déplacé quelque deux millions de villageois, qui ont envahi les
quartiers pauvres dans toutes les plus grandes villes de Turquie.(10)
Seulement en 1994, d'après la Fondation des Droits
de l'Homme de Turquie, 1.000 villages ont été détruits ou évacués.(11)
En octobre 1994, le Ministre d'État turc aux Droits de l'Homme, Azimet
Köylüoglu, a visité la province de Tunceli, alors le terrain d'une
offensive massive de contre insurrection, et a déclaré que les forces
de sécurité s'étaient engagées dans le "terrorisme d'État" en brûlant
des villages et en évacuant des villageois par la force. Le Ministre du
gouvernement qui était plus tard forcé de revenir sur ces déclarations
sous la pression de politicien conservateur, a dit,"les forces de
sécurité devraient éviter la psychologie [sic] de brûlé et de détruire
au cours de leur combat sans répit contre le terrorisme. Les villageois
évacués devraient recevoir de la nourriture et un abri.... Nous ne
pouvons même pas leur donner des tentes du Croissant Rouge."(12) En
octobre 1994, Human Rights Watch/Helsinki a publié un rapport de 27
pages documentant la campagne de déplacement forcé dans le Sud-est.
"Dans un effort de privation du PKK de sa base de support logistique",
a déclaré le rapport, "les forces de sécurité évacuent de force les
villageois de leur village et parfois détruisent leur maisons. La
torture et la détention arbitraire accompagnent souvent de telles
évictions.(13) Selon le rapport, les forces de sécurité détruisent les
villages dans trois situations déterminées: Lorsque les villageois
refusent de se joindre au système officiel de "gardes de village", une
milice soutenue par l'État (voir infra); en représailles aux attaques
du PKK contre les installations de l'État, lorsque les villageois sont
malchanceux que pour vivre dans les environs immédiat; ou lorsque les
villageois se retrouvent dans une zone d'opérations
anti-insurrectionnelles. Dans ce cas, la volonté des forces de sécurité
de s'assurer que la région est nettoyée des guérilleros du PKK et des
partisans potentiels les pousse à incendier les villages.
B.G., un conscrit dans une unité d'infanterie basée
dans le district de Silvan pendant la fin 1994 et le début 1995, a
raconté à Human Rights Watch qu'au cours des patrouilles pédestres en
haute montagne, il est passé à travers "des centaines" de village
vides. B.G. a dit qu'il était de notoriété publique que les forces de
sécurité brûlaient des villages, bien qu'il n'ait participé qu'à une
seule opération de ce type. "La plus part des villages de mon district
étaient brûlés avant que je n'arrive", expliquait-il.(14) V.A.,
l'ancien officier militaire turc cité précédemment, a raconté à Human
Rights Watch qu'en plus de forcer les villageois à partir, les forces
de sécurité brûlaient dans de nombreux cas les villages pour éviter que
le PKK n'utilise les maisons vides comme abris pendant le froid des
mois d'hiver. "J'ai dormi dans certaines maisons vides lors de
patrouilles d'hiver", a-t-il dit, "et elles ont été très utiles. Si le
PKK avait accès à ces maisons, ils seraient en bon état."
V.A. a aussi dit que dans certains cas les
villageois décidaient de quitter leur maisons à cause de la pression
exercée sur eux par les forces de sécurité locales. "La Gendarmerie y
vient encore et encore, demandant pour qu'ils deviennent gardes de
village, alors bien sur les gens vont s'en aller. Ils n'ont pas le
choix." Lorsque les villageois quittent leur maisons de leur propre
gré, dit-il, souvent les forces de sécurité brûlent quand même les
structures pour ne pas permettre leur utilisation par le PKK.
B.G., l'ancien soldat, a dit qu'il croyait que les
officiers sur le terrain avaient limité la discrétion seulement où les
destructions de villages étaient impliquées. "Si vous voulez brûler une
maison ou deux dans un village", explique-t-il, "ce n'est pas un
problème, vous le faites simplement." Dans de nombreux cas dont il a
été le témoin, dit-il, ses officiers ont brûlé quelques maisons qui
n'avaient pas été complètement détruites au cours des précédents
efforts de destruction. "Si vous voulez brûler un village entier",
dit-il, "vous avez besoin de l'autorisation du commandant en chef de la
Gendarmerie à Diyarbakir." B.G. a dit qu'en plus de l'incendie d'un
village dont il a été lui-même le témoin, il se souvenait d'avoir
entendu à la radio un ordre pour brûler un village dans le district de
Silvan. La directive était émise par un commandant en chef à Diyarbakir
à destination d'un officier d'infanterie d'une unité voisine.
B.G. a dit que la plus part des incendies de village
prenait place dans des zones montagneuses au-dessus d'une certaine
altitude. Les village plus accessibles situés dans des vallées ou près
d'axe autoroutier tendaient à ne pas être détruits, parce qu'ils
pouvaient être plus facilement contrôlé. "Nous fuirions ces villages un
fois par semaine ou quelque chose comme cela", a-t-il dit, "et nous
pourrions garder un œil sur eux." "Ceux qui posaient problème étaient
ceux qui se trouvaient loin des regards", explique-t-il.
"Renforcement du système de "garde de village"
En Turquie, le concept actuel d'un système de garde
de village soutenu par l'État remonte au moins à la moitié des années
1980. En théorie, le système semble relativement bénin: les forces de
sécurité, incapable de maintenir une présence de tout les instants dans
tous les villages, donnent des armes aux gens de la région pour
qu'ils puissent ainsi défendre leur propre maisons contre les attaques
du PKK. En pratique, le système comporte une quantité significative de
conscription forcée, d'intimidation, de brimades et d'incitation à
commettre des violations des droits de l'homme.
Le système de garde de village, dont les autorités
espéraient qu'il réduirait l'accès du PKK aux populations civiles, n'a
obtenu qu'un succès partiel. Alors que les incitants fiscaux ont
abouti à l'augmentation du nombre de gardes de village officiellement
reconnus de 5.000 en 1987 à 67.000 en 1995, les représailles brutales
du PKK contre les membres des gardes de village et leur famille,
couplées avec la politisation de la population kurde, ont milité contre
l'expansion du système de garde de village. De nombreux villages ont
refusé de coopérer car ils soutiennent le PKK, et parce que les gardes
de village sont perçus comme les collaborateurs d'un État brutal et
illégitime. D'autres ont refusé parce qu'ils craignaient des
représailles du PKK.
En général, les forces de sécurité donnent aux
villageois un choix entre rejoindre les gardes de village ou être
forcés de quitter leur maisons. Dans certains cas, des chefs tribaux
peu scrupuleux ou des semeurs de troubles locaux qui ont reçu des armes
et le soutien des forces de sécurité ont procédé à mettre en place de
vieilles féodalité à l'aide des armes fournies par l'État. Le résultat
est souvent criminel, avec des gardes de village impliqués dans de
graves violations des droits de l'homme. D'après la Fondation des
Droits de l'Homme de Turquie, en 1994, "le nombre et l'autorité des
gardes de village a augmenté. Dans plusieurs régions, les questions de
sécurité ont été complètement confiées aux gardes de village." (16) A
cause de leur statuts paramilitaire d'une part, et de l'échec du
gouvernement pour enquêter sur les accusations de violations d'autre
part, les gardes de village apparaissent souvent comme à peine plus que
des forces opérant avec une licence d'impunité délivrée par le
gouvernement. Le potentiel d'abus est énorme.
L'introduction du système de gardes de village a
polarisé la région du sud-est. Les forces de sécurité turcs voient avec
suspicion les civils qui ne désirent pas faire partie du système de
gardes de village, alors que le PKK voit comme des traîtres tous ceux
qui le font. Aucun des camps n'a reconnu dans la pratique le statut de
"non combattants", ne laissant aucun terrain neutre pour la population
rurale. Souvent, les autorités turques attaquent et détruisent les
villages qui résistent au recrutement des gardes de village, tandis que
le PKK a pris pour cible aussi bien les gardes que leur famille. A la
fin de 1994 et 1995, le PKK a publié des déclarations disant qu'il
n'attaquerait pas les familles des gardes de village ou les gardes qui
avaient été forcés à combattre pour le gouvernement, mais le PKK n'a
pas tenu ces promesses.
Conséquence de la stratégie anti-surrectionnelle
La stratégie turc pour défaire le PKK comporte des
éléments tels que la dislocation forcée qui est commune aux campagnes
anti-insurrectionnelles mondiales, spécialement celles confrontant les
insurgés populaire et élitaire opérant en terrain difficile. Les
militaires ont annihilé les espoirs du PKK d'établir une zone
semi-autonome dans le sud-est de la Turquie et de se diriger vers une
large confrontation avec l'État turc. Bien que le PKK soit toujours
capable d'atteindre les forces de sécurité par des raids et des
embuscades de petite échelle, où une vingtaine de soldats pourraient
être tués, il ne peut désormais plus se déplacer librement dans le
sud-est, recevoir un soutien généreux et public de la population
rurale, où agir si vigoureusement qu'il a jadis fait dans des zones
urbaines.
A long terme, toutefois, la stratégie du
gouvernement a eu un certain nombre de conséquences fâcheuses pour la
Turquie. Légalement, la Turquie est en violation flagrante de ses
engagements internationaux en matière de respect des droits de la
guerre. Les forces de sécurité semblent toujours incapables d'éradiquer
le PKK dans le sud-est de la Turquie. De plus, la contre-insurrection a
d'avantage mis à mal l'aspiration de la Turquie à être vue comme une
démocratie libérale sur le point d'intégrer l'Europe. La situation
abyssimal des droits de l'homme en Turquie a mérité sa condamnation à
travers l'Occident. En outre, la simple poursuite d'une solution
militaire à ce qui est vu comme "le problème kurde" ferme les portes de
la non violence à l'identité kurde et aux droits culturel. Le procès et
l'emprisonnement de parlementaires kurdes en 1994, par exemple, sont
représentatifs de la façon avec laquelle l'État turc a cherché à éviter
une solution politique au conflit. Le résultat pourrait bien être
un accroissement de popularité du PKK parmi la population kurde.
De manière plus importante, peut-être, les méthodes
anti-insurrectionnelles du gouvernement ont créé une énorme sous classe
de réfugiés internes amère et appauvrie, dont les maisons et les
refuges ont été détruits de manière abrupte par l'État. Ces réfugiés
ont déménagé pour squatter des installations à travers villes turc,
fournissant au PKK une base potentielle pour le futur en organisant et
présentant à la Turquie une crise sociale et économique difficile.
B.G. a raconté à Human Rights Watch que l'armée a,
au cours des derniers mois, commencé à réaliser qu'il devrait tenter de
gagner à l'État les paysans kurde. Au cours des nombreuses descentes
auxquelles il a participé, l'armée a fouillé les maisons et ensuite a
offert des services médicaux aux villageois. "Il est de coutume que si
une personne membre du PKK était découverte dans le village, le village
entier était considéré être pour le PKK", dit-il. "Maintenant ils
essaient juste de trouver la seule personne du PKK sans blessé
quiconque." Il a admis cependant, que la nouvelle politique avait à
peine commencé à pénétrer les unités de terrain. En tous cas, beaucoup
de la campagne a déjà subi une dépopulation; une grande part du plus
sérieux dommage a déjà été fait.
(1) De nombreuses théories ont été proposées par les
experts pour expliquer l'approche dur de la Turquie aux Droits des
groupes kurde. Alors que certains maintiennent que gouvernement turc
est intéressé par les importantes ressources naturelles du Sud-est,
d'autres mettent en avant
(2) Les Kurdes qui s'identifient comme Turcs and
parlent turc ont traditionellement été soumis à une discrimination
moins importante. Toutefois, en raison de la guerre avec le PKK, la
discrimination à l'encontre des Kurdes ayant adopté l'identité turque
se renforce également.
(3) Jusqu'en 1989, lorsqu'elle a été abrogée, la Loi
interdisant l'usage du kurde en public ne mentionnait même pas le mot
"kurde". La Loi 2932, adoptée en 1982, était appelée "la Loi concernant
l'usage de langues autres que le turc."
(4) Voir Stephen Button, "Turkey Struggles with
Kurdish Separatism," Military Review (décembre 1994 - janvier-février
1995) p. 78.
(5) L'interview du Human Rights Watch avec V.A. cité
à travers ce dossier, a pris place à Istanbul le 3 juillet 1995.
(6) Christopher Panico, "Turkey's Kurdish Conflict,"
Jane's Intelligence Review, vol.7, n° 4 (avril 1995), p.171.
(7) La Fondation des Droits de l'Homme de Turquie,
Turkey Human Rights Report: 1994, A Summary. (Ankara: juillet 1995),
p.7.
(8) Basé sur un compte rendu oral du discours de
Mentese fait à Human Rights Watch par Jonathan Rugman, correspondant à
Istanbul du Guardian (London).
(9) Parmi ceux-ci, 253 étaient des villages vidés,
235 étaient des villages partiellement vidés, 1.535 étaient des hameaux
complètement vidés, et 141 étaient des hameaux partiellement vidés.
Voir Derya Sazak, "Göçerlerin Drami", Milliyet (Istanbul), 25 juillet
1995.
(10) Le chiffre est donné par Akin Birdal, président
de l'Association Turque des Droits de l'Homme, à Human Rights Watch
lors d'une interview en août 1994. Il a basé ses estimations sur les
données de population provenant de rapports de recensement.
(11) Fondation des Droits de l'Homme de Turquie,
Turkey Human Rights Report, p.5.
(12) "Un Ministre accuse la Turquie de terrorisme
d'État", Reuters, 11 octobre 1994.
(13) Human Rights Watch/Helsinki, "Turkey: Forced
displacements", p.3.
(14) L'interview du Human Rights Watch avec B.G.,
cité à travers ce rapport, s'est déroulé à Istanbul les 12 et 13 juin
1995.
(15) Le système de garde de village a
traditionnellement impliqué la manipulation des fidélités et alliances
tribales kurdes. Dans le Sud-est de la Turquie, certains kurdes
appartiennent à des tribus, d'utres non. L'émigration et la réforme
agraire ont affaibli le système tribal.Environ 90 pour cent de tous les
gardes de village appartient à des tribus kurdes.
(16) Fondation des Droits de l'Homme de Turquie,
Turkey Human Rights Report, p.3.
Transferts d'Armes et violation du droit de la guerre
La Turquie a été un grand bénéficiaire d'aides
économique et militaire depuis qu'elle est devenue membre de l'OTAN en
1952. Les membres riches de l'OTAN ont vendu et donné une large
gamme d'armement à la Turquie, comprenant 500 avions de combat, 560
hélicoptères de combat, 5000 chars, et des milliers de pièces
d'artilleries, des mortiers, des mitrailleuses et des fusils
d'assaut. De nombreuses études indiquent que la Turquie était le
plus grand importateur d'armes au monde en 1994.(1)
Les États-Unis ont été les fournisseurs principaux
d'armes de la Turquie. En 1995, le gouvernement américain a
estimé qu'il avait fourni près de 80 pour cent de l'équipement de
défense utilisé par les Forces Armées Turques.(2) Au cours de la
décennie précédente, le Congrès américain a consacré 5,3 milliards $ en
aide militaire (dons et prêts destinés à l'achat d'armes) à la Turquie,
faisant de la Turquie le troisième plus grand bénéficiaire de l'aide
militaire américaine, après Israël et l'Égypte.
L'Allemagne a été le deuxième plus grand fournisseur
d'armes de la Turquie. Les autres fournisseurs membres de
l'OTAN sont composés de l'Italie, de la France, des Pays-Bas, du
Royaume-Uni, de l'Espagne et du Canada.(3) La Turquie a
traditionnellement été un des plus pauvres pays membres de l'OTAN, de
même que la Grèce et le Portugal, et les pays de l'OTAN mieux portants
ont vu le soutient des forces armées et des industries de la défense de
ces nations comme une voie vitale pour améliorer les valeurs
stratégiques des alliés occidentaux.
Le traité de 1990 sur les Forces Conventionnelles en
Europe (FCE) s'est révélé être une énorme aubaine pour les forces de
sécurité turques, y compris ces combats dans le conflit du
Sud-est. Le traité oblige les pays de l'OTAN et les pays de
l'ancien Pacte de Varsovie à réduire leur puissance de feu
conventionnelle en Europe centrale, et permet le transfert de ces mêmes
armes au flanc méridional de l'OTAN.
Comme les critiques s'élevaient en Europe contre les
traitements infligés aux Kurdes par la Turquie, cette dernière s'est de
plus en plus tournée vers l'extérieur de l'OTAN pour s'approvisionner
en armes, y compris vers des pays comme la Fédération de Russie,
Israël, le Pakistan et bien d'autres nations. La Turquie a aussi tenté,
avec succès, de développer davantage son industrie locale de l'armement.
Toujours en réponse aux critiques dirigées contre
ses pratiques dans le Sud-est, la Turquie a créé, en 1993, un système
de cotation de ses fournisseurs d'armes potentiels selon leur degré de
disposition à fournir des armes à la Turquie sans critiquer la
situation des droits de l'homme en Turquie ou grever de conditions les
ventes d'armes. La Turquie n'achètera pas d'armes aux pays figurant
dans la liste "rouge"; les acquisitions d'armes en provenance de pays
se trouvant dans la liste "jaune" nécessitent l'approbation explicite
du gouvernement turc, tandis qu'aucune approbation préalable n'est
requise en ce qui concerne les achats effectués auprès des pays
figurant dans la liste "verte".(4)
Les États-Unis
Depuis qu'elle a rejoint l'OTAN, la Turquie a été un
des fidèles partenaires militaires des États-Unis. Les Accords de
Coopération de Défense et Économique (ACDE) signés entre les deux pays
en 1980 et en 1987 ont cimenté des relations bilatérales
étroites. Les ACDE permettent aux États-Unis d'accéder à des
champs d'aviation et des facilités en matières de renseignements et de
communications;
Pendant la décennie précédente (AF1985 -AF1994), les
États-Unis ont vendu à la Turquie pour 7,8 milliards $
d'armes.(5) Depuis les trois dernières années, alors que la
guerre menée par la Turquie dans le Sud-est a subi une grande escalade,
les accords de ventes d'armes américaines avec la Turquie ont totalisé
4,9 milliards $ (dépassés uniquement par l'Arabie Saoudite et Taiwan);
les livraisons d'armes actuelles ont totalisé 2,4 milliards $
(dépassées uniquement par l'Égypte).(6) Les récents transferts
d'armes américaines à la Turquie ont comporté des avions de chasse, des
hélicoptères de combat, des hélicoptères de transport, de l'artillerie,
des véhicules blindés de transport de troupes, des armes légères et des
armes portatives; tous ces types de systèmes d'armes ont été utilisés
par la Turquie en violation des loi de la guerre.(7)
Parce que la politique américaine souligne
l'importance d'une relation stratégique avec la Turquie, la Turquie est
devenue un grand bénéficiaire de l'aide militaire américaine, le
troisième plus grand après Israël et l'Égypte. L'aide militaire
américaine s'articule autour de trois programmes: le programme de
Financement Militaire Étranger (FME), qui permet aux nations d'acquérir
de l'équipement militaire américaine au travers de dons et de prêts; le
programme des Articles de Défense en Surplus (ADS), dans le cadre
duquel les nations reçoivent des armes dont l'armée américaine n'a plus
besoin sans frais ou à un taux réduit; et le programme cascade FCE.
La majorité de l'aide militaire américaine à la
Turquie entrant dans le cadre du programme de Financement Militaire
Étranger a été affecté au programme Onyx de Paix pour l'avion de chasse
F-16, qui est construit en Turquie dans le cadre d'un accord de
coproduction avec la firme américaine Lockheed Corporation. La
valeur totale de ce programme de 240 avions a été fixé à 7,6 milliards
$. L'AF 1996 est la dernière année pendant laquelle les
États-Unis financeront le programme. Les 160 avions du programme
Onyx I ont été construits. Les quatre-vingts avions restant
commandés dans le cadre de l'Onyx de la Paix II sera financé par le
fonds de défense pour la Guerre du Golfe constitué en 1991 par les
États-Unis, la Turquie, l'Arabie Saoudite, le Koweït et les Émirats
Arabes-Unis. Ces nations se sont engagés à donner 3,5 milliards $
sur cinq ans pour récompenser la Turquie de son soutien à la coalition
menée par les États-Unis contre l'Irak.(8)
Comme détaillé dans ce rapport, des avions de chasse
turcs, y compris des F-16, ont été utilisés pour attaquer des villages
et de tuer des civils, en violation du droit humanitaire
international. En d'autres occasions, les avions ont été utilisés
délibérément pour détruire des structures civils, contribuant au
processus de dislocation forcée.
Au cours de 1992 et 1993, des armes délivrées à la
Turquie dans le cadre des programmes ADS et cascades ont apparemment
comporté 1509 chars M-60-A1/A3, 147 obusiers M-1 10 203 mm, 489
véhicules blindés de transport de troupes M-1 13-A2, vingt-neuf avions
de chasse F-4E. (9) Human Rights Watch croit que ces systèmes d'armes,
ou des systèmes similaires, ont été utilisés dans le Sud-est dans des
incidents ayant donné lieu à des violations des droits de la guerre.
Le Congrès a été avisé dans l'AF 1994 des
propositions de livraisons suivantes dans le cadre du programme ADS :
110 mitrailleuses A1-85, 88000 cartouches de 40 mm, 1314 cartouches de
105 mm, quatorze hélicoptères anti-sous-marins SH-2F LAMPS, un lanceur
ASROC ( missile anti-sous-marine), des pièces pour chasseur F-4, et
autres pièces d'armes. Dans l'AF95, le Congrès était avisé du transfert
de 515 unités de feu de défense aérienne Rapier, et de 130 missiles
air-air Sparrow.
Un autre accord d'importance pour l'AF1995 réside
dans la coproduction de chars M-1-AI Abrams en Turquie. General
Dynamics Land Systems et une compagnie turque dont le nom n'est pas
encore connu prévoient de produire cinquante chars par ans pendant une
période de dix ans.
A cause de leur large utilisation dans les abus
perpétrés dans le Sud-est, Human Rights Watch est spécialement concerné
par le transfert d'hélicoptères de combat à la Turquie. En
janvier 1993, la Turquie a signé un contrat pour l'achat de
quatre-vingt-quinze hélicoptères de transport Sikorsky S-70A Black Hawk
pour une valeur 1,1 milliards $. Quarante-cinq d'entre eux ont
été achetés directement, alors que le reste était coproduit en
Turquie. D'après une source, cinq de ces Black Hawks sont
destinés à la Gendarmerie. Cependant, le plan de
coproduction pour les cinquante Black Hawks restants a été suspendu en
raison des contraintes budgétaires en Turquie.
En plus des Black Hawks la branche aérienne de
l'armée à l'intention d'augmenter sa capacité d'attaque par
l'acquisition d'hélicoptères de combat Bell AH-I Cobra.
Trente-huit Cobras ont été livrés entre 1990 et 1992. En évaluant
cette puissance aérienne, un journal militaire a déclaré, "la Turquie
entrera dans le siècle prochain dotée d'une force militaire aérienne
incomparablement plus puissante que celle qu'elle possédait au début
des années 1990. C'est une capacité de combat que ses alliées de
l'OTAN et ses voisins espèrent que la Turquie ne sentira jamais le
besoin d'utiliser".
De plus, la Turquie prévoit d'acquérir 200
hélicoptères supplémentaires au cours de la prochaine décennie, dont
106 hélicoptères de combat. Les fabriquants d'hélicoptères
américains, européens et russes s'affronteront pour décrocher le
contrat. Bell Helicopter, aux États-Unis, a déclaré qu'il
aimerait vendre davantage d'hélicoptères de combat AH-IN Super cobra,
dont la Turquie possède déjà dix exemplaires.
Les inquiétudes qui voient le jour au sujet de la
flotte grandissante d'hélicoptères turcs provient de la possibilité que
ces hélicoptères de combat peuvent être utilisés pour faire feu de
manière discriminante sur les villages ou sur d'autres installations
civiles, et que les hélicoptères de transports peuvent être utilisés à
apporter des renforts et du ravitaillement aux troupes qui s'engagent,
durant leurs opérations, dans des pratiques illégales comme des
déplacements forcés, des exécutions sommaires, des tirs non
discriminants, de la torture.
La Turquie a aussi reçu un certain nombre d'armes
portatives et d'armes légères des États-Unis. Un nombre
indéterminé de fusils M-16-A2 ont été vendues à la Turquie dans le
cadre du programmes de ventes commerciales. Les ventes
commerciales diffèrent des Ventes Militaires Étrangères en ce que les
exportations vont directement du fabricant américain au gouvernement
étranger, mais doit d'abord obtenir une licence du bureau des contrôles
du commerce de la Défense du Département d'État. Les chiffres sur
les ventes commerciales y sont plus difficiles à obtenir que pour les
ventes entre gouvernements parce que le Département d'État ne publiera
pas d'informations sur les ventes des sociétés.
Les États-Unis ont aussi fourni à la Turquie des
lanceurs de grenade pour fusils M-16, y compris le lanceur de grenade
M-203 de 40 mm Colt. Le lanceur de grenade tire une large
gamme de munitions 80 mm hautement explosives et à usage spécial
s'attache facilement au M-16 en cinq minutes. Human Rights Watch
a déterminé que la Gendarmerie et les forces spéciales de police, ainsi
que les officiers de certaines unités de l'Armée Turque, utilisent des
M-16 avec des lanceurs M-203. Ces unités sont aussi connues pour
être les plus abusives en termes des droits de l'homme.
La Turquie possède un certain nombre de mortiers
américains dans ses inventaires, dont quelque 1.265 mortiers M-30
107 mm de fabrication américaine. Le M-30 est une arme qui peut être
transportée manuellement sur des courtes distances et qui tire dix-huit
balles par minutes.
Parmi les armes légères vendues à la Turquie entre
1980 et 1993 dans le cadre des programmes des Ventes Militaires
Etrangères, il y a des lanceurs de grenade 40 mm M-79, des munitions
pour fusils d'assaut et mitrailleuses, des grenades à main à
fragmentation M-67 et des grenades à mains incendiaires M-14.
Les États-Unis ont exporté plus de 40.000 mines
terrestres antipersonnelles et antichars vers la Turquie depuis le
début des années 1980. Il y a eu des rapports concernant l'utilisation
de mines terrestres antipersonnelles, que ce soit par les forces
turques ou par celles du PKK, dans la guerre du Sud-Est. Les États-Unis
ont fourni à la Turquie des mines conventionnelles antipersonnelles
M-18A1 Claymore placées manuellement, et des mines modernes ADAM (Area
Denial Artillery Munition) commandées à distance. Le ADAM est un
projectile qui contient trente-six mines antipersonnelles M-74 à
l'intérieur. Chaque mine s'arme à l'impact et envoie sept fils de
détente qui, lorsqu'ils sont perturbés, provoquent l'explosion de la
mine, projetant des centaines de fragments dans toutes les directions.
Les États-Unis ont vendu à la Turquie 952 cartouches ADAM pour un total
de 34.380 mines.
Human Rights Watch croit que tout usage de mines
antipersonnelles est illicite sous la loi humanitaire existante, à
cause de leur nature non discriminante.
Allemagne
Depuis les années 1960, l'Allemagne a été le
deuxième plus grand fournisseur militaire de la Turquie.
L'Allemagne a fourni de nombreux articles de défense qui vont de
l'équipement de communication aux avions de chasse. D'après
l'Institut International pour la Recherche de la Paix à Stockholm
(SIPRI), la Turquie a passé commande pour les articles suivants à
l'Allemagne entre 1990 et 1993: 46 avions Phantom F-4F, 46 avions de
reconnaissance Phantom RF-4E, 131 lance-roquettes LARS 110mm, 131 armes
M-110-A2 203mm, 300 véhicules blindés pour le transport de troupes
BTR-60P (équipement de l'ancienne RDA), 100 chars Léopard 1-AI, et 20
véhicules blindés de sauvetage. Ces chiffres représentent le nombre
d'articles commandés; l'information sur les livraisons actuelles est
incomplète. Dans le Registre des Armes Conventionnelles de 1994
des Nations-Unies, la Turquie a indiqué la réception en 1993 de 85
chars Léopard (par rapport aux 100 commandés originellement, d'après le
SIPRI), 187 véhicules de combat blindés M-113, 15 avions de chasse F-4,
et un navire d'entraînement de l'Allemagne. Le rapport de
l'Allemagne au registre est en cours.
Le Phantom allemand F-4E a été en service dans les
Forces de l'Armée de l'Air Turques depuis les années 1970. Les
Forces de l'Armée de l'Air Turques sont basées principalement sur les
Phantom pour leur capacité à transporter des missiles Maverick et des
bombes guidées par laser.
L'Allemagne ne fournit pas uniquement les Forces
Armées Turques mais également la police, sous la forme d'aide en
équipement et en entraînement. Cette aide a consisté en des dons
en espèces pour faciliter l'achat d'armes pour les Forces de Police;
les équipements tels que des ordinateurs fournis par Siemens; et
l'entraînement des Forces Spéciales de Police dans le cadre de la lutte
anti-terroriste.
D'après un journal de commerce de défense,
l'Allemagne a fourni la Turquie à raison de 256.000 fusils Kalashnikov,
5.000 mitrailleuses et 1.000.000 de cartouches provenant des stocks de
l'ancienne armée d'Allemagne de l'Est. Parmi les autres armes
transférées des stocks de l'armée de l'ex-RDA on trouve des munitions
pour des canons BTR-60, des camions, 5.000 grenades propulsées par
fusée RPG-7, et de nombreux missiles innomés et des bombes avec fusée.
Le gouvernement allemand a déclaré que ces armes ne seraient pas
utilisées contre les Kurdes.
En 1992, l'organisation d'aide Allemande Medico
International a enquêté sur l'utilisation de l'armement Allemand en
Turquie. Il a trouvé que les tanks Léopard de la RDA et les
véhicules blindés pour le transport des troupes BTR étaient utilisés
dans la dépopulation de nombreux villages kurdes. Malgré les liens
militaires étroits entre l'Allemagne et la Turquie, cette relation a
été interrompue à plusieurs reprises pendant la guerre menée par la
Turquie dans le sud-est du pays. L'Allemagne a institué un
embargo sur les armes à l'encontre de la Turquie en 1992 en réaction
aux attaques turques contre les Kurdes, mais l'embargo a été levé trois
mois plus tard. En avril 1994, l'Allemagne a arrêté de nouveau
ses ventes d'armes pendant qu'elle enquêtait à propos des allégations
selon lesquels la Turquie aurait utilisé, dans le sud-est de la
Turquie, des véhicules blindés de transport de troupes BTR-60 fourni
par l'Allemagne. L'embargo était levé après que la Turquie ait
argumenté que les BTR-60 étaient venus, non pas de l'Allemagne, mais de
Russie. Après l'invasion par la Turquie du nord de l'Irak le 20
mars pour y suivre le PKK, l'Allemagne a de nouveau gelé ses ventes
militaires à la Turquie. Cet embargo a été levé à la fin du mois
de septembre 1995 lorsque l'Allemagne a libéré une aide militaire gelée
d'une valeur de 110.000.000 $ pour soutenir la fabrication de deux
frégates pour la Marine Turque.
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(1) Voir, par exemple, John Sislin et Siemon
Wezeman, 1994 Arms Transfers: A Register of Deliveries from Public
Sources (Monterey : Institut Monterey de l'Institut International de la
Recherche sur la Paix de Stockholm, mars 1995).
(2) Département Américain du Commerce, Bureau des
Exportations, Diversification Européenne et Marché de la Défense : Un
Guide Utile pour Entrer dans les Marchés Outre-Atlantique.
(Washington, DC : juin 1995), page 286.
(3) D'après l'Institut International de la Recherche
sur la Paix de Stockholm (SIPRI), entre 1987 et 1991 la Turquie a reçu
62 pour cent de ses armes des États-Unis, 24 pour cent de l'Allemagne,
4 pour cent des Pays-Bas, et le reste de divers autres membres de
l'OTAN. Cité in Pax Christi International, The Turkey Connection:
Militay Build-up of A New Regional Power, p. 9.
(4) Pour une discussion de ce système, que la
Turquie n'a pas appliquée avec consistance, voyez Lale Sariibrahimoglu,
"Turkey Bars Defence Firms Over Politics," Jane's Defence Weekly, vol.
19, n° 16 (17 avril 1993), p.5.
(5) Ceci inclut les 6,8 milliard $ dans le cadre du
programme FMS et 1 milliard $ en vente commerciale. U.S. Defense
Security Assistance Agency, Foreign Military Sales, Foreign Military
Construction Sales and Military Assistance Facts, As of September 30,
1994. (Washington DC: 1994), pp.18,57. Les Ventes Militaires Étrangères
(FMS) sont des ventes de gouvernement à gouvernement d'articles de
défense réalisées par la Defense Security Assistance Agency. Dans le
cadre de ce programme, le Département de la Défense achète des armes à
un fabricant américain et les revend à un gouvernement étranger.
Beaucoup des armes que la Turquie a achetées dans le cadre du programme
FMS ont été financées par des prêts et dons américains. Des armes
peuvent également être exportées par la voie des ventes commerciales,
dans laquelle les exportations vont directement du fabricant américain
au gouvernement étranger, mais doivent au préalable avoir reçu une
licence du Bureau du Département d'État du Contrôle du Commerce de
Défense.
(6) Les accords de ventes d'armes conclus entre les
États-Unis et la Turquie ont totalisé 2,2 milliards $ au cours de
l'AF1994, dépassés uniquement par les contrats américains avec Israël.
Les accords FMS sont estimés à 576 millions $ pour l'AF1995 et 320
millions pour l'AF1996. U.S. Department of State, Congressional
Presentation for Foreign Operations, Fiscal Year 1996. (Washington, DC:
1995), pp.484,491.
(7) D'après le SIPRI, les États-Unis ont vendu les
articles de défense suivants à la Turquie entre 1990 et 1993: quarante
avions de combat F-4E Phantom, seize hélicoptères AH-IS, dix
hélicoptères R-222, quarante-cinq hélicoptères Black Hawk,
soixante-douze canons M-1 10-A2 203 mm autopropulsés, 550 M-1 13
véhicules blindés pour le transport de troupes (APC), 164 chars de
combat, 1.258 chars de combat M-60-A3, quarante véhicules blindés
Commando pour le transport de troupes, des radars, des lanceurs mer-mer
Seasparrow pour frégates, 350 missiles air-sol AGM-65D, vingt missiles
air-air AIM-120A AMRAAMM destinés à équiper les chasseurs F-16, et 469
missiles portables STINGER sol-air. Stockholm International Peace
Research Institute, SIPRI Yearbook 1994. (Oxford: Oxford University
Press, 1994), p.544.
(8) "Turkey and U.S. Sign Accord for Gulf Defence
Fund", Reuters, 3 octobre 1994. Voir également, LTC Paul S. Gendrolis,
"Joint Programs Directorate: The Heart of It All", The DISAM Journal of
International Security Assistence Management, vol.17, no.3 (Printemps
1995), p.21.
(9) Cette information provient des entrées des
États-Unis et de la Turquie au Registre des Nations unies des Armes
Conventionnelles. Sa précision est incertaine à cause de chiffres
divergeants fournis par les États-Unis et la Turquie. Nations unies,
Registre des Nations unies des Armes Conventionnelles. (New York:
United Nations Publications).